Après des années de combat acharné contre le groupe Suez, le syndicat mixte fermé « Eau du Sud Francilien », constitué de quatre intercommunalités, saisi la Haute Autorité de concurrence. L’objectif ? Permettre la réappropriation publique de la production et du transport d’eau potable. Par Margot Bonnéry.
En pleine guerre de l’eau, les intercommunalités sud-parisiennes en ont assez de ramer. Dans un contexte global d’augmentation des prix, la monopolisation privée de la production d’eau potable leur semble inacceptable. C’est pourtant ce que fait Suez depuis des années. Ce lundi 29 avril, le syndicat mixte fermé « Eau du Sud Francilien », constitué de quatre intercommunalités, s’est réuni à l’Université d’Evry pour mettre fin à cette situation.
L’objectif est de saisir la Haute Autorité de concurrence pour permettre la réappropriation publique de la production et du transport d’eau potable. Avec le soutien du conseil départemental de l’Essonne, le syndicat souhaite engager des discussions avec Suez pour reprendre la propriété des ouvrages, baisser les tarifs exorbitants et assurer une maîtrise publique de ce service essentiel aux habitants de l’Essonne, de la Seine-et-Marne, des Yvelines et du Val-de-Marne.
Volonté de réappropriation publique
Face à cette volonté de réappropriation publique, Suez ne cesse de faire tourner en bourrique les élus locaux. En novembre 2023, alors que le groupe avait préalablement accepté de vendre une de ses usines de production, la PDG de Suez, Sabrina Soussan, a écrit aux élus qu’il « n’a jamais été question de réappropriation publique des installations ou de retour en propriété publique ». Un mois après, les villes ont décidé de ne payer que 0,50€ par m3 alors que l’eau ne coûte que 0,29€ à Suez qui la revend jusqu’à 1,19€/m3.
« Les usagers de nos territoires se font gruger, c’est du vol manifeste », s’indigne Philippe Rio, maire PCF de Grigny, Vice-Président de Grand Paris Sud en charge du cycle de l’eau et Président de la Régie Publique. En 2022 déjà, les élus membres du Conseil d’Administration du sud parisien ont révélé que l’eau s’était vendue à 54 526 500 € pour 78 millions de m³. Cependant, le réel coût annuel s’élève à 21 810 600 euros. Tous les ans, 33 millions d’euros de profits vont ainsi dans la poche de Suez et de ses actionnaires. Une dissimulation que les élus locaux considèrent indigne. « Lorsqu’on a demandé des explications, on nous a répondu textuellement : “secret des affaires” », poursuit Philippe Rio. En clair, la filiale de Suez Eau du Sud Parisien « se finance un loyer sur des installations qui deviennent propriété du groupe ».
Un bien rétrocédé gratuitement
Au-delà de la Haute Autorité de concurrence, « dont la saisie est une exigence démocratique, nous voulons aller plus loin », annonce Philippe Rio. « Il faut saisir le tribunal pour que l’usine et l’ensemble du réseau soient considérés comme un bien de retour d’un service public déjà payé par les usagers. Ainsi, nous souhaitons récupérer leurs propriétés », poursuit le maire communiste. Selon les avocats des élus, le RISF peut être considéré comme un bien de retour « et donc être rétrocédé gratuitement aux pouvoirs publics plutôt que de continuer à ce que bien commun de l’humanité nourrisse les profits des actionnaires ».
RAPPEL DES EPISODES PRECEDENTS
QUAND SUEZ JOUE AU BONNETEAU
Quatre intercommunalités Grand Paris Sud, Cœur d’Essonne, Val d’Yerres Val de Seine et Grand Orly Seine Bièvre, avec le soutien du département de l’Essonne, et de Paris Saclay sont engagés pour la réappropriation publique du Réseau Interconnecté sud Francilien (RISF). Mais Suez et sa filiale privée Eau du Sud Parisien joue au bonneteau pour pour y échapper en faisant gonfler artificiellement les profits. Par Philippe Rio, maire de Grigny et président de la régie publique de l’eau de Grand Paris Sud.
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SERVICE PUBLIC OU RENTABILITÉ FINANCIÈRE, IL FAUT CHOISIR
Après le beau meeting du 14 décembre 2023 à Grigny et le constat officiel de l’échec des négociations entre Eau du Sud Francilien et Suez, le lendemain à Evry, analyse de cette situation inédite avec Jacky Bortoli, Conseiller communautaire délégué en charge du cycle de l’eau de Grand Paris Sud.