Alors que la pollution liée aux pesticides augmente et que les sécheresses sont récurrentes, des collectivités organisatrices du service public de l’eau plaident, dans une tribune au « Monde », pour la sanctuarisation des aires d’alimentation de captages et pour une transition agroécologique.
La crise de l’eau n’est plus un risque, c’est une réalité. En 2022, outre une sécheresse historique, plus de 10 millions de Français ont consommé une eau non conforme aux limites de qualité, bien que sans danger imminent, principalement en raison d’excès de pesticides et de leurs métabolites. Ces molécules qui ont fait décoller les rendements agricoles au XXe siècle, promettant une nourriture en quantité pour tous, s’accumulent et persistent dans les sols et les ressources en eau, créant ainsi un cocktail nocif dont l’impact sur la santé humaine et environnementale est scientifiquement confirmé.
Certaines molécules, impossibles à éliminer raisonnablement aujourd’hui pour des raisons techniques et financières, sont à l’origine de plusieurs fermetures de captages alors que l’eau manque. Force est de constater que les crises de la qualité de l’eau, résultat de pollutions diffuses et persistantes, et de sa rareté s’intensifient sous l’effet du changement climatique, conduisant à une crise structurelle de l’eau.
Risque sanitaire et environnemental
Ces cinq dernières années, la recherche de polluants dans l’eau s’est intensifiée et a ainsi révélé la dégradation massive de la qualité des eaux. Dernièrement, la recherche de plusieurs métabolites de pesticides dans l’eau a mis en péril la distribution d’une eau de qualité au robinet. Plus récemment encore, des pollutions industrielles par les « polluants éternels », PFAS notamment [les substances per et polyfluoroalkylées, une famille de composés ultratoxiques employés dans une multitude de produits et d’usages], sont venues noircir le tableau. Le risque sanitaire et environnemental de ces multiples pollutions est élevé compte tenu de l’ampleur de la contamination et des incertitudes qui pèsent sur leurs effets cumulés.
En 2021, une expertise collective menée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a mis en évidence des conséquences fortes notamment sur la santé des professionnels qui utilisent les pesticides, et sur les femmes enceintes et leurs enfants à naître. Elle conclut notamment que « la confirmation et la mise en évidence de présomptions fortes de liens entre certaines pathologies et l’exposition aux pesticides doivent orienter les actions publiques vers une meilleure protection des populations ».