Archives de catégorie : Batailles pour une gestion publique

Gestion publique de l’eau : Henri Emmanuelli remporte la bataille

Selon la cour administrative d’appel, le Conseil général « défend l’usager » en subventionnant les communes qui optent pour une gestion publique de l’eau.

Gestion publique de l'eau : Emmanuelli remporte la batailleUne victoire pour Henri Emmanuelli.

Le vent est en train de tourner dans les Landes. Après plus de vingt ans de guérilla juridique, le Conseil général, sous la houlette de son président, Henri Emmanuelli, vient sans doute de remporter la dernière manche. Dans un arrêt rendu le 3 mars, la cour administrative d’appel de Bordeaux a validé la stratégie développée par la collectivité. Au grand dam des opérateurs privés, le Département aide financièrement les communes rurales qui optent pour une gestion publique de l’eau et met à leur disposition le savoir-faire du Sydec, un syndicat départemental aux compétences techniques étoffées.Aucun principe bafouéAu fil des ans, les modalités d’intervention du Conseil général ont évolué, mais l’objectif est resté le même : abaisser le montant des factures. En novembre 2008, deux délibérations votées par l’assemblée départementale étaient inspirées par ce souci. Fidèle à son habitude, la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau les avait attaquées en justice en invoquant leur caractère discriminatoire.

Si le tribunal administratif de Pau lui avait donné en partie gain de cause, la cour d’appel de Bordeaux l’a déboutée après avoir estimé qu’aucun des grands principes invoqués n’avait été bafoué. Qu’il s’agisse de la liberté des usagers devant un service public ou de la libre administration des collectivités locales. Selon les juges, ces deux délibérations répondent à l’intérêt général dans la mesure où elles visent à faire bénéficier les utilisateurs de tarifs moins élevés.

Les majors de l’eau n’ont pas été en mesure de contester l’étude réalisée à la fin de 2003 par la Direction départementale de l’agriculture et de la forêt des Landes. Celle-ci montrait que le prix de l’eau était beaucoup plus élevé lorsque le service était affermé à un privé. « La différence des prestations accomplies par les régies et par les fermiers n’est pas de nature à priver de signification la comparaison entre les tarifs pratiqués », soulignent d’ailleurs les magistrats de la cour administrative.

Le privé recule

En 2006, un sénateur UMP du Massif central, vraisemblablement sous influence, avait subrepticement glissé un amendement lors du vote de la loi sur l’eau. Cette disposition interdisait aux collectivités compétentes en la matière de faire varier leurs aides en fonction du mode de gestion retenu, public ou privé. On aurait voulu faire capoter l’expérience landaise qu’on ne s’y serait pas pris autrement.

En 2011, le Conseil constitutionnel a estimé que cet article était inconstitutionnel au motif qu’il portait atteinte à la libre administration des collectivités territoriales. Sans l’intervention des Sages, saisis dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, il est probable que la cour administrative d’appel n’aurait pas donné raison au département des Landes, même si ce dernier a pris le soin de limiter les subventions allouées. Représentant entre 15 et 25 % des travaux et des études, elles sont en outre plafonnées et ne peuvent être affectées au financement de tous les investissements. Aux opérateurs privés qui les contestent, la cour administrative d’appel répond aujourd’hui que rien ne leur interdit d’en faire autant !

Après avoir longtemps fait la pluie et le beau temps, les multinationales de l’eau ne cessent désormais de reculer. Des villes aussi emblématiques que Paris ou Bordeaux ont opté pour le retour en régie. Ailleurs, la Lyonnaise, la Saur et Veolia concèdent des ristournes inimaginables il y a quelques années encore. À l’échelon national, où le privé gère près de 70 % de la distribution d’eau, le retrait n’est pas aussi spectaculaire que dans les Landes, où la proportion a été inversée. Mais les majors craignent manifestement que l’expérience initiée entre Adour et Leyre ne fasse tache… d’huile !

Source: Sud Ouest du 5 mars 2014

SEPG, la contestation monte à l’approche des municipales

Le Syndicat des eaux de la presqu’île de Gennevilliers (SEPG) a reconduit la délégation de service public comme mode de gestion de l’eau en mai 2013, alors que le contrat actuel ne se termine qu’en juin 2015 –lire le rappel des faits ici. Une tentative de court-circuiter tout débat citoyen à ce sujet au moment des élections municipales. Peine perdue! La Coordination Eau Île-de-France, Naturellement Nanterre et ATTAC 92, ainsi que des citoyens de cinq communes, ont déposé un recours au Tribunal administratif  de Cergy-Pontoise, qui a des chances de l’emporter tant les conditions de déroulement de la séance semblent exotiques au regard de la loi!

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Est ensemble: un voeu pour 2014

Le  « groupe de réflexion » sur la gestion de l’eau mis en place par la Communauté d’agglomération Est Ensemble s’est réuni pour la première fois, jeudi 19 décembre, à 14h30, un horaire peu favorable à la participation citoyenne et associative. Plus étonnant, mis à part le Président de la CAEE et l’incontournable vice-président chargé de l’eau, les élus, en particulier ceux qui se sont prononcés en faveur de l’adhésion au SEDIF en 2010, n’étaient pas au rendez-vous non plus, ce qui donne rétrospectivement à leur vote  le sens d’un refus d’assumer la responsabilité politique de la gestion de l’eau. Les élus communautaires présents à la réunion appartenaient aux groupes qui se sont prononcés en faveur de la gestion publique (Ecologie et citoyenneté, une partie des communistes, gauche alternative).

L’essentiel de la réunion a été consacré à une longue présentation du nouvel audit (voir ici)

Anne Le Strat, adjointe au maire de Paris, chargée de l’eau, de l’assainissement et des canaux, et présidente d’Eau de Paris, a souligné qu’à Paris également, les études économiques réalisées avant le passage en régie ne montraient pas de différence sensible entre la régie et la DSP; mais dès la première année du retour en régie, c’est 40 millions d’euros qui ont été économisés! Et plus généralement, a-t-elle poursuivi, si les études constituaient une aide à la décision tout à fait indispensable, elles ne pouvaient se substituer à la décision politique des élus.

 Gérard Cosme, président de la CAEE, a indiqué que la gestion publique lui semblait possible mais que le choix technique était complexe… Et qu’il fallait que le groupe de travail s’intéresse maintenant à …autre chose! A savoir l’assainissement qui constitue une autre part importante de la facture. Les interrogations, réelles et partagées, autour des conséquences de la mise en place de la métropole dans les prochaines années, ont été une autre façon de botter en touche par rapport à la décision politique à prendre dès maintenant concernant la gestion de l’eau.

Concernant la question de la durée très réduite des amortissements (douze ans) pour des travaux de modification du réseau, touchant au patrimoine public, le bureau d’études a apporté deux réponses. Le remboursement des emprunts prévu sur douze ans serait calqué sur ce qui s’est fait à Paris avec le retour en régie: or à Paris, il n’y a pas eu besoin de modifier profondément le réseau pour retourner en régie, comme c’est le cas à Est Ensemble. Ensuite, les douze ans seraient une moyenne et, à la lecture du rapport intégral de l’étude, on s’apercevrait de différentes durées d’amortissements suivant les travaux à réaliser. Nous attendons donc maintenant la publication intégrale de l’étude réalisée que, ni les associations, ni les élus n’ont eu entre les mains jusqu’à présent.

A entendre le bureau d’études et les dirigeants de la CAEE, rien ne serait possible avant 2023 et la fin du contrat SEDIF Veolia. Une vision que nous réfutons formellement. De plus cette argumentation est en contradiction totale avec l’explication donnée au vote d’adhésion au SEDIF en 2010: selon la majorité socialiste, il s’agissait à l’époque d’un transfert provisoire au SEDIF, le temps de mener à bien les études: une tromperie manifeste!

Nous ne pouvons que souhaiter que la décision politique de la gestion publique soit prise en 2014. Et nous pouvons y contribuer en mettant cette question en débat dans chaque ville de l’agglo dans la préparation des municipales.

La Coordination Eau Île-de-France représentée au CA de la régie publique « Eau des lacs de l’Essonne »

La transformation juridique de la régie publique « eau des lacs de l’Essonne  » en une régie dotée d’autonomie financière et personnalité morale s’accompagne de la transformation de son conseil d’exploitation  en un conseil d’administration  de 18 membres parmi lesquels 8 représentants des usagers disposant d’une voix délibérative ( les 2 délégués des salariés de la régie y siègent quant à eux à titre consultatif ).
Dans un domaine où la place et la parole des usagers sont le plus souvent refusées, étouffées ou, au mieux, réduits à un rôle de figuration, cette décision mérite d’être saluée.

Parmi les représentants des usagers, nommés pour 6 ans, Pascal Grandjeat a été désigné au titre de la coordination Eau Île-de-France. La présence,  parmi les représentants associatifs, d’usagers des communautés d’agglomération  voisines d’Evry Centre-Essonne (passée en régie pour la distribution de l’eau au premier janvier 2013) et du Val d’Orge (dont les usagers revendiquent le retour en régie en 2015 et 2017), témoigne de la volonté des dirigeants de l’Agglo des Lacs de l’Essonne d’un partenariat renforcé entre communautés voisines, pour se donner ensemble les moyens d’une réappropriation publique de la production de l’eau, alors que la Lyonnaise des eaux en détenait le monopole depuis des décennies pour 80% de la population du département.

Lire la délibération adoptée par le Conseil d’agglo le 5 décembre 2013

Est Ensemble: assez tergiversé, la régie maintenant !

La Communauté d’agglomération Est Ensemble (CAEE) vient de publier les résultats d’un nouvel audit sur la gestion de l’eau. Plusieurs scénarios sont étudiés, d’un approvisionnement 100% SEDIF à un approvisionnement 100% Eau de Paris, en passant par des solutions intermédiaires. Les tarifs de l’eau (valeur 2024) pour les usagers se tiennent dans un mouchoir de poche (lire page 30): 14 centimes d’euros d’écart pour des prix compris entre 1,95 € et 2,07 €/m3. La prolongation des tarifs actuels du SEDIF) se situe dans la même fourchette. Un écart d’autant plus négligeable que l’incertitude sur les résultats est près de deux fois supérieure !

Beaucoup de temps (trois ans) et d’argent (des dizaines de milliers d’euros) ont été dépensés par la Communauté d’agglomération Est Ensemble (CAEE) pour en arriver à cette évidence : le tarif ne permet pas de trancher le choix entre régie publique et délégation au privé. C’est un choix politique qu’il faut faire en faveur de la gestion publique et qui n’a toujours pas été fait par la majorité socialiste d’Est Ensemble. Quelle est la volonté politique de la CAEE et de son président ?

On peut cependant constater un progrès notable : il y a trois ans, une étude grossière affirmait que la gestion publique était hors de prix. La nouvelle étude réalisée montre que la régie est un peu plus compétitive que la délégation de service public. En réalité, l’écart en faveur de la régie est beaucoup plus important.

En effet, la durée des amortissements (lire p 31) choisie dans l’étude est de douze ans. Outre le fait qu’elle renvoie à la date de fin du contrat SEDIF VEOLIA, dont nous n’avons rien à faire, elle implique des tarifs élevés  pour les prochaines années qui flirtent avec les tarifs actuels du SEDIF. Or il s’agit d’une opération patrimoniale. Pourquoi ne pas prévoir des amortissements sur 24 ans ou sur 48 ans, si ce n’est pour augmenter artificiellement l’estimation des tarifs en régie publique?

La durée de la mise en place du service public de l’eau est fortement exagérée. Il est fait référence (p25) à la fin du contrat SEDIF Veolia en …2023 ! Or il n’y a aucune raison d’attendre la fin de ce contrat. La délibération d’adhésion de la CAEE au SEDIF a été cassée par le tribunal administratif. Il reste l’arrêté préfectoral qui  a reconnu l’adhésion avant qu’elle ne soit cassée par le TA. Mais celui-ci peut être dénoncé par la CAEE, puisqu’il n’a plus de base légale. Il suffit de le demander au préfet. Il faut donc établir un vrai calendrier qui ne soit plus déterminé par la date de fin du contrat mais par la durée réelle des travaux. Nous exigeons aussi la publication du rapport intégral de l’audit et pas seulement sa présentation : au prix de l’étude, c’est le moins que l’on puisse demander !

Assez tergiversé ! Nous exigeons que la CAEE créée maintenant sa régie publique, mette en place un comité des usagers, ouvre des négociations avec le personnel, etc. Vous trouverez toutes nos propositions en ligne ici.

Le 19 décembre 2013

Voir la présentation de l’audit