Quatre intercommunalités Grand Paris Sud, Cœur d’Essonne, Val d’Yerres Val de Seine et Grand Orly Seine Bièvre, avec le soutien du département de l’Essonne, et de Paris Saclay sont engagés pour la réappropriation publique du Réseau Interconnecté sud Francilien (RISF). Mais Suez et sa filiale privée Eau du Sud Parisien joue au bonneteau pour y échapper en faisant gonfler artificiellement les profits. Par Philippe Rio, maire de Grigny et président de la régie publique de l’eau de Grand Paris Sud.
En 2020, Suez revendique d’être propriétaire du Réseau Interconnecté sud Francilien (RISF) mais sans le prouver malgré un courrier resté sans réponse de Michel Bisson, Président de Grand Paris Sud.
En 2021, en interne, Suez dans le secret des affaires procède à une réévaluation des actifs du RISF pour faire monter ses actions. Cette réévaluation s’inscrit dans un contexte d’OPA sur Véolia et de création progressive d’un syndicat mixte fermé « Eau du Sud Francilien » comprenant Grand Paris Sud, Cœur d’Essonne, Val d’Yerres Val de Seine et Grand Orly Seine Bièvre pour une réappropriation publique.
En 2022, Suez fixe unilatéralement la valeur des actifs à 500 Millions et le tarif du m3 à 0,70€.
En novembre 2022, les 4 censeurs du SMF siégeant dans le CA d’Eau du Sud Parisien découvrent le pot aux roses. Le 14 novembre 2022, les censeurs des 4 intercommunalités écrivent à Madame Soussan, Directrice Générale de Suez :
« La facturation par la maison mère Suez de charges intitulées « Autres achats et charges externes » représentant 95 % des charges d’exploitation de la société ESP – sans plus de détail – ne contribue pas à la sincérité de présentation des comptes, indispensable à l’exercice de notre mission de censeur. Vous avez répondu le 13 juillet 2022 à nos interrogations du 11 avril 2022 sur le sujet, en laissant 60 % des charges de la société ESP sans autre justification que « la mise à disposition de l’outil industriel » par la maison mère à sa filiale ESP, ou encore « le coût de portage des actifs ». Derrière ces notions vous évoquez les amortissements, ce qui est légitime mais demande à être chiffré, sans l’impact d’une éventuelle réévaluation des actifs à laquelle vous auriez procédé en 2022. »
Suez au nom du « secret affaire » ne répond pas et demande à Michel Bisson et François Durovray un délai qui est accordé.
En 2023 Suez exige pour « une cession du RISF devenue éventuelle » , fixe son tarif assortie d’un contrat très longue durée pour garder une situation de monopole.
La justification de la réévaluation des actifs ne sera jamais fournie mais dans le tableau ci-dessous figure des éléments précieux du coût de production des usines d’eau de Suez.
Considérant tous ces manquements et comportement dilatoires des actionnaires de Suez, le SMF Eau du Sud Francilien écrit entre autre le 19 Octobre 2023 à Madame Soussan.
« Faute de cela, nous nous réservons le droit d’utiliser les voies et moyens à notre disposition pour engager des actions dont l’objectif in fine sera de permettre la réappropriation du réseau interconnecté par les collectivités et donc nos habitants ».
Ce combat est celui de la légitimité de la charge du service public de l’eau sur la base des propres chiffres des coûts de production de Suez et de sa filiale ESP qui doivent permettre d’imposer à Suez 0,50€ HT le prix de l’eau sur une durée de contrat de 4 ans.
Les valeurs des actifs ne sont ni plus ni moins que le montant de la VNC quand Suez pour 77895 m3 applique un prix moyen de 0,70€ HT le m3 sur le territoire desservi. Il encaisse alors 54 526 500€ sur l’année 2022 alors que sur la base du prix de revient moyen affiché dans ce tableau, l’eau ne devrait lui être payé que 21 810 600 euros.
Il faut mettre un terme à cette situation d’autant que Suez et ESP qui sont entre les mains des actionnaires Suez/Meridiam/GIP/CDC prétendent faire passer le prix de l’eau de 0,70€ le m3 en 2022 à 1,19€ en 2024.
Avec Jacky Bortoli, Conseiller communautaire délégué en charge du cycle de l’eau de Grand Paris Sud, nous serions fondés de proposer que notre SMF Eau du Sud Francilien crée en lieu et place de Eau du Sud Parisien, la filiale de Suez, une Société Publique Locale de production transport et stockage. Cela entrainerait un changement fondamental du modèle économique existant du service public de l’eau.
Philippe Rio
Rappel du contexte
Plusieurs collectivités du Sud Parisien (Grand Paris Sud, Val d’Yerres Val de Seine, Cœur d’Essonne, etc.) sont fournies en eau par Eau du Sud Parisien (ESP), une filiale à 100% de Suez. Le directeur d’ESP est désigné par le conseil d’administration de Suez. La société mère Suez loue à sa filiale, le réseau interconnecté du Sud parisien (RISF) et les usines de production d’eau potable: par ce mécanisme (et d’autres comme les charges), l’essentiel du cash remonte à la multinationale. Les collectivités desservies sont représentées par des censeurs, sans voix délibérative, au conseil d’administration d’ESP, ce qui devrait leur donner accès à toutes les informations sur leur collectivité et ce qui leur permet en tout cas d’interpeller l’entreprise. Philippe Rio est censeur pour Grand Paris Sud, Véronique Mayeur pour Cœur d’Essonne, Christophe Carrère pour Val d’Yerres, Val de Seine et Alexis Teillet pour Grand Orly Seine Bièvre.