Le Syndicat des eaux de la presqu’île de Gennevilliers (SEPG) a reconduit la délégation de service public comme mode de gestion de l’eau en mai 2013, alors que le contrat actuel ne se termine qu’en juin 2015 –lire le rappel des faits ici. Une tentative de court-circuiter tout débat citoyen à ce sujet au moment des élections municipales. Peine perdue! La Coordination Eau Île-de-France, Naturellement Nanterre et ATTAC 92, ainsi que des citoyens de cinq communes, ont déposé un recours au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui a des chances de l’emporter tant les conditions de déroulement de la séance semblent exotiques au regard de la loi!
Le SEPG exerce la compétence « eau » pour les communes suivantes : Asnières-sur-Seine, Bois-Colombes,Colombes, Courbevoie, Gennevilliers, La Garenne-Colombes, Nanterre, Rueil-Malmaison, Suresnes, Villeneuve-la-Garenne. La séance du 29 mai 2013 s’est tenue dans des locaux mis à la disposition de la société Eau et force (Suez), délégataire actuel, par le SEPG. La séance n’a pas été ouverte au public. Mieux, le bâtiment, d’habitude ouvert au public, avait été fermé pour l’après-midi « à titre exceptionnel »! Des vigiles filtraient l’entrée sur la base d’une liste : une initiative du délégataire, précisera le président du SEPG!
Cela donne un premier motif au recours. En effet, les pouvoirs de police administrative ne peuvent être confiés à une personne privée, il s’agit même d’un principe constitutionnel! De plus, les vigiles n’étaient pas placés sous le contrôle du président du SEPG mais sous celui du délégataire…
L’accès de la séance n’a pas été public. Des citoyens souhaitant assister à cette séance en ont été empêchés, de manière parfaitement illégale. En effet, les vigiles placés à l’entrée du bâtiment ont indiqué à des personnes souhaitant assister à la séance qu’ils ne pouvaient les laisser entrer dans la mesure où leurs noms ne figuraient pas sur la liste qui leur avait été fournie. Le huis clos n’avait pas été déclaré et le président du SEPG a été incapable de prouver une quelconque intention de perturber le bon déroulement de la séance.
Atteinte également au principe de neutralité puisque la séance consacrée au renouvellement ou non de la délégation de service public s’est tenue dans les locaux du délégataire actuel!
Sur le fond, le recours pointe, en particulier, une erreur manifeste d’appréciation. Le rapport relatif au choix du mode de gestion est particulièrement indigent. Les caractéristiques du contrat approuvées par la délibération sont clairement insuffisantes au vu des enjeux. Laurence Lenoir, élue d’Asnières et membre du comité d’administration du SEPG, a relevé que la différence estimée de coût entre la délégation de service public et la régie de 3%, « est faible, et ne peut être avancée comme un élément déterminant dans le choix du mode de gestion, en raison de la marge d’incertitude inhérente à la méthode d’estimation, potentiellement supérieure à 3% ». Le rapport insiste beaucoup plus, et à plusieurs reprises, sur les risques qui pèseraient sur les élus en cas de choix d’une gestion publique …sans rien démontrer!
Il s’agit de la part de la (très courte) majorité du SEPG d’une position idéologique dénuée de tout fondement économique et technique. Ainsi M. D’Estaintot, délégué de Rueil-Malmaison, justifie ainsi son choix en faveur de la délégation de service public par « l’analyse des avantages et inconvénients à la fois pour les habitants et les élus ». Or les élus délégués au SEPG sont sensés représenter les intérêts de la commune et de ses habitants, et non leurs intérêts propres!
Les associations et les usagers demandent donc l’annulation des trois délibérations prises ce jour-là:
-le choix de la reconduction d’une gestion déléguée et d’un affermage comme mode de gestion du service public de production et distribution de l’eau potable et de la diversification des ressources ;
− l’autorisation au président de lancer la procédure de consultation de bureaux d’études en vue de désigner un assistant à maîtrise d’ouvrage pour accompagner le SEPG jusqu’à la désignation du futur délégataire ;
− L’approbation du projet d’avenant à la mission d’assistance pour l’établissement du schéma directeur.
.Il faut rappeler que les délibérations ont été approuvées par 13 voix contre 11 (suite à un changement de titulaire, une déléguée d’Asnières, hostile aux délibérations, n’a pas été convoquée par le président). Il n’y a donc en réalité qu’une voix d’écart pour une décision fondamentale pour l’avenir de ce syndicat! Le vote s’est fait selon une stricte partition droite/gauche: du coup, le basculement de droite à gauche d’une seule des dix villes pourrait changer la donne.
Le recours des associations vise à ouvrir la possibilité de revenir sur la renouvellement de la délégation de service public comme mode de gestion de l’eau, d’instaurer un débat démocratique qui n’a pas eu lieu et, in fine, de donner une seconde chance à la création d’une régie publique qui répond à l’intérêt général de la population..