Traces de médicaments et pesticides dans 10% des eaux en bouteille
Des traces de pesticides et de médicaments, dont un pour traiter le cancer du sein, ont été décelées dans environ 10% des eaux en bouteille, sans toutefois remettre en cause leur potabilité, révèle lundi une étude de 60 millions de consommateurs et de la Fondation France Libertés.
« A court terme, il n’y a absolument aucun problème de qualité. Ces eaux sont parfaitement buvables », insiste le rédacteur en chef de 60 millions de consommateurs, Thomas Laurenceau, interrogé par l’AFP. « On est dans l’ordre de l’ultra-trace, du millième de micron, c’est vraiment minuscule », a-t-il précisé.
L’enquête « ne met absolument pas en cause l’honnêteté des embouteilleurs », mais interroge la contamination de l’environnement par les pratiques humaines, ajoute-t-il. « Il y a inquiétude sur la qualité de la ressource globale », résume M. Laurenceau, qui appelle, avec France Libertés, à « la remise à plat des normes de qualité » prenant en compte les nouveaux polluants.
L’analyse a porté sur 47 bouteilles d’eau, trois bonbonnes d’eau, et une dizaine d’échantillons d’eau du robinet prélevés dans trois départements.
Sur les bouteilles d’eau étudiées — portant sur l’ensemble du marché –, 37 ne présentaient aucune trace des 85 molécules recherchées. Dix en revanche contenaient des résidus de médicaments et pesticides.
« La grande surprise », écrit 60 millions de consommateurs, est la présence de tamoxifène, hormone de synthèse utilisée dans le traitement du cancer du sein, dans la Mont Roucous, Saint Yorre, Salvetat, Saint Armand (Du Clos de l’abbaye) et Carrefour Discount (Céline Cristaline).
La teneur est « infime » mais c’est « suffisant pour qu’on s’interroge sur la pureté originelle imposée par la règlementation des eaux minérales », souligne le magazine, qui précise avoir procédé deux fois à l’analyse des échantillons après contestation de la part des embouteilleurs des premiers résultats et de la méthodologie employée accusée de produire de « faux positifs ».
« La seconde analyse a confirmé cette présence, sans que nous soyons en mesure d’en expliquer l’origine », écrit 60 millions de consommateurs. « L’affaire est suffisamment sérieuse pour qu’on lance des analyses à plus grande échelle », estime M. Laurenceau.
Potentiels effets cocktail
Du Buflomédil et du Naftidrofuryl, des vasodilatateurs, ont été également détectés dans l’Hepar, pour le premier, et dans la Saint Amand pour le second.
Par ailleurs, des traces d’Atrazine et d’Hydroxyatrazine, des désherbants pourtant interdits en 2001 mais très persistants, ont été trouvées dans la Vittel (Grande source), la Volvic (Clairvic), la Cora (Saint-Pierre), et la Cristaline (Louise).
« Ce qu’on en retire, ce n’est pas de dire que telle marque est plus risquée qu’une autre. Il n’y a pas les bons et les mauvais. Sur l’ensemble des marques, il y a un problème », poursuit M. Laurenceau. « Les embouteilleurs sont extrêmement prudents mais ça interpelle de voir qu’il peut y avoir (des micropolluants), même si c’est infinitésimal, qui ne devraient pas être là ».
Et l’eau du robinet ? Sur 10 prélèvements, huit contiennent une à quatre molécules sur les 85 recherchées, principalement des pesticides mais aussi des résidus de médicaments dont, à nouveau, du tamoxifène décelé notamment en milieu urbain (Rennes et Limoges).
Enfin, sur les trois bonbonnes, des traces de Diéthylphtalate ont été trouvés dans l’Obio, et de Bisphénol A, d’Atrazine et de retardateur de flamme dans la Culligan Val-de-Marne.
« Si tous les micropolluants sont ici présents en très faibles teneurs, leur variété interroge sur les potentiels effets cocktail », souligne 60 millions de consommateurs.
Le magazine et France Libertés, qui ont lancé en 2011 l’Opération transparence sur l’eau, ont publié en mars une carte de la qualité de l’eau potable en France, montrant que les seuils limites en polluants étaient dépassés dans près de 420 communes grâce à des dérogations, sans risque sanitaire immédiat.