Eau et territoires

Issu de la thèse d’Elias Ganivet, cet ouvrage aborde la question des prélèvements et des usages de l’eau, des modifications de la couverture des sols, de l’aménagement des cours d’eau et du changement climatique. Un certain nombre de leviers d’actions permettant de renforcer la résilience des territoires face aux crises actuelles et à venir sont proposés (solutions sociales, fondées sur la nature ou techniques). Eau et territoires favorise le dialogue entre usagers et le partage de connaissances locales sur l’eau. Extraits de l’introduction et lien pour le commander.

Eau et territoires - Elias Ganivet - Éditions Quae

Nous vivons une époque où l’ampleur des bouleversements environnementaux impose à l’ensemble des territoires (faisant ici référence à une échelle locale) de faire face à de nouvelles responsabilités écologiques. Le changement climatique, en particulier, est une des pressions au centre de l’attention politique et médiatique depuis ces dernières années. Ses conséquences, et notamment l’accentuation (en intensité et en fréquence) d’évènements extrêmes liés à l’eau, ont particulièrement mis en lumière la grande vulnérabilité des territoires. À titre d’exemple, en France métropolitaine, la sécheresse de 2022 a eu de lourds impacts sur l’alimentation en eau potable (ruptures d’approvisionnement1,2), l’agriculture (pertes de rendement) (Insee, 2023) et les écosystèmes (assèchement des rivières et perte de biodiversité).

Pourtant, cet épisode considéré comme extrême pourrait être un épisode moyen d’ici à 2050 (Météo- France, 2022). À l’opposé, de nombreuses régions françaises se sont ensuite retrouvées confrontées à des phénomènes d’inondations catastrophiques en 2023, 2024 et 2025. De fait, il apparaît de plus en plus évident que le nouveau contexte hydroclimatique qui se met en place pourrait causer des impacts irréversibles, en poussant les activités humaines et les écosystèmes au-delà de leur limite d’adaptation (Arambourou et al., 2025). Cette évolution questionne ainsi dès aujourd’hui les règles de gestion et de partage de l’eau (Salles, 2022 ; Bouarfa et al., 2025) — l’approche actuelle s’appuyant sur des hypothèses de stabilité et d’abondance fortement compromises (Milly, 2008). En changeant de contexte (accentuation des périodes avec soit trop d’eau, soit pas assez d’eau), c’est le référentiel même de cette gestion quantitative qui est questionné. Le défi est donc vertigineux : il faut définir dès aujourd’hui des trajectoires plus résilientes (The Shift Project, 2022) — c’est-à-dire identifier des leviers locaux d’adaptation, afin de rendre les territoires plus robustes face aux changements (Hamant, 2023).

Cependant, s’il existe une certaine prise de conscience des bouleversements en cours, nos sociétés ont généralement tendance à considérer de manières indépendantes les unes des autres les questions que ces bouleversements posent. Par exemple, de nombreux discours politiques et médiatiques tendent à envisager ces pressions sous l’angle exclusivement climatique, réduisant par là même pour l’essentiel les activités humaines à des flux de gaz à effet de serre. Ce prisme conduit ainsi à une singularisation et une hiérarchisation des enjeux, excluant de fait d’autres enjeux environnementaux. Cela questionne les politiques d’adaptation à apporter, dans la mesure où le changement climatique ne représente qu’une pression additionnelle (bien que significative) sur des territoires déjà fortement impactés par l’ensemble des autres pressions d’origine anthropique (incluant, par exemple, les usages de l’eau, l’urbanisation, les pratiques agricoles…). Ce constat invite par conséquent à prendre du recul et changer de perspective, pour intégrer une vision d’ensemble des pressions climatiques et anthropiques affectant les territoires — c’est-à-dire adopter une approche plus systémique et transversale. Alors que la gestion de l’eau occupe une place croissante dans les débats publics, cet ouvrage propose de recentrer les enjeux hydriques et environnementaux à l’échelle locale, en France continentale. S’appuyant sur une synthèse de connaissances, il invite à adopter une vision à la fois territorialisée et transversale, en mobilisant les aspects biophysiques et sociaux associés à l’eau, c’est-à-dire le fonctionnement naturel du cycle de l’eau (stocks, flux…), les impacts des activités humaines et leurs causes incluant les questions de gouvernance, de réglementation, de mode de vie…

Une telle approche transversale semble ainsi indispensable pour dépasser une conception de toutes les pressions affectant les ressources en eau comme des sujets indépendants, pouvant se résoudre par des approches réductionnistes et appelant une réponse unique (généralement technique), au risque de maladaptations (c’est-à-dire que le remède pérennise, voire aggrave, le risque qu’il est supposé résoudre) (Bertana et al., 2022). Si l’absence de transversalité pouvait ne pas poser de problème majeur dans un contexte d’abondance, cela semble en revanche relativement inadapté au nouveau contexte hydroclimatique — imposant de fait une transversalité sous contrainte. Ce manque de cohérence dans les politiques publiques était d’ailleurs également souligné par un rapport de la Cour des comptes datant de mars 2023 et qui relevait « une organisation inadaptée aux enjeux de la gestion quantitative de l’eau ».

(…)

Adopter une approche plus systémique et transversale à l’échelle locale vise également à redonner aux acteurs locaux une capacité à agir en faveur de l’adaptation de leur territoire, là où la thématique du changement climatique seule (appelant une approche mondiale) peut parfois générer un sentiment d’impuissance sur place. En effet, de nombreux leviers d’action locaux (touchant à l’ensemble des autres pressions anthropiques mentionnées précédemment, telles qu’usages de l’eau, urbanisation, pratiques agricoles, modes de vie, attractivité du territoire…) existent dans le but de rendre les territoires plus résilients.

Dans ce cadre, cet ouvrage propose une synthèse (et un approfondissement) de la thèse de doctorat dont ce travail est issu, afin de rendre plus facilement accessibles ces connaissances au plus grand nombre. Il s’adresse aux décideurs et, plus généralement, à toute personne souhaitant mieux comprendre les enjeux (quantitatifs) de l’eau à l’échelle de son territoire (en France métropolitaine). De fait, cette synthèse de connaissances offre une vision relativement systémique (ou transversale), en mobilisant à la fois les aspects biophysiques et sociaux associés à l’eau :
– le fonctionnement naturel du cycle de l’eau (bassin versant, stocks, flux…) ;
– les impacts des activités humaines (prélèvements et usages de l’eau, changements de couverture des sols…) et leurs conséquences physiques sur le cycle de l’eau ;
– leurs conséquences sociales ;
– et enfin les potentiels leviers d’action locaux pouvant être mobilisés afin de rendre les territoires plus résilients (solutions sociales, fondées sur la nature, et techniques).

1. https://www.ouest-france.fr/bretagne/botmeur-29690/secheresse-ce-village-du-finistere-commande-descamions- citernes-en-urgence-pour-ne-pas-etre-a-sec-86f5df82-18ba-11ed-9419-c6323ddb2580 (consulté le 18/08/2025).

2. https://www.ledauphine.com/environnement/2022/07/21/haute-savoie-les-sources-a-sec-les-habitantsravitailles- en-eau-potable-a-sappey-et-vovray-en-bornes (consulté le 18/08/2025).

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(26€ en version papier, gratuit en version électronique)

 

2 réflexions sur « Eau et territoires »

  1. Effectivement cet ouvrage se concentre sur les enjeux quantitatifs jusqu’à présent peu pris en compte dans de nombreux territoires. Mais l’auteur a prévu de développer par la suite les enjeux qualitatifs qui sont tout à fait importants.
    Les élections municipales sont une bonne occasion de mettre tous ces sujets dans le débat public…

  2. L’importance donnée au changement climatique permet de proposer des solutions High-tech subventionnées pour diminuer artificiellement les émissions CO2 (bon, je caricature sévère, d’accord, mais pas que…)
    Et il est évident qu’une approche que j’appellerai globale, plus que transversale, est absolument nécessaire. Par rapport à la description de l’article, il faudrait rajouter l’aspect pollution qui impacte la qualité de l’eau et ses conséquences, en particulier sur la santé publique.
    La territorialité est la bonne approche, mais, hélas, les décideurs des territoires, surtout (?) en zone rurale, sont souvent loin de partager le point de vue défendu ici, et s’alignent sur les positions des principales organisations agricoles ou patronales…
    NB : il y a bientôt des élections …

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