Donner à l’Essonne, l’opportunité d’un progrès historique dans la maîtrise publique de notre bien commun vital, l’eau potable, c’est le vœu commun de l’association Eau Publique Orge Essonne et de la Coordination EAU Île-de-France.
L’année 2021 offre aux Essonnien.ne.s une possibilité exceptionnelle d’écrire l’histoire : En recouvrant la maîtrise du grand cycle de l’eau, le plus essentiel de nos biens communs.
Mesurer le chemin parcouru en 10 ans
En 2010, la totalité de l’Essonne, à l’exception du village de Boigneville, se trouvait l’emprise des multinationales pour son approvisionnement en eau potable.
Les captages souterrains, rendus impropres à la consommation par les intrants agricoles phytosanitaires et par la pollution, avaient dû fermer laissant le champ libre aux usines de Suez de repotabilisation de l’eau de la seine.
Suez au nord (80 % de la population) et Veolia au sud (les 20% restants), se mettaient d’accord pour imposer des prix exorbitants et se répartir les « délégations de service publics » communales,
En 2005, la condamnation par le conseil national de la concurrence de leurs pratiques d’abus de positions dominante en Essonne, ne les avait pas perturbé plus que çà.
10 ans plus tard, 5 régies publiques intercommunales de distribution d’eau potable ont vu le jour en Essonne au bénéfice de 400 000 habitants, et de milliers d’acteurs économiques. Un mouvement qui se poursuit avec la décision en décembre 2020 des communes de Corbeil-Essonnes et du Coudray-Montceau de rejoindre la régie publique de GPS (Grand Paris Sud).
Des résultats incontestables
Les résultats sont là : baisse du prix (de 4 % à 32%) de l’eau distribuée, politique rigoureuse de prévention, de repérage et réparation des fuites des réseaux, et une gestion enfin démocratique dans un domaine où l’opacité et les petits arrangements entre amis étaient la règle
Mobilisation citoyenne et volonté politique : le ticket gagnant
Cette évolution n’aurait pu voir le jour sans la prise de conscience et la mobilisation croissante d’habitants révoltés par le racket opérés sur nos factures d’eaux, ou par le gaspillage et la dégradation insupportables d’une ressource aussi précieuse ; Sans la détermination d’élus qui ont eu le courage de s’affranchir des intimidations ou des cadeaux de multinationales prêtes à tout pour préserver leurs profits. Malgré un rapport de force très défavorable aux collectivités locales dans ce domaine, la preuve est fournie que la puissance publique, quand elle s’appuie sur les habitants, peut faire prévaloir l’intérêt général sur la loi du marché.
En 2021 : nouveau progrès ou reculade ?
L’année 2021 peut en apporter une nouvelle fois la preuve….à condition que les essonniens, une fois encore, s’en mêlent !
Car Suez et Veolia sont à la manœuvre en Essonne pour restaurer leurs marges bénéficiaires menacées par le mouvement de retour de l’eau en gestion publique. Leur mainmise sur la production d’eau leur permet d’imposer aux régies un prix de vente de l’eau en sortie d’usine estimé à plus du double du prix de revient. Il leur permet de prétendus « progrès » techniques pour imposer une hausse des prix annihilant la baisse obtenue par la gestion publique.
Les collectivités essonniennes n’ont le droit ni à la désunion ni à l’échec
Face à cette offensive, le Conseil Départemental, les 4 grandes communautés d’agglomération essonniennes (Grand Paris Sud, Paris Saclay, Val de Seine-Val d’Yerres et Coeur d’Essonne) et enfin l’Etablissement public territorial Grand-Orly-Seine-Bièvre qui compte les communes du nord- essonne) peuvent et doivent urgemment s’entendre pour construire l’outil public de production d’eau potable indispensable à la lutte contre le changement climatique et à la distribution de notre eau, enfin, à son coût réel.
Une conjonction sans précédent de conditions favorables
Ne sous-estimons pas nos atouts pour nous émanciper de la tutelle des multinationales ici et maintenant :
* la coopération entre Eau de Paris, et les régies de Grand Paris sud et Cœur d’Essonne, pour se partager, les eaux de source excédentaires des aqueducs de la Vanne et du Loing qui traversent notre département,
* les possibilités de reprise en gestion publique et d’exploitation de captages sur la rivière Essonne,
* et surtout, surtout, les moyens de reprendre en propriété 100 % publique les ouvrages de production et transport d’eau potable du Sud francilien détenus aujourd’hui par Suez, à commencer par l’usine de Morsang sur Seine au centre de ce réseau.
Eau sans frontières
L’eau n’a que faire des découpages administratifs ou des rivalités entre institutions : les bassins versants de nos cours d’eau , l’Yerres, l’Orge et l’Yvette, et plus encore celui de la Seine transcendent les frontières départementales. La révision en 2021 des SAGE (schémas d’aménagement et de gestion de l’eau ) de nos rivières , celle du programme de prévention des inondations de l’établissement public « Seine et grands lacs », méritent un débat public et des réorientations en toute transparence . Les risques d’inondations ou de pollution, les enjeux de préservation de la ressource en eau exigent une vision à long terme dont sont incapables les actionnaires des entreprises privées obnubilés par leurs dividendes.
En se déchirant sur le terrain financier avec le concours de fonds vautours, Veolia et Suez, ont perdu toute crédibilité pour prendre en charge des services et des politiques publiques répondant à l’urgence sociale et climatique.
Les Essonnien.ne.s aussi, ont droit à des choix politiques guidés par l’intérêt général
En 2020, les exécutifs des principales collectivités et intercommunalités ont réussi à laisser de côté leurs rivalités pour réfléchir ensemble à la maîtrise de l’eau potable en Essonne
Il serait dramatique et même irresponsable de ne pas mener à bien cet objectif en 2021 et de capituler face aux pressions des multinationales.
L’Essonne a trop vu dans le passé son image altérée par des élus dévoyant leur mandat au bénéfice d’ambitions personnelles, d’intérêts partisans, ou de complicités politico-financières
En 2021, l’occasion nous est offerte de tirer un trait sur ces pratiques détestables et de redonner à la politique locale ses lettres de noblesse, en redonnant aux essonniens leur maîtrise sur l’un nos biens communs essentiels, l’eau potable.
L’association Eau publique Orge Essonne et la Coordination Eau Île-de-France espèrent que les forces vives de notre département seront au rendez-vous pour gagner cette bataille.
Les citoyen.ne.s n’accepteront pas que ces questions soient tranchées à leur insu.
Les engagements des uns et des autres sur cette question constitueront un des éléments clés d’appréciation des électeurs des prochaines scrutins départemental et régional.
Sainte-Geneviève des Bois, le 5 janvier 2021