Benjamin Joyeux, conseiller régional écologiste, a longuement interviewé Raymond Avrillier, figure des actions écologistes et expert de l’utilisation du droit pour la cause du vivant. Raymond Avrillier est bien connu pour avoir fait tomber pour corruption l’ancien maire de Grenoble Alain Carignon, alors ministre. Une affaire qui a donné le coup d’envoi au mouvement de retour à la gestion publique de l’eau à Grenoble et dans tout le pays. Extrait sur l’eau et lien vers l’entretien complet.
A Grenoble, nous avons été une des premières villes à nous préoccuper sérieusement de l’eau et de sa gestion, pour en reprendre le contrôle public, quand en 1989, l’ancien maire de Grenoble Alain Carignon la privatise illégalement ce service public essentiel, vital, au profit de la Lyonnaise des eaux (groupe Suez), par un contrat de vingt-cinq ans donc prévu pour durer jusqu’en 2014.
Nous sommes les premiers (et les seuls…) à révéler un système de corruption autour de cette décision, alors que de tels systèmes existaient dans bien d’autres villes, sans réaction. Je porte ce dossier pour les élu·es minoritaires écologistes et alternatifs dont je suis président de groupe, en conseil municipal, dans les manifestations pour le maintien du service public, et devant la justice administrative (tribunal administratif de Grenoble qui rejette notre requête en annulation de cette délibération, puis Conseil d’État). Il va nous falloir huit ans d’actions, dont les recours pour excès de pouvoir contre délibération de concession entre corrupteurs de la Lyonnaise des eaux et maire corrompu et ses complices, qui ne seront jugés qu’en octobre 1997 par le Conseil d’État, au motif que « les motifs réels de la délibération attaquée ont été dissimulés aux membres du conseil municipal et l’information fournie à ceux-ci a été de nature à les induire en erreur sur la portée des contrats soumis à délibération »[20]
Pendant ces années de lutte et ensuite avec la reprise de contrôle public en régie du service public de l’eau, je vais être appelé par des mouvements et des collectivités, au niveau national (Paris reprendra le contrôle de ce service dix ans après, Lyon vingt ans après) puis dans d’autres pays d’Europe, en particulier pour de nombreuses mobilisations en Italie, et d’Amérique du Sud.
Par exemple, étant alors vice-président en charge de l’assainissement de la communauté d’agglomération de Grenoble, je serai amené à me déplacer avec France Libertés et Danièle Mitterrand[21], en Argentine, Bolivie, Brésil, Uruguay, en 2005, pour soutenir les luttes pour reprendre le contrôle public de l’eau qui ne devrait pas être une marchandise[22] mais notre « patrimoine commun ». L’ambassadeur de France à La Paz, en Bolivie, va intervenir pour dissuader Danielle Mitterrand de mener ces actions qui s’opposent à une entreprise française, Suez, qui détient la privatisation de l’eau en Bolivie.