Si le regard est porté aujourd’hui sur l’effet de l’usage des combustibles fossiles sur le climat et le milieu qui nous entoure, l’homme a déjà eu dans le passé, par d’autres moyens, une influence lente qui a pourtant transformé totalement la planète.
Un dossier réalisé par Daniel Hofnung, co-président de la Coordination Eau Île-de-France
L’invention de l’agriculture au néolithique, et avec elle la modification de l’utilisation du sol par la déforestation, ont transformé totalement le visage de la planète dans le passé : l’anthropocène ne date pas de notre époque industrielle, il date de milliers d’années, mais il a changé dans sa forme avec l’importance devenue centrale de l’énergie.
La place accordée aujourd’hui à celle-ci et au rôle des gaz à effet de serre nous font oublier que les transformations séculaires – celles qui ont commencé au néolithique, dans l’utilisation des sols – se développent encore maintenant, mais de manière accélérée, et avec un potentiel de destruction des milieux naturels bien plus élevé qu’aux époques précédentes, et sans doute bien plus direct que celles liées au cycle du carbone.
Qu’on en juge par ces quelques chiffres :
Déforestation par jour | 450 km2 |
Reforestation par jour | -100 km2 |
Perte en forêts | = 350 km2 |
Urbanisation quotidienne | 150 km2 |
Surface désertifiée par jour | 300 km2 |
soit : perte de végétation par jour | 800 km2 |
La déforestation, qui touche surtout les forêts tropicales (Amazonie, Paraguay, Asie du sud-est, Afrique centrale) a pour but, outre le commerce du bois, principalement de libérer des terres pour toutes les activités liées à l’élevage (pâturage, production de soja, de maïs) ou pour produire des agro-carburants, la production alimentaire végétale pour la consommation humaine étant très minoritaire. C’est essentiellement l’agro-industrie qui investi dans la déforestation, en faisant disparaître chaque année 127.000 km2 de forêts.
Une conséquence « retard » de la déforestation et de l’agriculture intensive est la désertification : ravinement des sols tropicaux peu épais, épuisement de ceux-ci et mort de la vie en leur sein (micro-organismes, lombrics…) conduisent à l’augmentation du ruissellement, à l’assèchement des sols et finalement à la désertification.
L’urbanisation, qui se poursuit à un rythme accéléré sur toute la planète, en particulier avec l’accaparement des terres achève la transformation des milieux naturels.
Si l’utilisation des énergies fossiles modifie le cycle du carbone et fait croître les gaz à effet de serre dans l’atmosphère, la modification de l’utilisation des sols a un effet plus profond : elle change le cycle de l’eau et les précipitations, elle contribue à l’assèchement des sols et à la désertification, elle diminue fortement la photosynthèse.
Le processus auquel nous assistons n’est que l’amplification de celui qui se déroule depuis le néolithique : on estime qu’au cours de l’histoire (et de la fin de la préhistoire) 50 millions de km2 de forêts ont disparu, soit un tiers des terres émergées, ou plus que la surface totale de toute l’Asie, au profit de l’agriculture, de l’élevage et de l’urbanisation.
L’accélération actuelle de ce processus ainsi que les mauvaise pratiques agricoles, qui jouent un rôle aggravant, modifient profondément le climat de la planète, avec un changement de la couverture des sols qui débouche sur la désertification.
De la même manière que la communauté internationale s’est saisie du problème des émissions de gaz à effet de serre, il faudrait faire arriver au grand jour au niveau international la question de la restauration du cycle de l’eau et de la reforestation, seul moyen de lutter efficacement contre le réchauffement de la planète, et aussi contre sa désertification. Mais si il est utile que les gouvernements s’en saisissent, nous avons vu que bon nombre des solutions sont entre les mains des peuples et non de ceux qui gouvernent.
Un avenir juste et bleu est possible c’est à nous de le construire!