Le SEDIF a un plan

Toujours plus gros, toujours plus fort, le syndicat des eaux d’Ile-de-France (SEDIF),  annonce un plan d’investissement de plus d’un milliard d’euros sur 2016-2020… Mais à regarder de près, il n’y a rien de mirobolant ! Décryptage.

Au-delà de l’effet d’annonce destiné à justifier une fois de plus l’existence du mammouth préféré de Veolia, on ne trouve rien d’exceptionnel dans le plan du SEDIF. Tout est toujours très gros au SEDIF, c’est une question d’échelle. Le précédent plan d’investissement était déjà de plus de 800 millions d’euros. La différence est liée pour l’essentiel à la mise en place du Grand Paris. En effet,  103 millions d’euros sont destinés  à des travaux de déplacement des tuyaux pour le réseau de transport, le Grand Paris Express. 60 millions d’euros sont destinés à la création d’une station de pompage sur le plateau de Saclay, nouvelle expansion urbaine prévue dans le cadre du Grand Paris. (Si vous ne saviez pas qui finance  la mise en place du Grand Paris, vous le savez maintenant: c’est les usagers de l’eau!) Cette progression des investissements est donc la conséquence d’une contrainte extérieure qui pèse sur le SEDIF, plutôt qu’un signe de dynamisme du syndicat.

Un renouvellement des canalisations a minima

Un des axes majeurs du plan serait, selon le SEDIF, le renouvellement des canalisations.; le SEDIF prévoit de renouveler 88 Km de canalisations par an, ce qui représente en réalité à peine 1% du réseau.  Chaque tuyau sera donc renouvelé au bout de … cent ans. Or la durée moyenne de vie d’une canalisation est de 75 ans. Cherchez l’erreur! Ce n’est donc pas demain que le SEDIF va réduire son taux de fuite.

Derrière la mutualisation, quels choix?

Le SEDIF se prononce à corps et à cris pour la mutualisation de la production de l’eau à l’échelle de la région parisienne mais ne donne pas l’exemple jusqu’à présent. En effet, il maintient une capacité de production qui est plus du double de la consommation réelle des habitants. A tel point que Les Échos parlent de « surcapacités de production » qui ne sont pas pour rien dans la dérive tarifaire de l’eau au SEDIF. Eau de Paris a aussi une capacité de production plus élevée  que la consommation des habitants mais a procédé à la fermeture de l’usine d’Ivry-sur-Seine, il y a quelques années. Une attitude responsable que l’on ne retrouve pas au SEDIF.  Mutualiser la production, c’est réduire la production d’eau très excédentaire à l’échelle de la région parisienne. Comment effectuer le choix des usines à fermer? Du point de vue de la qualité de l’eau et de la santé des consommateurs, il vaut mieux privilégier les eaux souterraines, de meilleure qualité que les eaux de surface. Paris a un approvisionnement constitué à moitié par des eaux souterraines et à moitié par des eaux de surface. L’approvisionnement du  SEDIF est constitué exclusivement par des eaux de surface. Le choix à effectuer est clair: c’est du côté du SEDIF qu’il faut réduire la production, tant pis pour Veolia!

Et le tarif?
 Le SEDIF prend l’engagement de ne pas augmenter sa part dans le tarif de l’eau ces prochaines années. Ce serait louable si le même engagement était pris pour la part du délégataire. En effet, au début du contrat actuel (janvier 2011), le tarif de l’eau était de 1,41€/m3. Il est actuellement de 1,48€/m3. La part du SEDIF n’a pas varié, elle est restée à 0,45€/m3. C’est donc la part du délégataire, Veolia qui a augmenté et la facture des usagers a augmenté en conséquence. Une fois encore,  c’est les intérêts de Veolia qui ont été favorisés par le SEDIF.  Et  les nouveaux engagements du SEDIF n’apportent toujours pas de garantie sur l’évolution de la facture des usagers.
A Paris, le tarif de l’eau est actuellement de 1,07€/m3, celui du SEDIF est donc 38% plus cher, ce qui n’est pas rien pour un produit de consommation courante, aussi encadré que l’eau.
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