Ethylène glycol dans la Marne, les fortes recommandations de la cellule de veille sanitaire

En relais d’associations locales et environnementales, de collectivités territoriales et de « simples » usagers citoyens, la Coordination EAU Île-de-France mène depuis le début de 2012, une action sur les terrains juridique et médiatique pour qu’ADP ne rejette plus dans la Marne des eaux pluviales contaminées par les glycols. Suite à cette action et à notre demande d’une étude indépendante, la préfète de Seine et Marne a saisi la Cellule inter-régionale d’épidémiologie (CIRE) Île-de-France—Champagne Ardenne, représentant de l’Institut national de Veille Sanitaire (InVS). L’avis de la CIRE -daté de novembre 2012, qui nous a été transmis en juin 2013 !-  a pour objectif la détection d’un glycol toxique à la prise d’eaux brutes de l’usine de potabilisation d’Annet – sur- Marne afin d’en estimer l’impact sur la santé publique.

NB : ci-dessous, les propos de la CIRE sont repris en italique.

Le contexte de détection de l’éthylène glycol toxique.

L’alerte lancée par l’association AVRVM  le 8 février 2011 s’appuie sur une mesure  ponctuelle du glycol toxique EG réalisée en mars 2009 par l’exploitant à la prise d’eaux brutes de l’usine de potabilisation d’Annet-sur-Marne.

Selon la préfecture citée par la CIRE…ce composé hors programme de surveillance…à fait l’objet d’une dérogation accordée par la préfecture… lors d’une phase de rejets importants d’eaux de ruissellement provenant de l’aéroport Roissy CdG.

La préfecture reconnaît ainsi l’existence et l’origine de la pollution par l’éthylène glycol  à la prise d’eau en Marne de l’usine d’Annet.

Plus loin dans son rapport, la CIRE considère d’autres sources possibles d’éthylène glycol dans l’environnement. On lit ainsi …aucune source industrielle connue pour utiliser ou rejeter de l’éthylène glycol dans l’environnement n’est recensée sur le secteur par les services des installations classées.

La caractérisation de la pollution

Le signal ponctuel détecté concerne …une pollution par un glycol, composé principalement utilisé par les aéroports comme produit antigel

De l’examen  des analyses  VEOLIA de 2009 pour les paramètres non imposés par la réglementation,  le Centre Anti Poison (CAPTV) estime que…le risque de confusion avec d’autres types de glycol (que le glycol EG) est  négligeable … au regard de la technique analytique spécifique utilisée par VEOLIA.

La corrélation entre la contamination par l’éthylène glycol observée dans les eaux de la Marne devant l’usine d’Annet et la pollution de la Reneuse (mesurée par le carbone organique total) peut laisser penser que la présence d’éthylène glycol  dans les eaux de la Reneuse est quasi permanente.

La chronicité de la contamination à la prise d’eau de l’usine d’Annet sur Marne ne peut donc être écartée.

Expositions et risques sanitaires pour les usagers.

La CIRE conclut qu’ …il est extrêmement improbable que l’exposition ponctuelleait eu des conséquences néfastes sur la santé des abonnés … à la seule considération du pic de concentration de l ’éthylène glycol mesuré en mars 2009 à la prise d’eau brute d’Annet-sur-Marne qu’ait produite l’ARS .

La CIRE ignorait ainsi les conditions aléatoires annuelles de vidange du bassin de rétention des eaux pluviales de la plateforme aéroportuaire que la Police de l’eau aurait dû  porter à sa connaissance…dans un souci de transparence… précise t’elle.

 En conséquence, nous demandons  à la CIRE une approche plus rigoureuse du risque sanitaire par la prise en compte d’une  exposition ponctuelle « 14 jours »  réaliste, un facteur majorant de 7 affectant l’indice de risque sur lequel est basé son avis, le rendant en l’état peu crédible.  Dès lors, on peut considérer  que l’exposition ponctuelle « 14 jours » présente un risque probable avec un indice proche de l’unité.

LE RISQUE D’ EXPOSITION CHRONIQUE  DEVRA ETRE CONSIDERE au regard du seuil de concentration du « glycol » à la prise d’eau d’Annet de 0.2 mg/l.

Nous rappelons que son  avis ainsi revu, la CIRE  devra l’inscrire dans un cadre préventif d’un risque de santé publique qui perdure depuis 2009.

Les recommandations fortes de la CIRE

La CIRE lève le doute  sur les origines de la pollution par le rappel  des constats précédents, à savoir : la proximité de l’aéroport avec l’usine d’Annet et des volumes de glycols utilisés chaque saison hivernale… qui appellent une vigilance particulière.

Force est de constater que ni l’arrêté préfectorale de février 2012, ni le protocole d’accord signé en août 2012 entre ADP et l’exploitant de l’usine ne répondent à la recommandation de la CIRE.

La CIRE conclut, face à l’inquiétude des acteurs locaux et dans un souci de transparence,  par la recommandation que…les prochaines campagnes de mesures réalisées tant au niveau d’eau pluviales d’ADP que de l’usine de potabilisation distinguent systématiquement l’éthylène glycol, le diéthylène glycol et le propylène glycol.

Un programme de surveillance à l’usine d’Annet étendu à la période des rejets d’ADP sur l’année incluant et suivant la période hivernale est demandé à VEOLIA. Les moyens de mesures devront être de précision améliorée à 0.2 mg/litre correspondant au seuil de capacité d’ozonisation de l’usine fixée antérieurement par l’exploitant.

L’ampleur de la contamination.

La CIRE rappelle que … les aéroports sont identifiés comme des consommateurs importants de glycols, c’est pourquoi …  l’arrêté préfectoral visant ADP fixe une concentration limite de 10 mg/l pour l’ensemble dans les rejets. Elle conclut…qu’aucune source industrielle connue pour utiliser ou rejeter de l’éthylène glycol dans l’environnement n’est recensée  sur le secteur.

VEOLIA Eau  fournit en 2012 une liste des 15 Syndicats de distribution de l’eau produite par l’usine d’Annet-sur-Marne . Les communes distribuées   proches de la Marne vont de Chelles à l’ouest à Clayes Souilly à l’est. Le secteur de Marne la Vallée au sud est également distribué. Une population de l’ordre de 350 000 habitants  est donc impactée en Seine-et-Marne par la contamination

A l’aval d’Annet, le Syndicat Marne Vive  coordonnant la production d’eau sur secteur « Marne confluence »,  considère que certaines usines de potabilisation  qui ont leur prise d’eau en Marne et distribuent sur les départements 93 et 94 sont susceptibles d’être impactées du fait de leur proximité.

La contamination par l’éthylène glycol des prises d’eau en Marne est donc potentiellement d’ampleur régionale propre à l’est de l’Ile de France.

Au plan national,  la notoriété de la plateforme Roissy CdG en tant qu’ «  Ouverture du ciel à la concurrence et Aéroville » contraint  ADP à  l’exemplarité en matière d’environnement  et de protection de la ressource en eau pour les autres plateformes.

En conséquence, nous  demandons à ADP de séparer les eaux pluviales contaminées sur la plateforme dans le but de les traiter  avant rejets afin d’abaisser la concentration en éthylène glycol à une valeur proche de son élimination.

Les conditions sont donc remplies pour que le paramètre contaminant des prises d’eau  en Marne soit considéré  « substance émergente » afin de l’introduire dans la norme de potabilité issue de la DCE de 1998 … dont la révision est attendue depuis plus de 5 ans par l’Agence Régionale de Santé.

Lire l’avis intégral de la CIRE

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