Archives de catégorie : Batailles pour une gestion publique

Les valdorgiens ont dit oui très largement à la création d’une régie publique pour l’eau potable

Le mercredi 10 juin 2015 est un jour à marquer d’une pierre blanche pour celles et ceux qui rejettent la marchandisation de nos vies quotidiennes et de nos ressources naturelles.

En effet, au soir d’une journée de comptabilisation de la quasi­ totalité des cartes T renvoyées par les habitants de l’agglomération du Val d’Orge (CAVO), leur choix très majoritaire en faveur d’une gestion publique s’impose de façon spectaculaire: sur 7313 cartes validées (613 en attente et sans doute quelques dizaines de plus demain), le Oui à une régie publique s’impose avec plus de 78% sur l’ensemble de l’Agglomération et il est nettement majoritaire dans les 10 communes avec des scores entre 61 et 89%.

Un résultat d’autant plus remarquable qu’il conclut une consultation dont l’organisation et la propagande officielle étaient de nature à décourager le plus grand nombre :

* Un dépliant d’information refusant l’expression pluraliste des différentes positions sur la gestion de l’eau et jouant sur la peur, en prétendant que seules les multinationales de l’eau disposent aujourd’hui du savoir-faire nécessaire pour la gérer;

* Des cartes T distribuées au compte­-goutte; de nombreux habitants n’ayant rien reçu, les autres une seule carte par habitation, avec interdiction de la reproduire!

* Plusieurs Maires (Bretigny, Fleury, Villemoisson) refusant d’organiser des réunions d’informations sur le sujet dans leur commune;

* Aucune initiative d’information de la CAVO, en totale contradiction avec des dizaines de milliers d’euros engloutis et de la mobilisation générale de ses services quelques mois plus tôt contre la fusion avec Evry;

* de nombreux élus rappelant lourdement qu’il s’agissait d’une simple « consultation » dont les résultats seraient sans conséquence sur leur propre vote.

A l’exception de la commune de Morsang-sur-Orge, les actions de sensibilisation et discussion avec les habitants ont reposé sur le bénévolat et l’implication de citoyens refusant que la population soit tenue à l’écart des enjeux de l’eau, selon l’argument fallacieux et insultant qu’elle est incapable de s’exprimer sur une question aussi technique.

C’est à la lumière de ces données, qu’on peut mesurer l’ampleur de l’adhésion populaire à l’idée de libérer et préserver la gestion de l’eau potable des pressions, des surfacturations et des gaspillages inhérents à une gestion privée visant le profit maximal: la volonté des valdorgiens de rompre avec 90 ans de soumission aux intérêts privés est sans appel.Cette aspiration majoritaire transcende bel et bien les clivages politiques habituels.

Le mercredi 24 juin, les 48 membres du Conseil communautaire du Val d’Orge voteront sur le mode de gestion de l’eau potable de l’Agglomération en mai 2017, à l’issue des contrats en cours avec Suez-­Lyonnaise et Veolia. Compte tenu de la clarté du résultat, nous voulons croire qu’ils auront la sagesse et la loyauté de respecter l’expression majoritaire de leurs électeurs. Dans le cas contraire la démocratie locale ne s’en remettrait pas.

Rendez-vous lors du prochain conseil communautaire de l’Agglo mercredi 24 juin à 20h30 au Trianon, 72 route de Corbeil à Villemoisson sur Orge: ce sera autour des élus de prendre leur décision à la lumière des résultats de cette consultation.

Cette victoire est une première étape qui donne confiance dans l’avenir: la régie publique n’est pas une fin en soi, c’est un moyen au service d’une gestion socialement et écologiquement exemplaire. Les usagers et leurs associations veilleront à obtenir et à tenir toute leur place au conseil d’administration de la future régie aux cotés des élus pour y faire entendre la voix et les besoins des habitants.

Vive la régie Publique! A la santé de l’eau potable, notre bien commun si fragile et si vital !

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Fabuleux contrat du SEPG: nouveau recours

Alors que le tribunal administratif n’a toujours pas statué sur le recours déposé par les associations contre la délibération du Syndicat des eaux de la presqu’île de Gennevilliers (SEPG) du 29 mai 2013 reconduisant une délégation de service public, le comité d’administration du 5 mars 2015 a choisi Eau & Force, le délégataire sortant, filiale de Suez Environnement, pour une période de  12 ans à compter du 1/7/2015. Un nouveau recours est donc déposé par la Coordination Eau Île-de-France avec Naturellement Nanterre, la fondation France Libertés et le collectif Eau claire de Seine.

Voici les motifs principaux mais non exhaustifs de ce recours, gracieux, dans un premier temps.

La validité de ce contrat est subordonnée à celle de la délibération du 29 mai 2013 choisissant l’affermage comme mode de gestion du service public de l’eau. Nous continuons bien évidemment de contester la légalité de cette délibération et nous attendons avec confiance le jugement du TA de Cergy saisi sur ce point.

Le contrat comporte une grille tarifaire rendue publique applicable à tous les usagers mais il est accordé à Eau&Force la latitude de consentir des réductions tarifaires à de entités grosses consommatrices, ce qui est à l’opposé des principes  de justice sociale et d’une politique écologique visant à encourager une décroissance de la consommation d’eau de chaque usager.

Sans la moindre concertation avec les premiers concernés que sont les usagers et leurs représentants, sans disposer d’informations susceptibles de démontrer rigoureusement l’intérêt de cette option, le choix a été fait d’acheter, de faire produire et de faire distribuer par Eau&Force une eau dite décarbonatée, et ce à partir de 2018 au prix d’une augmentation disproportionnée du tarif à la charge des usagers.

Les comptes d’exploitation prévisionnels d’Eau&Force affichent plus de 42,9 millions d’euros de bénéfices avant impôt sur la durée du contrat, auxquels il convient d’ajouter près de 24 millions d’euros préalablement versés à la société mère, soit un total de près de 67 millions d’euros, représentant 11,6% du chiffre d’affaires, prélevés sur les usagers de l’eau sans aucune justification économique ni écologique, au seul bénéfice –avant impôt- des dirigeants et actionnaires du groupe Suez Environnement et accessoirement de l’État.

Nous avons bien pris note d’une diminution moyenne théorique de 23% de la part de l’eau potable dans les factures payées par les usagers des 10 villes, à consommation égale, du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2017. La société Eau&Force a du consentir de façon provisoire à cette réduction, sans conséquences cependant sur la santé financière du groupe Suez Environnement auquel elle appartient. Cela confirme l’ampleur, invraisemblable pour le commun des mortels, des marges engrangées depuis des décennies par la même société au fil des reconductions et des prolongations de contrats accordées par le SEPG.

Ce fabuleux contrat montre que le SEPG joue pour Suez le même rôle que le SEDIF pour Veolia, à savoir celui d’une manne quasi illimitée qui permet de remporter d’autres marchés dans des conditions moins favorables.

Enfin, à notre grand étonnement,  le règlement du service de l’eau, intégré au contrat, stipule des cas où Eau&Force est autorisée à couper l’alimentation en eau des ménages contre leur gré, ce que nous jugeons évidemment contraire au respect élémentaire de la dignité des êtres humains et qui est formellement proscrit par la loi dite Brottes actuellement en vigueur.

Les associations « pour l’eau publique » de la Vallée de la Seine s’opposent à la privatisation de l’eau

L’adoption par l’Assemblée Nationale, le 10 mars dernier, de la nouvelle loi de décentralisation portant la Nouvelle Organisation Territoriale de la République (loi NOTRe) a pour conséquence de faire disparaître les syndicats intercommunaux, notamment dans les secteurs de la fourniture de l’eau potable et l’assainissement, au profit de gigantesques intercommunalités. Celle qui nous concerne, devrait comporter 405 000 habitants de Conflans Sainte Honorine à Rolleboise.

Ce transfert de compétence aboutira à dessaisir les communes de la responsabilité du service de l’eau qui était la leur dans l’exercice d’un service public, renforcera la mainmise des sociétés privées multinationales du secteur et éloignera encore un peu plus les citoyens de leur capacité à contrôler la qualité de l’eau, l’entretien du réseau de distribution et les prix pratiqués.

Alors que les dispositions prises par les régies publiques au profit des consommateurs domestiques démontrent les avantages que ceux-ci peuvent tirer de l’existence des régies (comme celle de Limay-Guitrancourt), la privatisation conduit, à l’inverse, à des prix plus élevés pour un service dont les performances restent largement « perfectibles ».

Nos Associations, réunies le 4 avril 2015 en Mairie de Limay, réaffirment leur volonté de défendre et de préserver les régies existantes et de combattre pour que la distribution de l’eau potable et l’assainissement soient assurés et unifiés par un service public en régie commun au nouvel ensemble.

Elles décident d’engager une campagne d’information de tous les habitants de la future agglomération « Grand Paris Val de Seine » et d’organiser une série de réunions publiques sur ce sujet à partir d’octobre 2015.

AREP-CAMY – Association Les Mur’Eau – Eau Val de Seine – ARRPE-Courgent.

Le conflit emblématique entre Suez et l’Argentine

 

Un tribunal arbitral international vient de condamner l’Argentine à verser près de 400 millions d’euros à Suez environnement, pour avoir renationalisé le service de l’eau de Buenos Aires en 2006, après des années de conflits. La firme française a eu recours aux mêmes mécanismes de « résolution des disputes entre États et investisseurs », ou ISDS, qui sont aujourd’hui au centre de la contestation du projet d’accord commercial entre Europe et États-Unis. Une décision qui illustre combien, dans leur fonctionnement actuel, les procédures ISDS ne tiennent véritablement compte ni des droits humains ni de la responsabilité des États vis-à-vis de leurs citoyens, en faisant primer la loi d’airain de la protection des investissements.

L’État argentin a été condamné par le CIRDI [1], un tribunal commercial dépendant de la Banque mondiale, à verser une compensation de 405 milliards de dollars US (380 millions d’euros) à Suez environnement, suite à l’annulation en 2006 du contrat de privatisation de l’eau de Buenos Aires. Un arbitrage rendu dans le cadre des procédures dites de « résolution des conflits entre États et investisseurs », ou ISDS, prévues dans le traité bilatéral d’investissement signé entre la France et l’Argentine dans les années 1990 – ces mêmes mécanismes qui font aujourd’hui polémique dans le cadre du débat sur le projet de « Pacte transatlantique de commerce et d’investissement » (communément désigné par les sigles TTIP ou TAFTA). La décision du CIRDI illustre parfaitement les raisons pour lesquelles les mécanismes ISDS se retrouvent aujourd’hui sous le feu des critiques.

Ces tribunaux arbitraux privés, dont le CIRDI est le principal au niveau mondial, sont accusés de fonctionner de manière opaque et d’être structurellement biaisés en faveur des intérêts privés. Surtout, ils prennent généralement leurs décisions en se référant uniquement aux dispositions des traités d’investissements et plus généralement du droit commercial privé, sans réellement tenir compte des autres dimensions du droit international, et notamment du devoir de protection des droits de l’homme. Le litige entre Suez et l’Argentine en constitue un exemple particulièrement emblématique, puisque le gouvernement argentin a tenté, sans succès, d’invoquer « l’état de nécessité » face au « péril grave et imminent » résultant de la dramatique crise financière de 2001-2002, ainsi que son devoir de protection du « droit à l’eau », pour justifier l’annulation du contrat qui le liait à Suez.

par Olivier Petitjean

Photo : Daniel Lobo CC

[1Centre international pour le règlement des différents relatifs aux investissements

Lire l’article intégral de l’Observatoire des multinationales

Vague montante pour la remunicipalisation de l’eau

Dans le cadre de la préparation du Forum mondial de l’eau 2015, qui se tient en Corée du Sud à partir du 12 avril, l’Observatoire des multinationales et quatre autres organisations publient une nouvelle analyse de la vague ascendante de la remunicipalisation de l’eau dans le monde – autrement dit le retour sous contrôle public de services de l’eau ou de l’assainissement auparavant privatisés.

Cette étude recense, sur les 15 dernières années, 235 cas de remunicipalisation dans 37 pays, touchant plus de 100 millions de personnes. Cette tendance à la remunicipalisation est en outre en pleine accélération, puisque le nombre de cas a doublé sur la période 2010-2015 par comparaison avec la période 2000-2010.

Les cas de remunicipalisation identifiés à ce jour [2] se concentrent dans les pays à revenus élevés, avec 184 remunicipalisations, contre 51 dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires. La grande majorité a eu lieu dans deux pays : la France (siège des plus grandes multinationales de l’eau, Suez et Veolia) et les États-Unis.

« Cet ouvrage collectif montre que la privatisation de l’eau, qui a été promue si agressivement ces dernières années, est de plus en plus rejetée par les villes du monde entier où elle a été expérimentée, en raison des promesses non tenues, de la faible qualité du service rendu et de la hausse des prix, explique Satoko Kishimoto, principale coordinatrice du livre et experte du Transnational Institute. On assiste à un retour de balancier en faveur de la gestion publique, sur la base de l’expérience accumulée, laquelle démontre clairement que la remunicipalisation permet des économies budgétaires immédiates, une meilleure performance opérationnelle, une hausse des investissements, ainsi que des niveaux plus élevés de transparence et de responsabilité démocratique. »

Lire l’article intégral de l’Observatoire des multinationales

Conseillers départementaux, choisissez l’eau publique!

Pour Mounia Benaili, Conseillère municipale de Juvisy-sur-Orge, secrétaire départementale du Parti de gauche en Essonne, les nouveaux conseillers départementaux désignés ce dimanche peuvent améliorer « le pouvoir d’achat » de leurs administrés et lutter dans le même temps contre « le gaspillage ». Comment ? En choisissant de participer au « mouvement de remunicipalisation du service public de l’eau » que connaît notre pays.

Le dimanche 22 mars 2015, jour du premier tour des élections départementales, fut aussi la Journée mondiale de l’eau. Les conseils départementaux, désormais élus, ont un rôle majeur à jouer pour favoriser la gestion publique de l’eau.

La Journée mondiale de l’eau nous a rappelé à tous que la distribution d’eau potable et son assainissement est un combat de tous les jours pour des millions d’êtres humains dans le monde. En France, l’enjeu ne se pose plus en terme d’accès à l’eau potable, même si l’explosion de la précarité remet au goût du jour le débat sur l’illégalité des coupures d’eau et l’accès à l’eau sur l’espace public (fontaines et douches publiques). Non, le véritable enjeu c’est d’avoir une eau de qualité, à prix coûtant et gérée de manière transparente.

Notre pays voit un mouvement de remunicipalisation du service public de l’eau, engagé par des élus de gauche et de droite. En effet, alors que 90% de l’eau est gérée publiquement dans le monde, trois multinationales – Véolia, Suez et la Saur – accaparent 70% de sa gestion en France. Depuis trop longtemps, nos collectivités délèguent la gestion de l’eau au secteur privé. Et nous en subissons tous les méfaits. L’eau privée est en moyenne 30% plus chère que l’eau publique. Pour quelles raisons ? Les majors doivent rétribuer des actionnaires toujours plus gourmands en dividendes. Le coût optimal de la potabilisation de l’eau n’est pas connu, ce qui rend possible de réelles surfacturations. Mais celles-ci s’expliquent aussi par une gestion opaque, où les élus qui ne se lavent pas complètement les mains de la gestion déléguée, sont entravés dans leur accès aux documents de gestion.

Par ailleurs, les majors ne réalisent pas les investissements nécessaires sur le réseau de distribution. Un milliard de mètres cubes d’eau chaque année est perdu à cause des fuites dans les canalisations. Pourtant, nous payons quand même toute cette eau perdue et gaspillée. Non sens économique et non sens écologique se mêlent pour nourrir les marges des entreprises de l’eau.

LA GESTION PUBLIQUE DE L’EAU GARANTIT UNE GESTION TRANSPARENTE ET UNE FACTURE MOINS ÉLEVÉEAu contraire, la gestion publique de l’eau garantit une gestion transparente : les élus et les associations d’usagers et de protection de l’environnement cogèrent le service au sein du conseil d’administration (régie publique personnalisée) ou d’exploitation (régie publique à seule autonomie financière). Aucune surfacturation n’est possible. La gestion au prix coûtant c’est le gage d’une facture d’eau moins élevée.

En instaurant la gratuité des premiers mètres cubes d’eau indispensables à la vie humaine, en créant une tarification différenciée en fonction des usagers (professionnels, ménages, administrations et associations) et des usages (vital, courant, de confort), mais aussi une tarification progressive (plus on consomme, plus on paie) pondérée en fonction du nombre d’habitants par ménage (pour ne pas pénaliser les familles nombreuses), l’eau coûte moins chère aux usagers, tout en permettant une utilisation raisonnée et plus écologique de la ressource eau.

Puisque l’eau est bien un droit, mettons le en œuvre. La Cour d’appel administrative de Bordeaux le 8 juillet 2008 et le Conseil constitutionnel le 7 juillet 2011 ont autorisé le conseil général des Landes, et par jurisprudence tous les départements, à soutenir les régies publiques de l’eau, octroyant des aides financières directes à toute commune ou intercommunalité en matière d’eau potable et d’assainissement. L’arrêt Olivet rend caducs nombre de contrats de délégations de service public en 2015 et dans les années à venir.

Les conseillers départementaux ont donc un rôle majeur à jouer en faveur des usagers, pour améliorer le pouvoir d’achat, pour éviter les gaspillages.

En ce qui me concerne, je mène activement une campagne locale en faveur de la gestion publique de l’eau en Essonne dans les communes de Juvisy-sur-Orge, Savigny-sur-Orge, Paray-Vieille-Poste et Athis-Mons. J’y appelle les maires et le président de la communauté d’agglomération Les Portes de l’Essonne, Robin Reda, à opter pour la gestion publique de l’eau et à constituer une régie intercommunale avec la régie publique Eau des Lacs de l’Essonne.

Après le second tour des élections départementales et la Journée mondiale de l’eau, les nouveaux conseillers départementaux, quelle que soit leur orientation politique, peuvent prendre parti en faveur de la gestion publique de l’eau.

Conseillers départementaux, choisissez l’eau publique !

Publié dans l’hebdomadaire Marianne.