Eau de Paris, un modèle d’entreprise publique intégrée évolutif

En 2009, la ville de Paris faisait un pari audacieux. Elle confiait à un opérateur public la gestion du service public de l’eau potable de Paris, en misant sur un modèle de gestion intégrée. Dix ans plus tard, ce modèle a largement fait ses preuves. Eau de Paris, entreprise 100 % municipale, maîtrise l’ensemble de la filière eau potable. Elle s’appuie sur ses métiers pour créer de nouveaux services urbains et générer des externalités positives. Elle joue de ses installations présentes sur 5 régions, 12 départements et 330 communes du bassin parisien pour contribuer aux solidarités urbaines et territoriales. C’est le fruit d’une stratégie d’intégration particulière.

Par Benjamin Gestin, Directeur général d’Eau de Paris. Benjamin Gestin participera à la prochaine séance de l’Université populaire de l’eau bien commun, consacrée aux coopérations entre collectivités et services publics, lundi 17 juin de 19h à 21h à la résidence de l’eau, 4e étage de la mairie du 10e, 72 rue du Faubourg Saint Martin, métro Strasbourg Saint-Denis.

De la gestion intégrée de l’eau à une stratégie d’intégration

En économie, l’intégration renvoie à un phénomène classique de regroupement d’activités au sein d’une même structure pour maîtriser des savoir-faire techniques, financiers ou commerciaux et pour bénéficier d’effets de synergie. L’intégration verticale vise à maîtriser les différents stades de production et de distribution d’un même type de produit. L’intégration horizontale, qui s’exprime par l’extension du champ d’activité d’une entreprise, vise quant à elle à répartir les coûts sur une plus grande quantité d’activités ou de produits, à mieux contrôler un marché et ainsi à maîtriser la concurrence. Ces stratégies de regroupement somme toute classiques se retrouvent dans des organisations privées tout autant que publiques.

Laboratoire d'Eau de Paris (Ivry, 94)

L’intégration verticale est une tendance naturelle du secteur de l’eau. Il y a en effet une évidence à s’adapter à la continuité du petit cycle de l’eau en rassemblant au sein de la même entité les différentes étapes du service public d’eau potable : captation, traitement, transport, stockage, distribution. C’est d’ailleurs l’un des fondements de la création d’Eau de Paris en 2010 et de la réunion sous son égide des activités de distribution et de relation avec les abonnés et les usagers. De la protection de la ressource au service à l’usager, de l’analyse de la qualité de l’eau et de la R&D à la maîtrise d’ouvrage et d’œuvre des investissements, de la gestion des installations de traitement de l’eau à la gestion des données produites par son système de télérelevé des consommations … Eau de Paris a fait le choix d’une intégration verticale poussée.

Du service public à l’intérêt général

Ce choix répond d’abord à un objectif de maîtrise continue de la qualité de l’eau produite et distribuée et des risques associés. Il relève aussi d’un objectif de transparence – dans la formation des coûts, notamment – et d’indépendance – dans les grands choix structurants pour le service public, notamment en matière d’investissement. A ce titre, il faut comprendre comme faisant partie du modèle intégré d’Eau de Paris une coopération forte avec l’autorité organisatrice. Il traduit enfin un souci constant d’efficacité économique, en mutualisant des fonctions nécessaires à toutes les étapes, en limitant les coûts de transaction et de coordination et en rendant à l’usager – au travers de la maîtrise du prix ou de la qualité du service – toute la valeur ajoutée générée.

Cette approche a conduit à une gestion intégrée de l’eau dans ses aspects écologique, technologique, financier et de gouvernance. Cependant, en dix ans, les enjeux climatiques ont bouleversé les politiques publiques et modifié leurs frontières. La ville se transforme pour tendre vers le post-carbone. Les hinterlands se repensent en complémentarité des centres urbains et non plus en opposition. Les raisonnements par silo font place à des approches transversales. L’eau, le sol, la biodiversité, l’agriculture, l’alimentation, le climat, l’énergie, sont désormais inextricablement liés.

Source de Cérilly (Yonne)

Ce qui fait d’Eau de Paris un modèle singulier d’entreprise publique intégrée n’est pas sa seule cohérence verticale. C’est sa capacité à tirer tous les bénéfices de cette logique et, mieux encore, à la conjuguer avec une autre forme d’intégration, que l’on peut appeler « transversale, responsable et territoriale ». En exerçant des activités contiguës à son cœur de métier pour concourir à d’autres objectifs d’intérêt général partout où elle est, Eau de Paris a construit un écosystème économique, écologique et social d’intérêt général, capable de faire face à ces changements profonds.


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