Une pilule amère pour les majors de l’eau

Enfin! La FP2E (fédération professionnelle des entreprises de l’eau) qui regroupe les trois multinationales du secteur (Veolia, Suez et la Saur) et quatre autres comparses, avale une pilule amère : l’illégalité des coupures d’eau. Dans le numéro de novembre 2015 d’Aquae, sa lettre mensuelle, un article intitulé « le régime des coupures d’eau clarifié » prend acte de la loi Brottes. Extraits ci-dessous:

« A l’issue des débats parlementaires sur la loi de transition énergétique et au regard de l’avis conforme donné par le Conseil Constitutionnel sur les dispositions de la loi « Brottes » d’avril 2013, l’interdiction de couper l’alimentation en eau dans les résidences principales en cas d’impayés a été établie.
Il en résulte que les services publics d’eau et d’assainissement ne peuvent plus émettre d’avis de coupure dans les logements en cas d’impayés, ni même procéder à ces interruptions de service. »

Bon, il en aura fallu du temps et de la détermination de la part de la Coordination Eau Île-de-France et de la Fondation France Libertés (et de bien d’autres associations, citoyens et élus qui participent à cette lutte) pour en arriver là: les multinationales reconnaissent la loi! Maintenant il ne reste plus à Veolia et à la Saur qu’à passer aux actes et à arrêter définitivement les coupures d’eau (et les avis de coupure, comme le précise l’article dans une formulation assez bizarre). Car, en décembre, nous avons encore reçu des témoignages de coupures d’eau! Nous n’aurons de cesse de les rappeler au respect de la loi, et maintenant, de leur parole.

La FP2E s’inquiète de la croissance des impayés que provoquerait, selon elle, l’interdiction des coupures d’eau: « certaines régies municipales font état de niveaux d’impayés multipliés par trois depuis l’annonce de cette coupure ».  En réalité, malgré nos multiples demandes, la FP2E n’a jamais été capable de nous fournir le moindre chiffre concernant les impayés: trop compliqué, non répertorié, ont été les réponses de la fédération représentant les majors de l’eau…

Pour Veolia, les impayés étaient estimés à 35 millions d’euros en 2015. Une somme à rapprocher des 600 millions d’euros de réduction des coûts et des 500 millions de trésorerie libre (c’est à dire après versement des dividendes) engrangés par l’entreprise en 2015. L’interdiction des coupures d’eau n’est donc pas près de ruiner le commerce prospère de la multinationale.

Côté économie toujours, il faut aussi remarquer que les coupures d’eau n’ont jamais rendu solvables les ménages qui ne l’étaient pas. D’où des coupures d’eau pour des mois et des années dans certains cas, et des coupures à répétition dans d’autres cas. La solution aux impayés viendrait plutôt d’une aide préventive aux personnes en difficultés, telle que la prévoit proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement qui devrait être examinée par l’Assemblée nationale en février 2016.

Reste enfin la question des réductions de débit, toutes aussi illégales que les coupures d’eau, qui n’est pas abordée dans l’article de la FP2E et que Veolia et la Saur continuent à pratiquer aussi. De quoi nous occuper en 2016: nous ne lâcherons rien!

Voir l’article intégral d’Aquae.