Réuni le 9 décembre, le conseil municipal de Montreuil a adopté un nouveau vœu, réitérant sa position de principe en faveur de la gestion publique de l’eau. Tandis que le journal Les Echos a publié un article sur « le bras de fer » en Seine Saint-Denis.
Le 2 décembre 2020, devant le bureau territorial d’Est-Ensemble, le président du territoire a proposé de reporter la décision relative à la réadhésion d’Est-Ensemble au syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF) afin de prolonger l’examen des scénarios soumis à l’arbitrage, dans toutes leurs dimensions et leurs complexités, afin d’aboutir à la meilleure décision dans l’intérêt du service rendu aux usagers, au plus tard le 30 septembre 2021.
Cette réflexion s’inscrit dans un processus engagé depuis plusieurs années pour reprendre le contrôle de la distribution de l’eau. En effet, depuis 2018, Est-Ensemble n’est plus membre du SEDIF, chargé de distribuer l’eau potable sur le territoire et qui en a délégué la mission à la société Véolia. Le territoire reste néanmoins lié par une convention de coopération.
Pour nous, l’eau est un bien commun et sa gestion doit être publique. Nous réaffirmons ici notre objectif : aller vers la gestion publique de l’eau sur le territoire d’Est-Ensemble.
Cette volonté d’un mode de gestion publique de l’eau est le fruit de nombreuses années de mobilisations collectives de la municipalité, des élu·e·s, des Montreuilloi.se.s et de la coordination eau Île-de-France. Une votation citoyenne a été organisée en juin 2019 dans plusieurs villes du territoire avec un résultat fort en faveur de la gestion publique de l’eau.
La régie publique de l’eau permettrait de garantir que le territoire d’Est-Ensemble pourra réinjecter les marges dégagées dans des politiques de moyen et long terme comme l’entretien du réseau.
La régie publique permettrait de garantir une politique tarifaire selon des critères sociaux ou environnementaux, une dégressivité des tarifs dans les premiers mètres cubes et la non coupure d’eau pour impayés.
La régie publique garantit que les intérêts des usagers soient respectés et que ni un fonds de pension ni une multinationale ne prennent les décisions.
Par ce vœu, les conseiller.ère.s municipaux.ales de Montreuil réaffirment leur volonté :
-
De garantir à tous l’accès à l’eau potable à un tarif juste pour l’ensemble des usagers
-
d’examiner toutes les études financées par Est Ensemble pour confronter les différents scénarios et notamment ceux d’une régie publique de distribution de l’eau
-
d’informer et de concerter la population
-
d’aboutir à une décision la plus efficace et la plus utile pour les usagers et le service public de l’eau
Le bras de fer autour de l’eau potable en Seine-Saint-Denis se prolonge
Sommé de trancher sur sa présence au sein du Syndicat des Eaux d’île de France, l’établissement public de Seine-Saint-Denis a repoussé sa décision à septembre 2021. Mais le Sedif fait valoir que le temps presse. Les intercommunalités doivent indiquer si elles souhaitent rester au sein du Sedif, qui distribue l’eau à 4, 6 millions d’usagers via une DSP signée avec Veolia (iStock). Par Laurence Albert Publié le 10 déc. 2020
Partir ou rester au sein du syndicat des eaux Ile de France (Sedif) ? En Seine-Saint-Denis, la question de la gestion de l’eau relève à la fois du casse-tête technique, de la bataille politique, et du serpent de mer. Mercredi 2 décembre les élus de l’établissement public territorial (EPT) Est Ensemble (Bagnolet, Bobigny, Bondy, Le Pré Saint-Gervais, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-sec, Pantin, Romainville) se sont donnés neuf mois supplémentaires pour tenter de trouver la solution idoine. Prolongeant ainsi un bras de fer engagé de longue date.
Depuis le 31 décembre 2017 et le transfert de la compétence « eau » aux intercommunalités, les EPT sont en effet priés de trancher dans le vif concernant leur présence au sein du Sedif, qui distribue l’eau à 4, 6 millions d’usagers de 151 communes, via une délégation de service public accordée à Veolia. L’alternative étant de reprendre la gestion de l’eau à l’échelle de leur territoire, en créant par exemple leur régie publique.
Le sursis est terminé
Pour se donner le temps de trancher cette décision délicate, qui divise jusque dans leurs propres assemblées, trois EPT (Est Ensemble, Grand Orly Seine-Bièvre, Plaine Commune) ont déjà demandé -et obtenu- trois ans de sursis. Mais le Sedif fait désormais savoir que le répit est terminé : réponse doit être donnée au 31 décembre 2020. Faute de quoi la distribution d’eau ne sera pas coupée, mais sa tarification risquerait d’évoluer. « Il est temps que ces atermoiements s’achèvent et que le cadre légal soit respecté. Nous devons désormais connaître le périmètre exact de notre syndicat, d’autant que se profile, en juin 2021, l’échéance cruciale du choix de notre nouveau mode de gestion » fait valoir Philippe Knusmann, le directeur général des services du Sedif. Plusieurs options sont sur la table, du maintien en DSP en passant par une concession, une gestion mixte via une SEMOP, ou une transformation en régie publique. Et ce, dès 2023.
C’est justement pour peser en interne sur ces choix que Plaine Commune a finalement décidé de rester dans le giron du Sedif. En revanche, Grand-Orly Seine-Bièvre a temporisé. Est Ensemble, dirigée depuis les dernières élections par le maire communiste de Montreuil, Patrice Bessac veut également se donner le temps et les moyens de creuser le dossier. « Il apparaît clairement que de nombreux éléments structurants nécessitent d’être encore approfondis […] : le montant des investissements et le taux de renouvellement du réseau, les taux d’intérêt de la dette, la répartition des biens ou la redevance d’usage, le prix d’achat de l’eau, ou encore les travaux de déconnexion » fait-il valoir le 2 décembre.
Au-delà des promesses de campagne prises par plusieurs édiles favorables à une gestion publique – gage selon eux, de maîtrise des coûts et de la qualité -, les modalités d’une « sortie » du Sedif font en effet l’objet d’âpres discussions. Certains aimeraient pouvoir quitter le syndicat sans avoir à financer leur propre infrastructure de distribution d’eau – ce qui serait très onéreux -, mais en continuant à utiliser celle du Sedif : la déconnexion serait alors « virtuelle », l’eau de Veolia se mêlant à la quote-part gérée en régie municipale.
Une option non retenue par le Sedif. « Il existe un problème de responsabilité. Nous sommes sûrs de la qualité de l’eau que nous acheminons mais nous voulons être sûrs que cette qualité sera préservée au sortir du territoire qu’elle va traverser. On ne joue pas avec la santé des populations » fait valoir Philippe Knusmann. Le prix à payer pour partir sera donc élevé. Et le dossier est loin d’être déminé, le préfet ayant même été appelé en renfort pour arbitrer. « Nous n’entendons pas nous soumettre aux injonctions de qui que ce soit […]. L’eau est un bien commun trop précieux pour être l’otage de querelles politiques » argue Patrice Bessac.