Avec Climat et petits cycles de l’eau, le fondateur de l’ONG WaterHolistic et prix Goldman 1999, Michal Kravčìk et son équipe ont produit un ouvrage très bien référencé scientifiquement, mais dont la lecture est accessible à tous. Appuyé sur les études des auteurs et d’autres chercheurs, le livre modélise l’hydrologie naturel, sa détérioration anthropique, et propose un nouveau paradigme pour palier au réchauffement climatique. Par Alexandre NEZEYS, ingénieur de la ville de Paris.
Jusqu’à aujourd’hui, en hydrologie classique, on considère un Grand cycle de l’eau et un Petit cycle de l’eau. Le Grand cycle de l’eau, appelé aussi Cycle naturel de l’eau, est une modélisation de l’évaporation des océans, qui provoque l’acheminement des nuages vers les terres, qui une fois refroidis, se transforme en précipitation. L’eau ainsi ruisselée alimente les nappes et les cours d’eau, qui coulent progressivement vers la mer, ce qui boucle le cycle. C’est ce grand cycle qui est à l’origine des pluie fortes à exceptionnelles, comme les « pluies cévenoles » ou les « gouttes froides ».
Toujours en hydrologie classique, le Petit cycle de l’eau, appelé aussi Cycle anthropique ou artificiel de l’eau, est construit par l’homme pour ses besoins. Il prélève l’eau dans une rivière ou dans la nappe aquifère, l’épure pour en faire de l’eau potable, que le consommateur transforme en eau usée qui sera orientée vers la station d’épuration, qui rejettera l’eau assainie dans la rivière. Ce Cycle anthropique de l’eau inclut aussi la gestion des eaux pluviales, qui oriente rapidement les eaux de ruissellement, qu’elles soient urbaines ou rurales, vers les rivières ou la mer. Ce n’est pas vraiment cyclique, car cette anthropisation de l’eau accélère les transports du Grand Cycle naturel vers la mer.
Le livre de Michal Kravčìk introduit un troisième type de cycle : le Petit cycle naturel local de l’eau ; L’eau de pluie, s’infiltre dans le sol, alimente la nappe phréatique, qui quand elle est peu profonde, est pompée par les arbres et les autres plantes. L’eau est ainsi évapotranspirée, monte dans l’air, et une fois refroidie, retombe sur le sol sous forme de pluies courantes. Contrairement au Cycle anthropique, ces Petits cycles naturels régulent les effets du grand cycle de l’eau, et « climatisent » naturellement les zones qui en bénéficient, par l’évapotranspiration continue des forêts.
Le problème, c’est que l’anthropisation des terres détruit ces Petits cycles naturels. L’artificialisation des sols, qu’elle soit rurale ou urbaine, efface les arbres, empêche l’eau de s’infiltrer dans le sol pour alimenter la nappe phréatique, et précipite les eaux vers les rivières et la mer. Cela a de nombreuses conséquences délétères, entre autres :
- Les inondations dues au ruissellement ou au débordement des rivières augmentent.
- La suralimentation en eau des rivières, accentue la hausse du niveau des océans.
- La disparition des arbres, avec leur évapotranspiration, contribue au réchauffement climatique. Cela est particulièrement sensible en ville avec les îlots de chaleur urbains.
- La disparition des Petits cycles naturels, renforce le Grand cycle, ce qui a pour conséquence une augmentation de la fréquence des pluies fortes et exceptionnelles.
- En zone rurale artificialisée, le ruissellement provoque l’érosion et la dégradation des sols arables, ce qui oblige à utiliser plus de produits phytosanitaires.
- La dégradation des sols et le réchauffement qu’il provoque, va même jusqu’à transformer des régions forestières en déserts.
Le livre propose un nouveau paradigme hydrologique pour inverser le réchauffement des terres et ses effets. Il s’agit tout simplement de restaurer ces Petits cycles naturels de l’eau, en ville comme en zone rural. Cela se traduit notamment par le développement d’arbres et l’infiltration des eaux de pluie. En ville, çà consiste à éviter de renvoyer ces eaux vers les rivières ou la mer, en bannissant « l’assainissement pluvial ». En zone rural, il convient d’adapter l’agriculture par un reboisement partiel des terrains, pour y infiltrer les eaux de pluie. Bien sûr cela passe par une sauvegarde dans le monde entier des forêts encore existantes.
J’invite toute personne intéressée par ces problématiques climatiques, hydriques, urbanistiques et écologiques, à lire cet ouvrage génial. Alexandre NEZEYS
Il peut être commandé chez l’éditeur :
https://www.yvesmichel.org/livre/climat-et-petits-cycles-de-leau/
Climat et petits cycles de l’eau : Les solutions du nouveau paradigme de l’eau, par Michal Kravčìk, Jan Pokorny, Juraj Kohutiar, Martin Kováč, Eugen Tòth, Valérie Valette et ElHabib Ben Amara (éditions YVES MICHEL)