Du glyphosate, un herbicide toxique, est présent dans les rivières européennes. En cause : l’agriculture… et nos lessives. C’est l’hypothèse, sérieuse, de chercheurs allemands. Par Vincent Lucchese.
La forte contamination en glyphosate des rivières européennes provient-elle, en partie, de nos lessives ? C’est l’hypothèse surprenante avancée par des chercheurs allemands de l’université de Tübingen, dans une étude publiée fin juillet par la revue Water Research. Ce sont plus précisément les aminophosphonates qui sont suspectés : cette substance, utilisée dans les détergents des lessives et produits de nettoyage, ainsi que dans certains traitements des eaux industrielles, pourrait se dégrader en glyphosate. Relâché avec les eaux usées de nos villes, celui-ci polluerait alors massivement nos cours d’eau.
Pour étayer leur hypothèse, les scientifiques avancent d’abord une série d’arguments qui prouvent, selon eux, que l’usage agricole du célèbre herbicide ne peut pas être la seule source de pollution de nos rivières. D’abord, parce qu’on mesure du glyphosate en concentration aussi forte dans les eaux européennes que dans les eaux étasuniennes. Alors même que les États-Unis en épandent beaucoup plus dans leurs champs : 138 kg/km² contre 26 kg/km² en Europe.
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Des effets catastrophiques sur les sols et leurs habitants
La variété des arguments apportés par l’équipe allemande, validés par leurs pairs, plaide tout de même pour un approfondissement des recherches et la prise très au sérieux des effets potentiellement délétères de ces aminophosphonates omniprésents dans les détergents européens.
Tout en veillant à ce qu’un danger n’en efface pas un autre. « Dire que le glyphosate dans nos rivières ne proviendrait que des eaux urbaines et qu’il peut être utilisé sans problème dans les champs serait un raccourci terrible », avertit Céline Pelosi, directrice de recherche à l’Inrae, écologue et écotoxicologue des sols. Spécialiste des vers de terre, elle rappelle les effets catastrophiques pour les sols et leurs habitats de l’herbicide : « Même s’il n’allait pas dans l’eau, le glyphosate resterait un problème. » Dans les lessives ou dans les champs, l’urgence reste la même : réduire la pollution au glyphosate.