A Limay (78), l’eau n’est pas une marchandise

La Communauté de Communes des Coteaux du Vexin (CCCV) a instauré le « Droit à l’eau » pour l’ensemble des usagers couverts par la régie publique intercommunale qui concerne donc les usagers de Limay et de Guitrancourt.

Avec ce dispositif, la CCCV propose un accès gratuit aux volumes d’eau nécessaires à l’hygiène et à l’alimentation pour les abonnés domestiques en instaurant une gratuité de 40 % des volumes consommés. En effet, une étude a estimé qu’à Limay, près de 40 % des consommations étaient destinées à des besoins vitaux.

Qu’est-ce que cela signifie ?

Ce droit à l’eau est rendu possible grâce à la mise en place d’une différenciation de facturation entre les catégories d’abonnés domestiques et activités.

Les abonnés dits « domestiques » vont bénéficier de 40 % de gratuité sur les volumes consommés en eau potable. Il n’est pas question d’encourager la surconsommation. Ainsi, une majoration de 20% sera appliquée sur les volumes consommés au-delà de 240 m3/an.

Les abonnés dits « activités » seront eux, soumis à une tarification progressive par tranche selon le volume consommé. Plus 20% au-delà de 240 m3, plus 40% au-delà de 1000 m3, etc.

La différenciation de facturation activités/domestiques permet un impact budgétaire nul afin de ne pas réduire nos capacités à investir sur notre patrimoine.

Ce dispositif s’applique dans les mêmes conditions à tous les usagers sans distinction de consommation ni de ressources.

Quand ce dispositif est-il entré en vigueur ?

Ce dispositif s’applique depuis 2015, ainsi les abonnés ont pu constaté cette gratuité lors de la réception de leur facture des consommations du premier semestre 2015, à partir de juin 2015. Pour les locataires des organismes HLM, cette gratuité s’appliquera généralement lors de la régularisation des charges d’eau de l’année 2015, soit à compter d’avril 2016.

Cas particulier : le logement collectif.

Pour permettre aux locataires non abonnés du service des eaux de bénéficier de ce dispositif, la CCCV met en place une réduction des volumes facturés au bailleur, qui assurera la répartition de cette réduction par unité de logement ou selon compteur individuel le cas échéant.

Cas particulier : Familles nombreuses

Les familles nombreuses sont souvent consommatrices de beaucoup  d’eau et sont souvent pénalisées par les tarifications progressives en fonction du volume consommé, habituellement mis en place par d’autres collectivités. Le choix qui a été fait d’appliquer une gratuité sur un pourcentage important (40%) de la consommation totale permet d’éviter cette injustice.

Que ce soit pour les domestiques ou les activités, le dispositif est mis en place de façon progressive. Il n’est effectif que sur la part de l’eau, l’abonnement fixé pour l’année 2014 à 17 € par an, ainsi que la part de l’assainissement restent inchangés.

Exemple concret (si nécessaire) :

Pour une facture d’environ 120 m3 par an, l’usager payait 134 € 22 TTC d’eau sans compter la part assainissement et l’abonnement.

À la mise en place du dispositif avec les factures du premier semestre 2015 (transmis aux usagers à compter de juin 2015), une réduction de 40% de ses volumes facturés, soit 80 € 53 TTC est appliquée.

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– Quatre questions à Djamel Nedjar, adjoint au Maire, et Vice-président de la CCCV en charge de l’Eau et de l’Assainissement:

Quelle est l’origine de ce projet et quels en sont les objectifs ?

Depuis des années, la ville de Limay puis la CCCV ont toujours fait de l’Eau un enjeu majeur de leurs politiques publiques. Nous avions déjà fait la démonstration que la gestion des services des eaux en régie publique nous permettait d’avoir un prix de l’Eau parmi les plus bas d’Ile de France tout en assurant un très bon niveau d’entretien de notre patrimoine.

Malgré notre volontarisme politique sur cette question, nous nous sommes aperçu que notre tarification ne permettait pas pour les familles les plus modestes, et qui sont les plus touchées par la crise de répondre favorablement à la recommandation de l’Organisation Mondiale de la Santé qui préconise que les dépenses en eau ne doivent pas dépasser 3 % des revenus. De plus, nous considérons que dans une société où tout se vend et où tout s’achète l’Eau était un bien vital et ne devait pas rentrer dans une logique marchande. De ce fait, nous avons estimé les besoins vitaux en Eau des foyers et nous nous sommes aperçu que 40 % des consommations en eau potable était liées à des besoins primaires (alimentation, hygiène…) et c’est pour cette raison que nous avons fixé à 40 % le pourcentage de gratuité de la redevance Eau Potable.

De ce fait cette nouvelle tarification nous permet de répondre au critère de l’OMS, et nous espérons ainsi faire un exemple pour inciter les autres collectivités à en faire autant, car ils sont aujourd’hui très loin de respecter ce critère.

Attention, ce pourcentage de gratuité s’applique uniquement sur la redevance Eau potable et non sur la totalité du prix de l’eau car ce dispositif ne s’applique pas sur la redevance assainissement et les taxes qui représentent les 2/3 du prix de l’eau.

Cette mesure a-t-elle un coût pour les finances intercommunales ou communales ?

Absolument pas, le principe retenu est la neutralité budgétaire du dispositif. Pour compenser la baisse des recettes liée à la gratuité pour les abonnées domestiques, nous avons souhaité faire payer davantage les abonnés industriels. Nous avons considéré qu’il n’était pas normal que les grosses entreprises, grandes consommatrices d’eau, payent le même prix que les ménages alors que l’eau constitue pour eux une matière première importante leur permettant ensuite de la valoriser à travers les biens et services produits, ensuite revendus.

Bien entendu, nous avons vérifié que l’impact de cette augmentation pour celles-ci était très faible au vu de leur chiffre d’affaire, et de plus le prix de l’eau appliqué aux industriels sera équivalent à la moyenne des prix pratiqués en Ile de France par les autres collectivités.

La neutralité budgétaire du dispositif était pour nous une nécessité afin de maintenir notre même capacité à entretenir notre réseau, car il n’y a pas que le prix de l’eau qui est important, il y a aussi l’efficacité du service et le bon niveau entretien de notre patrimoine.

Ce dispositif prend-t-il en compte les cas particuliers comme les résidents en logement collectif et les familles nombreuses, grande consommatrice d’eau ?

C’est qu’il faut retenir c’est que ce dispositif s’applique à tous sans condition de ressources et s’applique de la même manière !!!

Seulement, le choix d’agir sur un pourcentage de gratuité nous permet de répondre plus efficacement à certaines catégories d’usagers (familles nombreuses) qui sont souvent pénalisés par les autres types de « tarification sociale » mis en place par d’autres collectivités avec des paliers de consommations ou « plus vous consommez et plus vous payez cher ».

Nous avons aussi travaillé avec les bailleurs sociaux avec la signature d’une charte d’engagements réciproques afin que les organismes HLM puissent répercuter cette gratuité au niveau de leur locataire. Nous serons particulièrement vigilants au respect de celle-ci et les locataires devront nous signaler tout manquement à cette charte.

Que se passe-t-il avec la nouvelle intercommunalité de 400 000 habitants (de Conflans Sainte Honorine à Mantes la Jolie) à compter du 01 janvier 2016 ?

C’est  une vraie question, et nous ne connaissons pas à ce jour les compétences précises qui seront reprises par cette supra intercommunalité, qui nous est imposée par la loi. Nous nous battrons pour qu’elle ait le moins d’impact possible sur notre modèle de gestion publique qui a tant montré son efficacité, notamment en matière d’eau et d’assainissement

C’est pour cette raison que nous avons accéléré la mise en œuvre du dispositif du Droit à l’Eau tant que ces questions étaient encore gérées en proximité.

Nous espérons que ce dispositif unique en France par son ampleur et son impact puissent faire exemple auprès d’autres collectivités. Je dois bien avouer que nous sommes fiers et ravis de faire en sorte que Limay, constitue un territoire d’audace et d’innovation sociale et environnementale au service de ses habitants, et cette nouvelle tarification l’incarne parfaitement.