La soif et la pollution de l’eau utilisées comme arme de guerre

La guerre d’Israël dans la bande de Gaza bafoue un des droits fondamentaux : l’accès à l’eau. Cette « instrumentalisation de l’eau » a de lourdes conséquences sur les Gazaouis, déplore l’auteur de cette tribune. William Mina intervient comme médiateur et animateur de collectifs auprès d’acteurs de l’économie sociale et solidaire. Il est aussi impliqué dans des mouvements d’écologie politique et de solidarité avec la Palestine et le Liban.

Israël utilise aujourd’hui l’assoiffement de la population gazaouie et la pollution de l’eau comme armes de guerre. En juillet 2024, Oxfam a évalué à un peu moins de 5 litres par jour et par personne la quantité d’eau moyenne accessible à Gaza, alors que 15 litres quotidiens sont considérés comme nécessaires pour survivre en situation d’urgence, selon les Nations unies.

Destructrice des populations et des écosystèmes marins, cette guerre bafoue un des droits fondamentaux humains soulignés par la déclaration du 28 juillet 2010 de l’Assemblée générale des Nations unies, le droit à l’eau.

Les Gazaouis recourent aujourd’hui aux eaux usées non traitées pour la toilette et le lavage de leurs vêtements. Et si certains fabriquent des systèmes de dessalement de fortune à partir de galets, de sable, de charbon et de coton, de plus en plus d’enfants étanchent leur soif dans des flaques d’eau contaminées par les déchets.

Une destruction intentionnelle

Cette instrumentalisation de l’eau par Israël n’est pas visible de prime abord dans les images cataclysmiques qui nous parviennent depuis les sources d’information locales. C’est tout un système qui se dégage de la répétition d’actions dénoncées par l’Organisation des Nations unies (ONU) et plusieurs ONG :

  • la destruction ou l’endommagement de plus des deux tiers des puits et des réservoirs d’eau, ainsi que d’unités de dessalement ;
  • la mise hors d’état de produire des pompes et des unités de dessalement encore fonctionnelles, via l’obstruction à la livraison de carburant, comme actuellement dans le nord de Gaza ;
  • la mise hors d’état de fonctionner de toutes les unités de traitement des eaux usées ;
  • l’interruption totale ou partielle de la livraison d’eau par la compagnie nationale israélienne Mekorot, dont les trois lignes n’ont fourni, depuis le 7 octobre 2023, que 22 % des quantités acheminées auparavant ;
  • la destruction des deux seuls laboratoires de test de qualité des eaux ;
  • la contamination des sources d’eau et du rivage méditerranéen par les eaux usées et par les métaux lourds et toxiques (phosphore blanc, amiante, etc.) issus des armes et des débris ;
  • le blocage du matériel nécessaire à la réparation des infrastructures d’eau détruites ;
  • les déplacements forcés rendant inaccessibles certaines installations encore fonctionnelles ;
  • les assassinats de professionnels en cours d’intervention sur des infrastructures ;
  • les assassinats de civils se ravitaillant en eau…

La soumission méthodique de la population de Gaza à la soif et à la pollution est l’un des actes du génocide en cours. Son caractère intentionnel a été explicitement exposé dans les déclarations de plusieurs hommes politiques israéliens, comme Giora Eiland, conseiller du ministre de la Défense, qui déclarait le 10 octobre 2023 sur la station GLZ, la radio de l’armée israélienne : « Si les pénuries d’énergie à Gaza rendaient impossible le pompage de l’eau, ce serait une bonne chose. Sinon, il nous faudra attaquer les infrastructures de traitement de l’eau pour provoquer la soif et la faim à Gaza et, je dirais, laisser présager une crise économique et humanitaire sans précédent. » [1]

Les preuves de l’application de ces déclarations ne manquent pas. Ainsi, le 26 juillet 2024, un soldat israélien du 601e Engineer Combat Battalion a posté sur Instagram une vidéo montrant la destruction préméditée d’une installation majeure de Rafah en mesure d’approvisionner en eau propre la moitié de la population de la ville.

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