Archives de catégorie : Batailles pour une gestion publique

Pour un service public métropolitain de l’eau

La Ville de Paris s’apprête à renouveler son contrat d’objectif avec sa régie municipale. Après cinq ans d’existence, ce modèle a désormais vocation à s’étendre aux communes du Grand Paris. Une tribune de Célia Blauel parue dans Les Échos le 6 février.

« Il y a tout juste 5 ans, la Ville de Paris créait Eau de Paris, première entreprise publique européenne d’eau potable avec plus de 3 millions d’usagers quotidiens. La régie Eau de Paris incarne aujourd’hui la réussite d’un modèle intégré maitrisant l’ensemble de la filière de production et de distribution d’eau potable, dans le double objectif de protéger la ressource et d’en assurer l’accès à tous.
En faisant le choix d’une gestion directe du service de l’eau par un opérateur unique, Paris a marqué une rupture dans le rapport jusque-là entretenu par la plupart des villes avec cette ressource rare en se fondant sur un principe politique fort : l’eau, ressource naturelle par excellence, reconnue comme un bien commun universel, a besoin d’une pleine maîtrise publique dans sa gestion.
En créant ce véritable service public parisien de l’eau, Paris et sa régie décidaient de placer l’usager au cœur de leur démarche, grâce à une gestion exemplaire, à la fois transparente et ouverte.

Remunicipalisation

Ainsi, les représentants d’usagers détiennent désormais des voix délibératives au sein d’Eau de Paris. Et l’Observatoire Parisien de l’Eau, qui rassemble tous les acteurs et institutions de la filière, lieu majeur de débat, d’information, de concertation et d’études, est associé à toutes les étapes de la vie de la régie publique.
L’exigence démocratique et de transparence dans la gestion publique de l’eau a constitué le socle fondamental de la remunicipalisation. L’exigence environnementale et la responsabilité sociale en sont les corolaires indissociables.
La Ville de Paris renouvelle en février 2015 son contrat d’objectif avec sa régie Eau de Paris. Cet acte 2 de la remunicipalisation répond aux enjeux contemporains, en particulier la préservation de la ressource, l’adaptation au réchauffement climatique et l’accès de tous à l’eau potable.
Dans un contexte de raréfaction de la ressource en eau potable, et alors que le plan national d’adaptation au changement climatique adopté en 2011 a fixé un objectif d’économiser 20 % de l’eau prélevée à l’horizon 2020, la régie Eau de Paris s’engage également en développant parallèlement son réseau d’eau non-potable, aussi utile pour les services urbains quotidiens qu’en cas de pics de chaleur.

Moins de 1 euro/m3
Depuis sa création, la régie publique Eau de Paris s’est résolument mobilisée pour faire face aux mutations démocratiques, environnementales, sociales auxquelles sont confrontés les services publics locaux. A Paris et en Ile de France, avec la construction de la métropole du Grand Paris, ces mutations sont également urbaines et territoriales. Le Grand Paris sera, n’en doutons pas, l’occasion de mettre en débat l’avenir de nos ressources naturelles et des besoins sociaux des habitants de la métropole. L’accès à l’eau fait partie de ces grands enjeux.
La gestion publique, choisie et assumée, permet aux parisiens de bénéficier aujourd’hui d’une eau de qualité à un juste coût, inférieur à 1euro / mètre cube. Ce n’est pas le fruit du hasard si ce prix demeure le moins cher de la métropole, là où partout ailleurs le choix a été fait de déléguer le service aux multinationales de l’eau.
Alors qu’une récente étude montre que la remunicipalisation des services d’eau ou d’assainissement s’inscrit dans un mouvement mondial, passant de 3 villes en 2000 à 180 en 2014 dont 49 en France et 59 aux USA, en tête du podium, il n’est pas étonnant que les multinationales de l’eau saisissent la perspective du Grand Paris pour tenter de reprendre la main.
Alors oui disons-le nettement : le modèle de la gestion publique de l’eau, dont Eau de Paris est aujourd’hui la traduction concrète de son efficience économique et de son exemplarité sociale et environnementale, a vocation à s’étendre à la Métropole du Grand Paris. Eau de Paris se prépare à accueillir les collectivités qui feront le choix de ce modèle. Cela permettrait notamment d’harmoniser vers le bas les tarifs dans la Métropole au bénéfice des Grand Parisiens, et d’agir plus efficacement contre la pollution de l’eau.  C’est un enjeu démocratique majeur. C’est aussi une garantie pour l’avenir de la ressource vitale qu’est l’eau. »

Célia Blauel, est adjointe à la Maire de Paris chargée de l’environnement, du développement durable, de l’eau, de la politique des canaux et du plan climat énergie territorial, et présidente de la régie Eau de Paris

Bagnolet: le conseil municipal se prononce contre les coupures d’eau

Par un vœu adopté à l’unanimité jeudi 29 janvier, le Conseil municipal de Bagnolet demande au gouvernement de rappeler avec fermeté la loi qui interdit les coupures d’eau pour impayés, dans les résidences principales, tout au long de l’année, aux distributeurs d’eau. Le Conseil municipal de Bagnolet demande au Président du SEDIF d’appliquer un moratoire immédiat sur les coupures d’eau et d’organiser un débat à ce sujet au sein du conseil syndical.

Le vœu, présenté par Bagnolet initiatives citoyennes -EELV, était motivé ainsi:

« Nombre de familles rencontrent des difficultés pour payer leurs services essentiels comme la fourniture d’eau et sont confrontées à la violence insupportable des coupures d’eau dans leur lutte pour les surmonter.

Depuis six mois, la Fondation France Libertés et la Coordination Eau Île-de-France ont recueillis près de 500 témoignages de cette pratique devenue illégale avec la loi Brottes d’avril 2013.

Personnes âgées isolées, personnes handicapées, familles nombreuses avec des enfants en bas âge, patients hospitalisés, etc., les coupures d’eau sont appliquées sans discernement et sans humanité. Les conséquences sont dramatiques dans tous les cas, pour l’hygiène, la santé, les enfants qui peuvent être déscolarisés, les adultes qui se désocialisent…

Le tribunal de Thionville vient de condamner le propriétaire et la régie publique d’une famille soutenue par les associations. C’est une décision extrêmement représentative de ce qui se passe pour plus de 120 000 familles par an.

L’exemple est fort car Mme M. règle son loyer chaque mois, paye ses charges aux échéances prévues, et s’est vue couper l’eau parce qu’il y avait un conflit entre son propriétaire et sa régie. Le juge a bien évidemment condamné cette pratique, mais qu’en est-il des nombreux cas pour lesquels les distributeurs ont fait pression sur les locataires afin qu’ils payent, eux-mêmes, la dette de leur syndic pour pouvoir retrouver l’eau ? Il s’agit d’un racket, d’une utilisation de la force pour récupérer quelques centaines ou quelques milliers d’euros.

Alors que les attentats de ce début janvier sont présents dans nos esprits et nos cœurs, alors que l’on nous annonce des décisions sécuritaires avec plus de protection contre une menace invisible, nous avons aussi le devoir d’inventer de nouveaux chemins de paix et de réconciliation pour moins de violence.

Pour la mise en œuvre du service public de l’eau, nous demandons que cesse l’injustice et que les distributeurs d’eau saisissent l’opportunité de cette grande réconciliation possible avec leurs clients. Nous ne pouvons nous satisfaire d’un service public qui ne voit dans le recouvrement de ses factures qu’un rapport de force qui l’oblige régulièrement à prendre ses propres clients en otage, alors que ces coupures d’eau sont reconnues illégales par la loi.

En effet, l’article L115-3 du Code de l’action sociale et de la famille (CASP) a été modifié par la loi n°2013-312 du 15 avril 2013-art.19 (dite loi Brottes) et comprend le paragraphe suivant, tout à fait clair sur le fond :

« Du 1er novembre de chaque année au 15 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement de factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou aux familles. Les fournisseurs d’électricité peuvent néanmoins procéder à une réduction de puissance, sauf pour les consommateurs mentionnés à l’article L 337-3 du code de l’énergie. Un décret définit les modes d’application du présent alinéa. Ces dispositions s’appliquent aux distributeurs d’eau pour la distribution d’eau tout au long de l’année. »

La lecture de cet article montre sans ambiguïté qu’il est interdit d’interrompre la distribution d’eau tout au long de l’année dans une résidence principale, pour tous les abonnés.

Malheureusement les coupures d’eau continuent ; certains distributeurs d’eau recourent toujours et de façon massive aux coupures d’eau pour recouvrer les impayés. Par exemple, à Saint-Denis, ville qui fait partie du SEDIF, il y avait 15 avis de coupures d’eau entre le 12 et le 20 janvier !

Gérard Cosme, président de la Communauté d’agglomération Est Ensemble, a d’ailleurs rédigé un courrier à M. Santini, président du Syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF), demandant « un moratoire sur les coupures d’eau » et proposant un débat au sein des instances du Syndicat.

Ces faits concernent l’habitat individuel mais aussi l’habitat collectif, comme c’est le cas dans les exemples ci-dessous, dans notre département :

– Gagny (93) : un immeuble a subi trois coupures d’eau pour cause d’impayés de la part de certains propriétaires.
– Montfermeil (93) : menace de coupure d’eau dans tout l’immeuble pour impayés de deux factures.
– La Courneuve (93) : le syndic n’a pas réglé la facture d’eau et les 19 foyers de la copropriété ont subi deux coupures d’eau.

– Saint Denis (93) : un immeuble resté sans eau pendant près d’une semaine à cause d’un impayé de la part du syndic pour quelques propriétaires négligents qui ne payaient pas leur part de charges.
– Montreuil (93) : un immeuble menacé de coupure d’eau suite à une facture bien trop élevée que les locataires et propriétaires tentaient de clarifier avant de payer, sans succès : silence de Veolia. La facture a finalement été réglée sans plus d’information sur sa justification.

– Saint Ouen (93) : Suite à un retard de règlement de la part du syndic, cette copropriété s’est trouvée privée d’eau pendant plusieurs jours.

Suite à l’action de la fondation France Libertés et de la Coordination Eau Île-de-France, quatre jugements en référé ont déjà condamné des distributeurs d’eau à rétablir le service, quelle que soit la situation de l’abonné (déclaré ou non en situation de précarité). En outre, Suez a été condamné à 8000€ d’amende par le tribunal de Soissons, Veolia a été condamné à 9620€ d’amende par le tribunal de Bourges, la régie Noréade a été condamnée à 5501€ d’amende. par le tribunal de Valenciennes, le Syndicat des Eaux et Assainissement de Fontoy-Vallée de la Fensch a été condamné à 1700€ d’amende par le tribunal de Thionville.

Les distributeurs doivent cesser maintenant les coupures d’eau, trouver les modes opératoires leur permettant de se réconcilier avec les usagers et tisser les liens qui sont nécessaires au bon fonctionnement de notre société afin que nous trouvions, ensemble, les moyens d’aider ceux qui n’arrivent pas à payer leurs factures. »

Grâce à la régie publique, l’eau moins chère à Limay…

La régie publique de Limay-Guitrancourt  vient de décider de rendre gratuits les premiers m3 de la consommation d’eau domestique pour tous les habitants (soit 50 € en moins sur la base d’une moyenne de 120 m 3 par an). Le « manque à gagner » sera compensé par une hausse légère du prix du m 3 pour les entreprises, grosses consommatrices et grosses « pollueuses » de l’eau qui doit être traitée avant d’être rejetée dans la Seine. Lire l'article du Parisien du 17 janvier 2015
Dans le même temps, la Communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines (CAMY) a augmenté ses tarifs en moyenne de 2 %. Les bénéfices des délégataires privés (Veolia et Suez-LDE…) s »élèvent à 800 000 € pour l’année 2013, alors que les dépenses d’entretien correspondent à un taux de 0,02 % du réseau pour Suez et de 0,1 % pour Veolia !
Résultat, le rendement global du réseau n’est que de 79,7 %, soit 20,3 % de fuites et de pertes… payées par les consommateurs, c’est à dire 1,5 million de m3. (Source : CARE 2013).

Que dire de plus?

Après la baisse des tarifs obtenue en 2011 dans la CAMY… (pour mieux justifier la reconduction des contrats avec les délégataires privés), tout redevient comme avant : hausse des prix, bénéfices conséquents pour les entreprises, absence d’entretien, fuites…

L’ AG 2015 de l’AREP-CAMY  aura à décider des moyens de reprendre la campagne pour le retour de l’eau en régie publique dans la CAMY.

Lettre ouverte de l’association « Les Mur’eau » à la Maire de Meulan (78)

« Vous allez proposer au conseil municipal de se prononcer sur la gestion du service public de l’eau potable pour la ville de Meulan.

Vous avez l’opportunité de diminuer sensiblement la facture d’eau de vos administrés, tout en participant à l’évolution de la société initiée par le forum alternatif mondial de l’eau qui s’est tenu du 14 au 17 mars 2012 à Marseille.  Nous nous permettons de vous citer  quelques extraits de la déclaration finale :

«… nous partageons une vision commune de l’eau. Nous la considérons comme un bien commun et non comme une marchandise. »

« …l’eau est la condition de toute vie sur la planète et que le droit à l’eau et à l’assainissement est un droit humain fondamental et inaliénable ; nous insistons sur le fait que la solidarité entre générations présentes et futures doit être garantie ; nous rejetons toute forme de privatisation de l’eau et déclarons que la gestion et le contrôle de l’eau doivent être publics, coopératifs, participatifs, équitables et non orientés vers le profit. »

« …Nous considérons qu’il est urgent et indispensable d’instaurer une « démocratie réelle: les populations concernées doivent participer et se prononcer sur les décisions portant sur l’usage, le partage et la protection de l’eau, comme, par exemple, le choix du mode de gestion ou la réalisation  d’un grand projet. Les citoyens et les associations doivent être parties prenantes de la gestion de l’eau. »

Dans cette dynamique, une bonne centaine de collectivités locales françaises ont repris la gestion de l’eau en régie publique (Castres, Saint Malo et Nice… mais aussi, Grenoble, les lacs de l’Essonne, Rouen, Paris…).

Vous pouvez engager, dés maintenant, un audit de l’existant et une étude de transfert en régie publique, dont le coût peut être financé en partie par le Conseil Régional.

Nous sommes une association loi 1901 qui a commencé son action sur la ville des Mureaux, et nous avons l’objectif de l’étendre à tout le territoire environnant. Nous sommes à votre disposition pour vous présenter les enjeux et les avantages pour la collectivité de la mise en place d’une telle régie.

La comparaison des tarifs entre des délégations de service public confiées à des sociétés privées et des régies montre que près de 150€ d’économie annuelle sont envisageables par famille.

Près d’ici, le Maire de Courgent avait signé un contrat qui transférait au privé une régie publique. Le coût de du m3 d’eau avait été multiplié par deux pour les usagers. Ils ont obtenu, devant la justice, la résiliation du contrat. »

A Viry-Châtillon (91), la guerre de l’eau est relancée

La nouvelle majorité (UDI-UMP) lance une étude sur la régie publique de l’eau, une des seules de ce type en France. Parmi les pistes envisagées : redonner les clés aux grands groupes privés.

Viry, samedi. La régie publique d’eau a été créée le 1er janvier 2011 par Gabriel Amard, l’ancien maire (Parti de gauche). La nouvelle équipe municipale et intercommunale (UDI-UMP) n’exclut pas une sortie partielle ou totale de ce mode de gestion.
Viry, samedi. La régie publique d’eau a été créée le 1er janvier 2011 par Gabriel Amard, l’ancien maire (Parti de gauche). La nouvelle équipe municipale et intercommunale (UDI-UMP) n’exclut pas une sortie partielle ou totale de ce mode de gestion. (LP/F.M.)

Le Mée sur Seine (77): reculer pour mieux sauter?

Le Mée-sur-Seine Six mois de pression pour faire baisser le prix de l’eau Le conseil municipal a prolongé le contrat avec Véolia de six mois pour continuer de négocier sur le prix de l’eau.

« Nous n’avons reçu, pour l’instant, qu’une seule offre, celle la Société des Eaux de Melun (filiale de Véolia Environnement, ndlr). Les tarifs proposés sont en augmentation de 6 %. Nous ne pouvons donc pas accepter cette offre et proposons de poursuivre les négociations », a expliqué Michel Billecocq, adjoint à l’aménagement du territoire. Le conseil municipal, mis à part les membres de l’opposition socialiste, a ainsi voté le prolongement du contrat actuel pour une durée de six mois dans le but de poursuivre les négociations. Auparavant, les membres du conseil municipal avaient décidé de renouveler la convention qui lie la commune avec celle de Melun pour l’approvisionnement en eau. La ville du Mée ne disposant pas de ressources en eau, elle doit l’acheter à la ville préfecture. « La convention liant la ville avec celle de Melun est d’une durée de vingt ans. Melun souhaite construire une usine de traitement des eaux de la Seine », a indiqué l’adjoint à l’aménagement du territoire. Les Méens devraient donc boire l’eau traitée de la Seine, comme de nombreuses autres communes.

Faire pression sur Véolia

L’opposition socialiste s’est abstenue sur toutes les délibérations concernant la délégation de service public pour la distribution en eau. Elle estime que, pour faire baisser le prix de l’eau, il ne faut pas re-signer pour un contrat long mais pour contrat de trois ans. « Le dossier est complexe mais ce que l’on peut dire quand même c’est que le prix de l’eau est trop élevé » a déclaré Robert Samyn, membre de l’opposition socialiste. À terme, il faut confier la compétence à l’agglomération et donc se limiter à une DSP de trois ans ». Jean-Pierre Guérin, membre de l’opposition socialiste, a lui aussi pris la parole pour manifester son désaccord.« Le prix de l’eau au Mée est de 4,79  €/m3. C’est un prix élevé. Pour le faire baisser, il faut favoriser la concurrence ou étudier une mise en régie. Il faut faire pression sur Véolia pour qu’ils baissent le prix de l’eau. Étudier une mise en régie peut les faire réfléchir ».

En attendant, c’est bien un nouveau contrat de six mois que la mairie s’apprête à signer avec Véolia pour continuer les négociations. Reste à voir si cette méthode permettra de faire baisser le prix de l’eau au Mée-sur-Seine. Résultats attendus dans six mois.

Publié par La République du 77, le 31 décembre 2014