Du 28 au 29 novembre, une délégation de la Coordination EAU Île-de-France a participé à la première réunion européenne des Communautés Bleues à Bruxelles, une initiative soutenue par le projet “Blue Planet”, la Fédération européenne des syndicats des services publics (EPSU), le Conseil mondial des Eglises, l’Eglise réformée de Suisse et la Région de Bruxelles Capitale.
La réunion des acteurs des communautés bleues dans les locaux de Vivaqua à Bruxelles.
Les “Communautés Bleues” proviennent d’une initiative conjointe du Conseil des Canadiens et du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), ayant pour objectif de protéger les services publics d’approvisionnement en eau et de défier l’industrie de l’eau embouteillée.
Ce projet encourage les municipalités et les communautés à se doter d’un cadre reconnaissant l’eau comme un bien commun en adoptant des résolutions afin de :
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reconnaître le droit à l’eau et à l’assainissement.
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bannir ou éliminer progressivement la vente d’eau embouteillée dans les établissements municipaux et lors des activités municipales.
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promouvoir les services d’eau et d’eaux usées, financés, détenus et exploités par les collectivités publiques.
Pour l’instant, 60 communautés ont reçu la certification “Communauté Bleue” à travers le monde (dont Berne en 2013, Paris en 2016, Munich en 2017, Berlin et Madrid en 2018, Montréal et Los Angeles en 2019 pour n’en citer que quelques uns).
Bruxelles communauté bleue
Cette rencontre a rassemblé 49 acteurs de l’eau de plus de 40 organisations européennes dans les locaux de Vivaqua, l’opérateur public en charge de la gestion de l’eau et de l’assainissement à Bruxelles. C’est la reconnaissance de la région de Bruxelles Capitale (comprenant 19 municipalités dont la ville de Bruxelles) comme Communauté Bleue qui a permis cette réunion. L’initiative revient à six étudiant.e.s d’une école de communication et de journalisme bruxelloise (l’IHECS) travaillant sur l’accès à l’eau dans la capitale. Ils ont réussi à convaincre les autorités régionales d’intégrer le réseau mondial des communautés bleues.
Lors d’une conférence de presse le vendredi 29 Novembre, le ministre-président Rudi Vervoort a annoncé dans le cadre de son engagement à devenir Communauté Bleue, le non-renouvellement à la fin du contrat en 2027 du partenariat avec Veolia qui gère encore une usine d’assainissement. La région de Bruxelles gère déjà de façon publique via Vivaqua son réseau d’eau et d’assainissement ; cette annonce signe le retour total à la gestion publique de l’eau et de l’assainissement de la région. En promettant également l’installation de nombreuses fontaines et douches, l’interdiction de la vente d’eau embouteillée dans les établissements publics et lors d’événements municipaux, la région Bruxelloise a été reconnue Communauté Bleue.
Maude Barlow, présidente du Conseil des Canadiens, décerne le certificat des communautés bleues au ministre-président de la région bruxelloise, Jonathan Biermann.
Un représentant de Vivaqua, Jonathan Biermann, a reconnu que les coupures d’eau pour impayés (encore très répandues : 900 en 2018 pour la région Bruxelles capitale qui compte 1,2 millions d’habitant-es) sont problématiques et que l’organisme fera en sorte que personne ne soit privé d’accès à l’eau. Les étudiant.e.s de l’IHECS ont souligné leur détermination à ce que Vivaqua cesse totalement ses coupures, et vont continuer les négociations dans ce sens avec les agents publics.
Un mouvement qui se répand en Europe
Alors que le mouvement est né au Canada, les Communautés Bleues se multiplient à travers l’Europe. Ces deux jours de conférences étaient l’occasion de se rencontrer pour les acteurs de ce mouvement, de partager leurs expériences diverses, ainsi que de mobiliser d’autres à faire de même dans leurs collectivités. Ensemble, les Communautés Bleues européennes ont décidé de collaborer, d’échanger davantage et de nommer un coordinateur européen qui pourra faciliter la tâche à toute collectivité européenne souhaitant rejoindre le mouvement. Grâce à la présence de Marcela Olivera de Bolivie ainsi que de Samuel Ventura d’El Salvador qui mènent le projet des Communautés Bleues en Amérique latine via le biais d’un réseau de coopératives rurales et communales de l’eau, la discussion a porté également sur les opportunités de collaboration et d’entraide globale.
De g à d, Jean-Claude Oliva, Directeur de la Coordination EAU Île-de-France, Maude Barlow, présidente du Conseil des Canadiens, et Dinesh Suna du Conseil mondial des Eglises.
Cette réunion d’une multitude d’acteurs Européens a aussi été l’occasion de réunir les membres du Mouvement européen pour l’eau, un réseau d’organisations qui intervient sur les politiques de l’eau au niveau européen. Interpeller et former les élus par rapport à ces sujets est crucial dans le contexte des renégociations de la directive-cadre de l’eau de 2000.
Rappelons que la Coordination EAU Île-de-France a été à l’origine de la reconnaissance de Paris en tant que Communauté Bleue en 2016. En effet, Paris est exemplaire dans l’accès à l’eau qu’elle donne à ses habitants avec ses 1152 fontaines et la transparence de sa gestion publique de l’eau. A la suite de cette reconnaissance, la Mairie de Paris ainsi qu’Eau de Paris soutiennent un projet découlant des Communautés Bleues: les Universités Bleues.
Les universités bleues
En reconnaissant le droit humain à l’eau, en ayant un accès gratuit et pratique à l’eau grâce à l’installation de fontaines à eau directement branchées sur le réseau de distribution, et en arrêtant la distribution et la vente de bouteilles d’eau en plastique sur ses campus, une université pourra ainsi acquérir le label “Université Bleue”. Ce label permettra une reconnaissance internationale et de fortes retombées médiatiques grâce au lien direct des Communautés Bleues. En effet, d’autres universités à travers le monde sont déjà reconnues Communautés Bleues: l’université de McGill à Montréal, et les universités de Berne et de St. Gallen notamment ont reçu cette certification.
Des étudiant.e.s motivé.e.s de 13 campus d’Île-de-France sont déjà mobilisé.e.s et lancent en ce moment des études et enquêtes socio-économiques et environnementales par rapport à l’utilisation des eaux embouteillées sur leurs campus. Des campagnes de communication seront aussi lancées en janvier afin de sensibiliser les universitaires aux problématiques de l’eau et de déconstruire les idées reçues que nous avons accumulés au sujet de l’eau courante.
La réunion des Communautés Bleues a aussi permis la présentation de ce projet à une échelle plus importante.