Ce site exceptionnel situé à moins de deux kilomètres de Paris est toujours menacé par le projet de la région Île-de-France que Valérie Pécresse est venue présenter in situ le 29 septembre. Seul le discours a été verdi. Le mot « solarium » s’est transformé en « prairie », l’«île de loisirs » s’est transformée « en promenade immersive écologique » et le tiers de la forêt impactée est appelé « lisière ». La Coordination Eau Île-de-France qui fait partie du Collectif des amis de la forêt de la corniche des forts, détaille les enjeux liés à l’eau.
La Présidente de la région Île-de-France a confirmé la destruction de 4 hectares de forêt (soit environ 2000 arbres) pour réaliser une prairie artificielle et le comblement de 8 hectares de sous-sol sur 27 hectares de forêt, pour un coût annoncé de 14 millions d’euros. Les discours sur les plantes invasives, sur la dangerosité des carrières ou encore sur les frontières administratives entre les parcs du coteau ne peuvent justifier la destruction de cet écosystème et cautionner la faiblesse d’un projet d’une grande banalité, malgré l’importance des dépenses publiques engagées depuis les années 2000.
Création d’une plaque chauffante
La transformation de quatre hectares de forêt en prairie artificielle. Cette partie du site serait défrichée définitivement puis comblée par injection d’un coulis composé de sable et de lait de béton et pose de géogrilles. Des conséquences directes sont à prévoir pour les températures : le sol constitué d’une fine couche de terre sur des remblais reposant eux-mêmes sur du béton, se transformerait en plaque chauffante, emmagasinant la chaleur du soleil puis la restituant la nuit notamment, en période de canicule. L’actuel îlot de fraîcheur que constitue la forêt se transformerait en îlot de chaleur urbaine !
Imperméabilisation des sols
Un autre sujet de préoccupation est l’imperméabilisation des sols résultant des comblements et de la pose de géogrilles sur la partie prairie mais aussi sur toute la partie improprement appelée lisière ; au total, l’aménagement concerne 8 ha. L’avis de la Mission régionale de l’autorité environnementale (MRAe) du 28 mai 2018 indique la nécessité « dès ce stade d’avancement du projet, de traiter les enjeux liés à l’eau, traitement qui ne saurait être renvoyé à la procédure loi sur l’eau, notamment la gestion des eaux pluviales et des écoulements existant actuellement sur le site ». L’avis de la MRAe indique aussi que « la surface d’imperméabilisation supplémentaire n’est pas chiffrée ». L’existence d’une note à ce sujet est mentionnée mais pas jointe au dossier ! L’eau de ruissellement serait stockée dans des bassins de rétention avant de rejoindre un réseau d’assainissement, déjà saturé quand il pleut. C’est ce processus d’imperméabilisation des sols et d’accélération des flux qui favorise les inondations. L’avis de la MRAe fait le même constat : « L’aménagement du parc va modifier le tracé des écoulements des eaux pluviales et augmenter les quantités d’eaux de ruissellement, du fait de l’imperméabilisation des sols par rapport à l’état initial, du comblement des fontis et de la modification de la nature des sols en raison du défrichement. » Ce n’est pas une bonne nouvelle.
Drainer les eaux pluviales, c’est créer des problèmes, pas les résoudre!
Forage dans une nappe stratégique pour l’alimentation en eau potable
Enfin l’avis de la MRAe se réfère à une demande de forage déposée en 2016 que nous avons pu examiner. Le prélèvement devrait se faire dans la nappe des sables de l’yprésien située entre 70 et 100m de profondeur. Il s’agit d’une eau de qualité, une ressource précieuse utilisée pour l’alimentation en eau potable. Cette masse d’eau souterraine fait partie des nappes stratégiques à protéger et à réserver pour l’alimentation en eau potable future. Malgré cela, un prélèvement de 50 000m3 est prévu sur quatre mois pour la fabrication du ciment. Plus inquiétant encore, il est suggéré que le forage soit conservé « pour les phases futures des travaux » et évoqué « des potentiels travaux de comblement des cavités » à plus grande échelle ! Il faut noter aussi le rejet d’eaux d’exhaure (environ 2500m3) dans le réseau d’assainissement qui décidément va être mis à rude épreuve.
Stress hydrique pour les arbres
Les arbres préservés par les travaux d’aménagement risquent de ne pas survivre longtemps. En effet, une forêt constitue un milieu continu où les échanges d’eau et de substances nutritives entre les arbres, via le réseau souterrain du mycélium, sont permanents et concourent à la bonne santé des arbres, à la préservation d’un sous-sol humide, à la captation et au stockage de l’eau infiltrée depuis la surface.
Or les injections de sable mélangé à du ciment produiront des zones d’imperméabilisation qui risquent d’interrompre le continuum souterrain reliant les arbres entre eux et de provoquer leur mort.
Lire le communiqué des Amis de la corniche des forts du 1er octobre 2018