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PAS de coupures en hiver ni pour l’eau, ni pour l’électricité

Henri Smets, Président de l’Association pour le développement de l’économie et du droit de l’environnement montre que l’amendement Cambon, non seulement revient sur la loi Brottes, mais supprime la trêve hivernale.

« Lorsqu’une famille n’a pas pu payer son loyer, elle n’est jamais expulsée de son logement pendant l’hiver (la fameuse « trêve » hivernale) quelles que soient les circonstances. Le bailleur ne peut pas couper le chauffage pour faire partir cette famille en détresse, ni rendre inutilisables sa salle de bain et ses toilettes en coupant l’alimentation en eau. Si la loi n’autorise pas le bailleur à couper l’eau pour des loyers impayés, il devrait en être de même pour le distributeur d’eau ayant une facture impayée.

Effectivement, depuis la loi Brottes (2013), les fournisseurs d’eau, d’électricité et de  gaz ne sont plus autorisés à interrompre leurs fournitures en hiver même s’il y a des impayés et cela quels que soient les revenus des ménages.  L’objectif est que le logement doit rester salubre tant qu’il est occupé. L’absence de coupures en hiver a été mise en œuvre avec succès en 2013 pour l’électricité et le gaz et n’a pas été accompagnée des effets pervers annoncés. Le printemps venu, les coupures ont repris.

Dans le cas de l’eau, les distributeurs ont refusé d’appliquer la loi Brottes et ont coupé l’eau des ménages comme si cette loi n’existait pas . Selon la même logique, une proposition de loi vient d’être présentée au Sénat pour officialiser la pratique des coupures d’eau en hiver.

Si cette disposition législative était adoptée, les locataires disposeront toujours de leur logement mais il aura été rendu insalubre  par le distributeur et constituera même un risque d’incendie pour les voisins . L’hygiène des enfants ne sera plus assurée et si la protection de l’enfance en est informée, elle pourra venir chercher les enfants pour les mettre en foyer.

Mettre fin à la trêve hivernale pour l’eau alors qu’elle existe pour l’électricité et le gaz serait une régression sociale injustifiée. Une meilleure solution a été avancée par le député Brottes qui propose de suspendre les coupures d’eau pendant l’hiver dans les mêmes conditions que pour l’électricité et le gaz. Le printemps venu, les usagers qui peuvent payer leurs factures d’eau ou d’électricité mais refusent de le faire, seront coupés s’ils n’ont pas de bonnes raisons à faire valoir tandis que les autres usagers probablement très démunis recevront l’eau nécessaire à leurs besoins essentiels. Cette solution est en retrait sur la loi Brottes mais permettra d’éviter les situations dramatiques de coupure d’eau que les tribunaux ont condamné. L’eau, source de vie, doit continuer à bénéficier de la trêve hivernale. »

Pour les Nations Unies, couper l’eau en cas d’impayés est une violation des droits de l’homme

En juin 2014, les experts des Nations Unies pour l’eau et l’assainissement, pour le logement et pour la pauvreté extrême ont exprimé leur préoccupation concernant les coupures d’eau pour impayés, pratiquées sur une grande échelle à Détroit aux Etats-Unis dans une ville touchée par le chômage et la pauvreté. Ils ont officiellement déclaré que « les coupures d’eau pour impayés causés par un manque de ressources constituent une violation du droit de l’homme à l’eau et d’autres droits de l’homme ».

Selon Catarina de Albuquerque, l’Experte des Nations Unies pour l’eau et l’assainissement, « de telles coupures ne sont tolérables que si l’usager est en mesure de payer l’eau mais ne la paye pas. Dès lors qu’il a une réelle impossibilité de payer l’eau, les droits de l’homme interdisent toute coupure d’eau ». Selon les experts des Nations Unies, si une coupure injustifiée a eu lieu, l’alimentation en eau doit être rétablie sans délai.

Les coupures d’eau que pratiquent encore certains distributeurs français constituent donc à la fois une violation des engagements internationaux de la France et une violation d’une disposition nouvelle du droit français (CASF L 115-3, loi Brottes). De telles coupures affectant des personnes en situation de précarité apportent la preuve que certains distributeurs français se moquent de la loi qu’ils ont pourtant mission de respecter.

Henri Smets

Membre de l’Académie de l’Eau

Coupures d’eau : les multinationales hors la loi

Couper l’eau pour impayé dans une résidence principale est illégal en France depuis le 16 avril 2013. Cette interdiction est valable pour tous et toute l’année. Les distributeurs d’eau semblent aujourd’hui ignorer ce profond changement législatif et continuent de couper l’eau dans les familles françaises parfois sans préavis, souvent sans même chercher un arrangement. Ils privent arbitrairement des personnes, pour la plupart en situation de grande précarité, d’une vie digne.

Difficile de chiffrer le nombre de coupures d’eau par jour mais elles sont nombreuses, comme en atteste les appels à l’aide que nous avons reçu depuis le publication de l’article écrit par Henri Smets, informant sur l’illégalité des coupures d’eau en France.

Vous êtes victime d’une coupure d’eau? Voici un guide pratique pour agir>>>ici

L’accès à l’eau est un droit fondamental. Les acteurs de l’eau n’ont de cesse de nous rappeler que nous partageons tous cette évidence. Pour autant, l’obsession économique de notre temps les fait devenir sourds à la protection de la dignité humaine quant il s’agit de parler d’argent. Mais couper l’eau pour impayé n’est pas un acte économique, c’est tout simplement une violation des droits humains.

Pour bien comprendre ce que veut dire couper l’eau en France, écoutez ce reportage de France Culture

COUPER L’EAU POUR IMPAYÉ’, C’EST ILLÉGAL ET INHUMAIN
Dans la société occidentale moderne, le poids de la légalité est puissant alors que le poids de la moralité semble parfois avoir simplement disparu. En dénonçant les coupures d’eau en réponse aux impayés, nous mettons en lumière les dérives de notre société économique qui n’hésite pas à se mettre hors la loi tant que personne ne réagit.

Mais nul n’est censé ignorer la loi. Alors au lieu de faire comme si elle n’existait pas, comme s’il s’agissait d’une erreur du législateur, les multinationales de l’eau auraient dû montrer l’exemple, prendre en compte et faire cesser leurs coupures dès la promulgation de la loi. Elles ne l’ont pas fait comme le prouve les demandes qui remontent vers nous depuis maintenant plusieurs semaines.

Rappelons ce que dit la loi « Brottes » n° 2013-312 du 15 avril 2013 : « Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles. Ces dispositions s’appliquent aux distributeurs d’eau pour la distribution d’eau tout au long de l’année. »

Depuis l’adoption de la loi « Brottes » et son application par décret n° 2014-274 du 27 février 2014, la disposition législative est très claire : Les distributeurs d’eau ne peuvent pas couper la fourniture en eau dans une résidence principale pour motif d’impayé.

France Libertés et la Coordination Eau Ile de France demandent à tous les maires de France – qui rappelons-le sont responsables de la gestion de l’eau – de veiller à ce qu’aucune résidence principale de leur territoire ne subisse de coupure d’eau pour non-paiement de factures.

Nous demandons également aux entreprises de l’eau (notamment aux trois grandes multinationales de l’eau que sont VEOLIA, la Lyonnaise des Eaux et la SAUR) de stopper toutes les coupures d’eau pour impayés immédiatement en France.

Enfin, nous demandons au médiateur de l’eau de s’emparer de cette question pour faire appliquer la loi.

Afin que ces demandes ne restent pas sans suite, nous appelons tous les citoyens français qui subissent actuellement une coupure d’eau à agir avec nous. Aidez-nous à faire appliquer la loi !

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Les coupures d’eau pour impayés sont interdites dans de nombreux pays

Au Royaume-Uni, la loi interdit les coupures d’eau pour impayés depuis 1999. En France, la loi Brottes (avril 2013) a introduit la même interdiction. Il en est de même en Ecosse, Irlande, Russie et Suisse. En France1, en Belgique2 et aux Pays-Bas3, les tribunaux se sont prononcés contre les coupures d’eau. Voici un exemple récent proche de la France.

En Belgique (Région wallonne), la coupure d’eau n’est pas interdite par la loi mais doit impérativement être demandée en justice.En 2013, un tribunal belge a interdit à une société de distribution d’eau de couper la fourniture en eau d’un consommateur en retard de paiement de factures jusqu’à l’apurement intégral des sommes dues. Le raisonnement de la Cour belge est d’autant plus intéressant qu’il se fonde sur le principe général du droit à l’eau.

La 3e Chambre civile de Charleroi, statuant en appel en 2014, se refuse à couper l’eau car l’eau « est une ressource commune et vitale à laquelle tout être humain a droit », même s’il ne paie pas ses factures. “ En l’état actuel de notre société, il n’est pas raisonnable qu’une personne soit privée totalement d’eau. Pour le tribunal, un fournisseur d’eau remplit « une mission de service public qui touche aux droits fondamentaux de tout être humain, mission manifestement incompatible avec la possibilité de priver une personne totalement d’eau ». Il “a une mission de service public qui touche aux droits fondamentaux de tout être humain, mission manifestement incompatible avec la possibilité qui lui sera donnée de procéder à une coupure totale en cas de défaut persistant du paiement des factures”.

Pour le tribunal belge, autoriser un fournisseur à interrompre totalement l’alimentation en eau d’une personne « met en péril la dignité humaine ». Si un arriéré de paiement est constaté, la solution dans l’état actuel de notre société est, selon ce tribunal, « de maintenir un débit minimal afin que le consommateur ne puisse obtenir que l’écoulement d’un filet d’eau ».

Henri Smets, Membre de l’Académie de l’Eau

1 Les tribunaux français ont condamné les coupures avant même qu’elle soient interdites. Voir Henri Smets : La prise en charge des dettes d’eau des usagers démunis en France, Johanet, Paris, 2008, p. 185.

2 En Belgique, avant une coupure, il faut une autorisation préalable d’un Tribunal En 2009, il y a eu 1 712 coupures pour impayés en Belgique, soit moins de 1.5 pour dix mille habitants.

3 Voir « Le droit à l’eau potable et à l’assainissement en Europe », Johanet, Paris, 2012, étude de JP. Haumont, p. 233 étude de H. Smets, p 383, de M. van Rijswick, p.566.

 

Faut-il rendre le prix de l’eau équitable?

Un point de vue d’Henri Smets, président de l’ADEDE, membre de l’Académie de l’eau.

« Notre société est ainsi faite qu’elle tolère que plus de 20% de l’eau distribuée soit perdue dans les fuites de réseaux de distribution mal entretenus mais n’accepte pas qu’un petit 1% de l’eau soit donnée à des personnes en situation de précarité au lieu d’être vendue. Elle paye l’eau potable pour préserver la santé des plantes dans les jardins publics ou nettoyer les rues mais pas l’eau pour préserver la santé des personnes sans revenus ou pour leur permettre de conserver un peu de dignité.

L’eau potable est trop souvent conçue comme une simple marchandise uniquement destinée à ceux qui peuvent la payer alors qu’elle est le patrimoine de la nation, c’est-à-dire un bien collectif destiné à tous sans exception. Bien sûr que les distributeurs d’eau doivent être rémunérés pour le service qu’ils fournissent mais cette rémunération doit être fixée et répartie par la puissance publique et non par le marché, a fortiori par un marché parfaitement monopolistique où le client ne peut exercer aucun choix.

Les tarifs de l’eau comme ceux des cantines scolaires doivent être suffisants et équitables, ce qui ne signifie pas qu’ils doivent être le même pour tous. D’ailleurs, le fait que les plus gros consommateurs d’eau payent souvent l’eau au tarif le plus faible montre que le principe de l’égalité des prix de l’eau pour tous ne constitue pas une obligation intangible.

Il est temps de concevoir des tarifs de l’eau plus équitables, des tarifs qui privilégient les ménages et non les entreprises, les déshérités et non les nantis. Il est temps de dévoiler que l’eau n’est pas vendue à tous au même prix.

Plusieurs dispositions de la loi peuvent permettre de changer les tarifs.

  • Tout d’abord, la loi admet que le prix à payer est fixé pour chaque catégorie d’usagers et il est aussi admis que les ménages peuvent faire l’objet d’un tarif particulier. Qu’attend on pour mettre en place un tel tarif ? Qu’attend-on pour prévoir, par exemple, une tranche d’eau à bas prix pour les ménages, tranche dont ne bénéficieraient pas les professionnels?
  • La loi permet de limiter cet avantage aux résidences principales. Qu’attend-on pour traiter différemment les résidences principales et les autres locaux (résidences secondaires, locaux professionnels, etc.)?
  • La loi Brottes permet de concevoir des tarifs sociaux, c’est-à-dire des tarifs réduits pour les plus démunis. Cette mesure est en vigueur depuis plusieurs années pour l’électricité et le gaz. Qu’attend on pour en faire de même pour l’eau? Ce n’est pourtant pas si difficile puisque Dunkerque l’a fait.
  • La loi permet d’attribuer des chèques eau aux plus démunis, afin de leur permettre de payer leur eau. Cette solution est également prévue pour l’énergie. Plusieurs délégataires ont déjà mis en place ces chèques eau dans une cinquantaine de municipalités. Qu’attend pour généraliser cette approche à toute la France?

Faut-il que le Parlement légifère pour que les maires prennent enfin conscience que l’unicité des prix de l’eau dans une commune est un mensonge et qu’ils ont d’ores et déjà la possibilité de prendre de nombreuses mesures pour que l’eau soit disponible pour tous les ménages à un prix véritablement équitable. Faut-il une instruction du Gouvernement pour qu’ils fassent preuve de créativité en matière tarifaire ? Pour mettre en place des tarifs adaptés à leur contexte particulier, il leur faudra tout simplement ouvrir le dossier du prix de l’eau , cesser de se complaire dans la tradition et… mettre fin à certains privilèges. Il faudra traiter les usagers en fonction de leurs caractéristiques propres et pas comme de simples numéros. Il leur faudra prendre en compte le nombre de logements derrière chaque compteur, voire le nombre de personnes domiciliées et pas seulement le débit souscrit ou le volume consommé. Ce n’est pas si difficile à faire et cela se fait déjà dans tous les services de l’eau dans de nombreux pays. L’important n’est pas la précision de la démarche mais l’intention de tenir compte des caractéristiques changeantes des ménages.

Sans attendre des changements tarifaires qui prendront du temps, il convient de parer au plus pressé et éviter que certaines personnes, les plus pauvres, ne soient tenues de consacrer à l’eau une part trop importante de leurs revenus. A cette fin, la Proposition de loi « visant à la mise en oeuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement » vise à la mise en place d’une aide préventive pour l’eau qui allègera la facture d’eau des plus démunis, soit plus de 800.000 ménages. Cette PPL N° 1375 présentée par les députés de cinq partis clarifiera la portée de l’article 1 de la loi LEMA de 2006 qui instaure le droit à l’eau à un prix abordable pour tous. Le changement promis ne serait-ce pas qu’un droit affirmé en 2006 soit enfin défini en 2015 dans la perspective de sa mise en œuvre en 2018, voire plus tard? La patrie des droits de l’homme ne pourrait-elle montrer que le droit à l’eau est plus qu’un slogan et qu’il peut même être garanti. »

Enfin une proposition de loi pour rendre effectif le droit à l’eau en France

Une proposition de loi visant à la mise en oeuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement a été déposée le 18 septembre à l’assemblée nationale par Jean Glavany et des députés des différents groupes de gauche, écologiste et du centre

Un constat…

Si le territoire national dispose d’une bonne couverture en alimentation en eau potable et en assainissement, la Commission nationale consultative des droits de l’homme indiquait en juin 2011 que « l’on peut dénombrer en France plus de deux millions de personnes pour qui le droit à l’eau potable et à l’assainissement demeure insatisfait ».

Cela recoupe en partie les plus de trois millions de personnes ne disposent pas de logement adéquat et connaissent des difficultés au regard de l’eau et de l’assainissement. C’est le cas notamment des sans domicile fixe, des personnes et familles sans logement, des personnes logées dans des conditions indécentes, des personnes vivant en habitat précaire, des sans domicile, etc.

La reconnaissance du droit à l’eau, qui intéresse tout être humain, vise à répondre à la détresse de ces populations, mais aussi à celles et ceux qui éprouvent des difficultés financières et se trouvent dans l’impossibilité d’honorer une facture d’eau ou d’assainissement dans un cadre individuel ou familial. Ce droit vient ainsi conforter les systèmes de solidarité en vigueur (fonds social logement par exemple) afin de répondre à une urgence humanitaire.

Une loi pour y répondre…

Une proposition de loi a été élaborée, à l’initiative de la « Fondation France Libertés », par un groupe de travail avec notamment Henri Smets de l’Association pour le développement de l’économie et du droit de l’environnement (ADEDE) et Bernard Drobenko, professeur de droit, auquel a participé la Coordination EAU Île-de-France ainsi que de nombreuses associations.

Le soutien apporté par la France pour la reconnaissance du droit à l’eau, notamment aux Nations Unies et à Rio engage le pays à servir d’exemple en reconnaissant et en mettant en œuvre le droit à l’eau, au moins par un acte législatif. Elle doit aussi en assurer la promotion pour sa reconnaissance au niveau européen. L’ensemble de ces éléments légitime bien la reconnaissance législative par la France du droit à l’eau. Pour autant à ce jour, force est de constater que le droit à l’eau potable et à l’assainissement ne figure toujours pas dans le droit français.

L’adoption de cette loi serait l’expression de plusieurs valeurs :

  • Politique (cohérence du législateur avec quelques principes aujourd’hui largement admis).
  • Philosophique, car elle place la France dans la continuité de son approche philosophique des droits de l’Homme.
  • Symbolique, car elle constituera un encouragement pour d’autres États à reconnaître ce droit.
  • Pragmatique, car elle impose des modalités opérationnelles de mise en œuvre.

L’affirmation d’un principe…

Tout commence par l’insertion d’un nouvel article au code de la santé publique qui affirmerait que le droit à l’eau et à l’assainissement est un droit de l’homme qui comprend la mise à disposition d’eau potable, pour les usages personnels et domestiques qui doit être accessible en quantité suffisante et constante et d’un équipement d’assainissement adéquat pour le respect de la santé, la dignité.

Pour atteindre ces objectifs, trois familles de mesures sont proposées dans cette proposition de.

Premièrement, des mesures très concrètes…

Une fois ce principe réaffirmé, il s’agirait d’en tirer les conséquences très concrètes. Ainsi, pour ce faire :

  • Les communes installeraient et entretiendraient des points d’eau potable destinés à l’accès public, gratuit et non discriminatoire.
  • Les communes de plus de 3 500 habitants installeraient et entretiendraient des toilettes publiques gratuites accessibles à toute personne.
  • Les communes de plus de 15 000 habitants installeraient et entretiendraient des douches publiques qui seraient gratuites pour les personnes vulnérables. Elles pourraient, le cas échéant, prendre des dispositions pour permettre à ces personnes d’avoir accès à des équipements existants déjà utilisés par le public (par exemple gymnases, piscines, etc.).

Deuxièmement, une tarification adaptée…

Le montant de la facture d’eau pourrait être calculé en fonction de tranches de consommation sur la base d’une tarification à une ou plusieurs tranches avec la possibilité d’une première tranche de consommation gratuite ou à prix réduit.

Au-delà de cette première tranche, l’eau potable peut être facturée de manière progressive en considérant les quantités d’eau consommées et la nature des usages, notamment professionnels.

Des dispositions spécifiques seront prises au bénéfice des familles les plus démunies et de grande taille dès lors que de telles dispositions pourraient les défavoriser.

La facture fait apparaître le prix du litre d’eau.

Troisièmement, des aides pour les personnes en difficulté…

En cas de non-paiement des factures d’eau, les services sociaux devront être immédiatement saisis par le fournisseur qui doit alors maintenir un service restreint répondant à la satisfaction des besoins fondamentaux de la personne (qu’un décret définira). Dès lors que l’usager en difficulté relèverait de la compétence des services sociaux, une procédure de solidarité est alors mise en œuvre via un fonds départemental de solidarité pour le logement visant à la mise en œuvre du droit au logement.

Un dispositif préventif d’aide serait mis en œuvre par l’intermédiaire des caisses d’allocation familiale (CAF). Détentrices des informations nécessaires à la prise en charge des plus démunis, elles contribueraient avec les services compétents de l’État et des collectivités territoriales à la réalisation du droit à l’eau.

Ainsi dès que le montant de la facture d’eau nécessaire pour mettre en œuvre le droit à l’eau d’un ménage (toutes taxes et redevances comprises) excéderait 3 % des ressources prises en compte pour le calcul de l’aide au logement un dispositif serait déclenché. Au-delà de ce seuil, la prise en charge de l’approvisionnement en eau potable est assurée par un Fonds national de solidarité du droit à l’eau via le fonds départemental de solidarité du logement. L’éligibilité à ce droit sera déterminée en fonction de critères comme la composition du ménage, ses ressources et le prix moyen de l’eau dans le département.

Ce fonds national de solidarité du droit à l’eau, ainsi institué pour la mise en œuvre de ce droit à l’eau et à l’assainissement, est administré par un comité de gestion, qui fixe les orientations et affecte les crédits aux fonds départementaux de solidarité pour le logement. Pour ce faire, ce fonds national disposerait de recettes qui pourraient être constituées par une taxe sur toute production ou commercialisation d’eau emballée (bouteille, bonbonne ou autre emballage) produite en France ou importée. Si cela était insuffisant, d’autres recettes pourraient être envisagées telles que :

  • une taxe sur toute production ou commercialisation d’eau (bouteilles, bonbonnes) ainsi que sur son importation
  • une contribution sur le chiffre d’affaires des sociétés de distribution d’eau

Ce fonds national de solidarité du droit à l’eau serait également chargé, via le fonds départemental de solidarité pour le logement, de financer l’aide personnalisée pour l’amélioration des structures d’assainissement non collectif pour les populations défavorisées.

Enfin, de cas de litige relatif à la mise en œuvre du droit à l’eau et à l’assainissement, toute personne concernée ainsi que les associations d’action humanitaire pourraient saisir l’autorité compétente par un recours amiable, en urgence. À défaut de réalisation du droit à l’eau sous huit jours, elles pourraient alors saisir, en procédure d’urgence, le tribunal compétent, le juge des référés se prononçant dans un délai de quarante-huit heures.

Comment continuer ?

Les propositions contenues dans cette proposition de loi  sont dans le droit-fil des réflexions issues de l’atelier inter-associatif de la Seine-Saint-Denis : « Accès à l’eau pour tous, ici et maintenant ! » réuni en 2011 dans le cadre des Assises régionales des associations pour l’eau en Île-de-France. À partir de la situation des populations privées d’eau et d’assainissement en Seine-Saint-Denis (familles précaires, gens du voyage, squatters, SDF, etc.), cet atelier avait dressé un état des lieux pour proposer des solutions applicables immédiatement, ici et maintenant:.

A la suite des Assises, une action pilote « eau dans la ville et accès à l’eau et à l’assainissement » est menée par la Coordination EAU Île-de-France dans la ville de Saint-Denis. Il s’agit d’estimer les populations privées de cet accès vital et d’élaborer des recommandations précises, avec l’objectif d’aller jusqu’à  un agenda de mise en oeuvre.

A l’action de terrain répond maintenant la proposition de loi. Bien qu’encore imparfait, ce texte doit permettre à un ensemble de parlementaires, dans la plus grande diversité, d’engager le travail. En tout cas le temps presse. Un débat sur ce texte, solide base de départ selon les parlementaires qui ont participé à ce premier travail de rédaction, doit rapidement arriver dans le calendrier parlementaire.

En tout cas, quand ont les regarde dans la durée, les actions conduites par les diverses associations (et par la Coordination Eau Île-de-France en particulier) sont cohérentes. Cette première rédaction d’un texte législatif qui vient de se terminer, montre le chemin parcouru, mais n’en constitue qu’une étape.

Cela engage à poursuivre les échanges et les réflexions au parlement, mais aussi dehors, avec les associations et avec les citoyens.

Lire article d’actu-environnement: vers un droit à l’eau opposable

 

Lire la PROPOSITION DE LOI