Jusqu’à la dernière goutte

Pour prolonger une exploitation pétrolière vieillissante, à la production anecdotique, le gouvernement a autorisé le forage de deux nouveaux puits à travers une nappe phréatique qui alimente plusieurs bourgs de Seine et Marne et plus d’une centaine de milliers d’habitant.e.s du centre et de l’ouest de Paris.  Une menace  majeure contre laquelle alerte Dan Lert, Président d’Eau de Paris. Dossier de Libération, message vidéo de Dan Lert, débat à l’assemblée nationale entre la députée Sandrine Rousseau et le ministre Roland Lescure. «On peut vivre sans pétrole, mais on ne peut pas vivre sans eau, déclare le maire de Villemer, Franck Beaufreton. A un moment donné, il serait temps de revoir l’ordre des priorités.»

L’édito de Dov Alfon

En Seine-et-Marne, le pétrole va couler à flotte

L’eau, une ressource essentielle et menacée – dossier

En autorisant discrètement de nouveaux puits qui risquent de contaminer la source d’eau potable à proximité, l’Etat consacre une aberration environnementale et sanitaire.

Première révélation de l’enquête que nous publions aujourd’hui : le gouvernement se croit revenu en 1974. Valéry Giscard d’Estaing est donc président, et s’étonne de la crise pétrolière, alors que la politique qu’il avait mise en place comme ministre de l’Economie a inondé la France de mazout et alimenté l’euphorie des constructeurs automobiles. Face à la crise, il faut sacraliser le pétrole, et vite.

Deuxième révélation : c’est maintenant chose faite, avec cinquante ans de retard. Le gouvernement a en effet approuvé en catimini l’élargissement sur un périmètre cinq fois plus vaste qu’auparavant d’une concession pétrolière près de la forêt de Fontainebleau. C’est pendant la trêve des confiseurs, le 27 décembre, que la Première ministre Elisabeth Borne a signé un décret favorisant le forage de deux nouveaux puits de pétrole en Seine-et-Marne, vite contresigné par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, et par Agnès Pannier-Runacher, alors ministre de la Transition énergétique. Petit problème, la France ne manque plus de pétrole (de toute façon, les concessions dans l’Hexagone fournissent à peine 1 % de notre consommation en hydrocarbures), car en 2024, la vraie pénurie que commencent à ressentir les Français est celle de l’eau.

D’où notre troisième révélation : ce projet menace la nappe phréatique directement à des points de captage qui permettent d’alimenter en eau potable plus de 180 000 Franciliens, de la commune voisine au VIIe arrondissement de Paris. Sans surprise, l’établissement public Eau de Paris entend s’opposer maintenant à cette initiative nostalgique qui pourrait vite tourner à la catastrophe écologique. Giscard, au moins, s’était rendu à l’idée qu’en France «on n’a pas de pétrole, mais on a des idées» ; cette aberration gouvernementale pourrait prouver que certaines de ces idées françaises gagneraient à rester profondément enfouies avec nos restes de pétrole, histoire d’être enfin en phase avec notre époque.


Seine-et-Marne : comment un forage pétrolier autorisé par l’Etat menace une nappe phréatique qui alimente Paris

L’eau, une ressource essentielle et menacée –dossier

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Interview

«C’est une catastrophe écologique en puissance, une menace sur l’eau potable»

Adjoint à la Transition écologique de Paris et président d’Eau de Paris, Dan Lert conteste la décision de l’Etat d’étendre un site pétrolier en Seine-et-Marne. Il estime que les nouveaux forages pourraient polluer une nappe phréatique qui alimente les robinets de dizaines de milliers d’habitants de la capitale.

La Ville de Paris se lance dans une bataille de l’eau contre l’Etat. Après avoir découvert que celui-ci venait d’autoriser l’extension du site pétrolier de la PME Bridge Energies en Seine-et-Marne, pourtant tout proche d’une nappe phréatique alimentant 180 000 Franciliens, l’établissement public Eau de Paris a formé deux recours auprès du tribunal administratif de Melun. Le président de la régie, Dan Lert, par ailleurs élu Les Ecologistes et adjoint chargé de la Transition écologique auprès de la maire Anne Hidalgo, estime que les deux nouveaux forages menacent la qualité des ressources en eau.

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