Une enquête judiciaire vise la famille du créateur de l’eau Cristaline. Révélations, des Antilles au Luxembourg, par Laurent Léger, dans L’Express, le 13 juin.
On se souvient de ce monsieur âgé se mettant en scène à la télévision, assurant au public que son eau était gazeuse grâce à ses bulles na-tu-relles ! Pendant des années, le milliardaire Pierre Papillaud a payé de sa personne pour vanter les bienfaits de la marque Rozana qu’il détenait , aux côtés de Cristaline, Chateldon ou Vichy Célestins. Patron d’un empire – n° 3 de l’eau en bouteille derrière Nestlé et Danone -, il était connu pour son accent chantant, son franc-parler, ses coups de gueule, ses méthodes de management décriées – au point qu’un cadre qui avait tenté de se suicider avait porté plainte contre lui et, surtout, avait réussi à déclencher contre lui une information judiciaire pour harcèlement moral…
Mais l’industriel, décédé en juin 2017, était moins connu pour sa manie de mettre son bas de laine – ou plutôt son énorme magot – à l’abri des regards du fisc. Hélas pour lui, les « Panama Papers » ont révélé en 2016 qu’il recourait aux services du fameux cabinet panaméen Mossack Fonseca, la société qui se chargeait de créer des montages offshore pour des centaines de milliers de clients. Pierre Papillaud détenait notamment dans un sympathique confetti des Antilles, les îles Vierges britanniques, une société, Krewitt, dans laquelle dormaient quelque 400 000 euros. Cela n’a pas manqué : une enquête préliminaire a été ouverte par le Parquet national financier (PNF). Et les enquêteurs ont vite découvert que, en réalité, ce n’est pas au soleil des Caraïbes que la fortune avait été déménagée, mais au Luxembourg : une holding familiale, Rox Invest, y sert de réceptacle à une grosse partie de ses économies, notamment les dividendes versés chaque année par son groupe. Selon une ordonnance judiciaire, le montant éludé de l’ISF par l’empereur de l’eau minérale entre 2009 et 2014 serait de 7,6 millions d’euros.