Archives de catégorie : Droit à l’eau & Tarification

La Saur nie l’illégalité des coupures d’eau !

Communiqué de la Coordination Eau Île-de-France et de la Fondation France Libertés -jeudi 6 novembre

France Libertés, aux côtés d’Arnaud privé d’eau depuis 18 mois, a assigné la Saur devant le Tribunal de Grande Instance d’Amiens pour coupure d’eau illégale. Lors de l’audience du 5 novembre, le numéro 3 français des entreprises privées de l’eau a nié l’illégalité des coupures d’eau.
À en croire la défense de la Saur, le droit à l’eau pour tous n’existe pas et serait même inconstitutionnel, comme en témoigne la Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) qu’elle a déposé, dont voici un extrait :

« La liberté d’entreprendre et la liberté contractuelle sont deux libertés que la constitution garantit dès lors qu’elles découlent toutes les deux de l’article 4 de la déclaration des droits de l’Homme de 1789 qui dispose que « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. »

L’eau est un bien commun et son partage est le signe de notre capacité à vivre au sein d’une société civilisée et non barbare, mais, pour la Saur couper l’eau ne nuirait donc pas à autrui et ne serait pas une pratique indigne (retrouvez la vie quotidienne d’Arnaud en vidéo).
En opposant le droit à l’accès à l’eau à la liberté d’exercice de son contrat, la Saur estime que la  loi Brottes n°2014-274 et son décret d’application sont contraires à la Constitution mais surtout à leurs intérêts économiques.  Alors qu’une première décision de justice a condamné la Lyonnaise des Eaux à verser des dommages et intérêts à une victime de coupure d’eau, et que Veolia a reconnu ses coupures d’eau illégales, la Saur nie toute illégalité et estime être dans son bon droit.

Non contente de déclarer son opposition au droit à l’eau pour tous, ni de bafouer la loi, la Saur démontre ainsi que son approche n’est en aucun cas celle d’un service public mis en œuvre dans l’intérêt général. Elle le rappelle en déclarant :

« La cause de la fourniture d’eau potable par l’exploitant d’un service public d’eau potable, dont il convient de rappeler qu’il est un service public industriel et commercial, est le paiement par l’usager d’une redevance correspondant au service rendu […]. Le droit d’accès à l’eau n’est pas gratuit, le prix doit être payé par les utilisateurs. »

La Saur démontre ainsi qu’elle est à l’image d’une société du tout économique qui oublie l’essentiel que sont les droits fondamentaux à la vie.

Nous attendons impatiemment la décision du Juge du Tribunal de Grande Instance d’Amiens le 28 novembre prochain qui pourrait statuer de la QPC.

 

Collusion gauche-droite pour la privatisation au syndicat de Tremblay / Claye-Souilly

Quelles que soient leurs appartenances politiques, tous les élus du SIAEP de Tremblay / Claye-Souilly sont tombés d’accord pour une gestion privée du service de l’eau !

 
La délégation de service public du syndicat intercommunal d’alimentation en eau potable (SIAEP TC) de Tremblay-en-France / Claye-Souilly (Villepinte, Tremblay-en-France, Mitry-Mory, Claye-Souilly, Compans, Annet-sur-Marne, Fresnes-sur-Marne et Jablines) se termine en 2016. L’actuel affermage de 12 ans faisait suite à une concession de 30 années. Ainsi, depuis 1974, Veolia est l’unique délégataire de ce service !

 
Juste avant les élections municipales, la Coordination Eau Île-de-France s’était adressée à tous les candidats, en attirant leur attention sur le fait que le syndicat (SIAEP TC), s’orientait très certainement « vers la délégation de service public sous la forme juridique d’un affermage », crainte fondée sur un texte technique, qui laissait clairement entendre cette intention. Certes, les choses pouvaient encore changer, les élections n’avaient pas eu lieu et la nouvelle direction politique du syndicat n’était donc pas en place. En tout cas, la Coordination, engagée en faveur de l’eau bien commun et du droit humain à l’eau, rappelait alors qu’elle estimait que la gestion de ce service devait être publique (et non privée) et se faire sous le contrôle citoyen des usagers. Un représentant de notre association avait d’ailleurs interpellé dans leurs meetings respectifs deux candidats de ce territoire (FdG à Tremblay et UMP à Villepinte).

 
Les nouvelles équipes issues des élections ont repris le dossier provisoirement mis de côté et ont avancé dans la procédure à marche forcée et dans la plus grande discrétion. Ainsi le jeudi 25 septembre 2014 la réunion de la commission consultative des services publics locaux (CCSPL) avait à débattre sur le futur mode de gestion du syndicat. Le rapport présenté concluait (comment s’en étonner) à une délégation de service public sous la forme juridique d’un affermage, jugée plus intéressante que la gestion publique. Le seul représentant de la société civile présent non élu s’est bien entendu exprimé contre ce projet et pour la gestion publique. Il était le seul à avoir pu participer à cette parodie de démocratie participative.

 
La dernière phase de la procédure était donc cette réunion du comité syndical qui se tenait le 9 octobre 2014 en vue d’entériner la décision de continuer dans la gestion privée de ce service public. Ayant eu connaissance de cette réunion décisive le lundi (pour le jeudi), un militant a essayé de mobiliser un maximum de personnes pour, peut-être pas infléchir, mais au moins montrer notre désapprobation de cette mascarade de démocratie. Au total, dix personnes, militants associatifs ou élus,étaient présentes et bien déterminées. C’était la première fois dans la vie de ce syndicat qu’il y avait du public dans la salle de réunion d’un comité syndical ! C’est dire qu’il reste des progrès à faire dans la démocratie de l’eau…

 
C’est le président qui présente la question du choix du futur mode de gestion. Dans un discours pour le moins surprenant, où il commence à affirmer que l’eau est un bien commun, qu’il ne peut y avoir marchandisation, qu’il est pour un grand service public de l’eau, etc., il conclut que, pour ce qui est du syndicat qu’il préside, c’est bien plus compliqué et propose à l’assemblée délibérante de retenir la privatisation du service. Si l’ensemble des élus de gauche, comme de droite, va tenir un discours approchant et dire qu’ils sont en parfait accord avec la proposition du président, une note différente sera émise par le maire de Compans, délégué de sa commune. Il est le seul à critiquer franchement cette position et en profite pour contester les conclusions du bureau d’études Merlin retenu par le syndicat pour rédiger le rapport technique et financier préparatoire à la décision. Au final, il marquera sa différence en s’abstenant.

 
La messe était dite : une abstention et tous les autres votes pour, cela s’appelle une unanimité ! Et cela sur la base de propos généreux sur l’eau bien commun avec, au final, une décision en complète contradiction avec ce qu’en disent les organisations qui se battent sur cette question.

 
Ce gâchis n’aurait pas eu lieu si, comme nous l’avions proposé aux maires des communes de ce syndicat, ils avaient fait précéder cette décision d’un vrai débat démocratique largement ouvert aux citoyens et à leurs associations. Comment, quand on est démocrate, ne pas impliquer plus largement les usagers du service (qui eux, paient ce service) et limiter leur participation à cette mascarade de démocratie participative que sont les réunions de la commission consultative des services publics locaux, minimum légal prévu par la loi ?

 
Il faut rapidement, qu’un tel débat vienne remettre dans le bon ordre les arguments des élus et …. leurs décisions ! La Coordination Eau Île-de-France continuera à soutenir tous les efforts militants locaux en ce sens.

 

La réaction des élus EELV de Tremblay-en-France

Votre eau reste une simple marchandise dans les mains de Véolia !

Malgré les demandes pour ouvrir un débat autour de l’intérêt d’avoir une gestion publique ou privée de l’eau,  le comité syndical du SIAEP de Tremblay / Claye-Souilly, a entériné à l’unanimité (gauche et droite confondues) la décision de continuer dans la gestion privée de ce service public en confiant pendant 12 années supplémentaires (jusqu’en 2028) la gestion de l’eau à la multinationale Veolia. Ici, comme naguère dans l’intercommunalité d’Est Ensemble dirigée par la gauche, la notion « d’eau bien commun de l’humanité » a encore du chemin à faire.

Pour autant, l’exploitation du service par Veolia laisse à désirer : fuites importantes sur un réseau vétuste, eau mise en distribution d’une qualité́ laissant à désirer, coupures infligées aux usagers en difficulté́ alors qu’elles sont interdites, pas de tarification sociale, etc. De Paris ou du maire de Nice, des élus de tous bords remettent aujourd’hui en cause la gestion privée au nom d’une saine gestion des finances publiques.

Au même titre que d’autres acteurs associatifs et politiques, nous aurions aimé une implication plus large des usagers du service et ne pas limiter leur participation à cette pseudo démocratie participative que sont les réunions de la commission consultative des services publics locaux, minimum légal prévu par la loi ?

Une bataille est perdue, mais il est encore temps de demander à ce que cette gestion confiée à Véolia soit la plus courte possible et que dès que possible un nouveau débat soit proposé sur cette question !

Oui, une gestion publique de l’eau sobre et efficiente est encore possible !

 

Coupures d’eau illégales : et maintenant la SAUR !

COMMUNIQUE  du mercredi 29 octobre 2014

La Fondation France Libertés a assigné la SAUR en justice au tribunal d’instance d’Amiens.

En France, il est interdit par la loi de couper l’eau pour impayé. Cette interdiction est valable pour tous et toute l’année, comme le stipule la loi Brottes n°2014-274 dont le décret d’application date de février 2014. Cependant les distributeurs de l’eau prétendent ignorer ce changement législatif et continuent cette pratique indigne.

Au regard des témoignages nous faisant cas de situations extrêmes, nous avons décidé sans attendre de porter une nouvelle fois la question des coupures d’eaux illégales devant les tribunaux et avons assigné la SAUR en référé devant le tribunal d’instance d’Amiens. L’audience aura lieu le 5 novembre 2014.

Arnaud C. 26 ans, vit à Saint-Ouen dans la Somme. Il n’a plus d’eau depuis 18 mois. A l’époque, Arnaud doit 278€ au distributeur d’eau. Il propose de payer en plusieurs fois, mais la SAUR refuse et coupe la distribution d’eau. Comble : les factures ont continué à tomber, et la Saur a estimé la consommation d’eau d’Arnaud pour l’année dernière à 169m3 pour une facture totale de 928.25€ ! Pour l’instant, Arnaud se rend plusieurs fois par semaine chez son parrain pour remplir des bouteilles d’eau, un trajet de 50km à chaque fois.

La première décision de justice contre la Lyonnaise des Eaux était une victoire : le tribunal avait interdit au distributeur de couper l’alimentation en eau et condamné à verser plus de 8500 € d’amende ! Cependant, cela n’a pas réussi à faire entendre raison aux distributeurs : les coupures d’eau illégales se poursuivent, comme le prouvent les nombreux témoignages qui continuent d’affluer vers France Libertés et à la Coordination Eau Ile-de-France.

C’est pourquoi nous avons mené une deuxième action contre Veolia. Celle-ci a admis son « erreur » et propose 3.620 euros d’indemnisation pour préjudice matériel et moral. Le jugement est attendu le 12 novembre.

Nous allons nous battre autant qu’il le faudra pour faire en sorte que tous les acteurs politiques, sociaux et économiques entendent ce message : l’eau est un bien commun et son partage est le signe de notre capacité à vivre au sein d’une société civilisée et non barbare. L’accès à l’eau pour tous est mis en œuvre dans le cadre du service public et tout acteur qui procède à des coupures d’eau ne mérite pas d’être responsabilisé pour la mise en œuvre de ce service public.

Nous devons aujourd’hui faire un choix entre une approche économique violente et une approche sociale et humaine. Les distributeurs d’eau publics ou privés se doivent de mettre en œuvre le service dans le respect de chacun en ayant toujours à l’esprit que derrière un numéro de client, il y a des hommes, des femmes et des enfants à qui on coupe l’eau !

 

Des sanctions pour les délits de fuite (d’eau) !

Le temps est venu de sanctionner les autorités organisatrices des services d’eau et d’assainissement pour les délits de fuite d’eau dans les réseaux. Mais les usagers ne doivent pas être les payeurs.

L’année 2014 devrait voir la mise en œuvre du doublement de la redevance à payer aux agences de l’eau, en cas de rendement des réseaux de distribution de l’eau potable inférieur à 85%.

Des interventions fermes et multiples des usagers, pour obtenir et contrôler les déclarations des exploitants, et veiller à ce que les pénalités dues ne soient pas répercutées sur les factures seraient bienvenues.

Pour appuyer cette proposition, voici :

* un commentaire de ce qu’apporte la législation à compter de cette année (à la suite)
* les textes réglementaires de références >> ici
* 3 exemples de courriers de  demande de communication de documents : l’un au délégataire >> ici, l’autre à l’autorité territoriale en charge de la compétence eau potable >> ici, le 3ème à l’AESN >> là (garder trace de ces envois pour saisir la CADA en cas de non-réponse ou refus de réponse).

La réglementation invite les autorités organisatrices des services d’eau et d’assainissement à une gestion patrimoniale des réseaux, en vue notamment de limiter les pertes d’eau dans les réseaux de distribution et le gaspillage.

À cette fin elle les oblige, dès cette année 2014, d’une part à réaliser et mettre à jour annuellement un descriptif détaillé des réseaux, d’autre part à établir un plan d’actions comprenant, s’il y a lieu – c’est-à-dire, si les pertes d’eau dans les réseaux de distribution dépassent des seuils fixés – un programme pluriannuel de travaux d’amélioration du réseau.

Des pénalités financières sont prévues en cas de non-respect de ces obligations.

Le taux de la redevance pour l’usage d’alimentation en eau potable est ainsi multiplié par deux lorsque le descriptif ou le plan d’actions visé à l’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) n’a pas été établi dans les délais prescrits. Cette majoration prend effet à partir de l’année suivant le constat de cette carence.

La loi permet aussi d’exiger des collectivités et agglomérations la copie des déclarations obligatoires qu’elles effectuent  auprès de leur agence de l’eau pour le calcul de leur redevance.  Cette obligation résulte de la loi du 12 juillet 2010 (Grenelle 2 de l’environnement), complétée d’un décret il y a 20 mois. Les exploitants et collectivités ont largement eu le temps de s’y préparer et ne peuvent pas plaider la surprise. Et pourtant, rares, trop rares sont ceux qui se sont acquittés de cette obligation.

Cette difficulté à obtenir un inventaire  et les résultats du réseau de distribution d’eau potable est la démonstration  de l’opacité et des défaillances de la gestion déléguée, tout simplement incapable de fournir des données fiables sur un réseau qu’elle gère pourtant depuis des décennies.

Une fois de plus, les délégataires pratiquent la guerre d’usure pour s’exonérer de leurs responsabilités : leurs tergiversations, leur retard pour fournir les informations prévues,   découragent les exigences de transparence des usagers. Ils permettent aux multinationales de gagner du temps, de repousser à toujours plus tard l’impératif de réparation coûteuse de leurs tuyaux percés.

Pas question pour autant de les laisser gaspiller tranquille l’eau potable, notre bien commun. Nous devons exiger copie des déclarations des exploitants envoyées à l’agence de l’eau, et communication du montant des majorations de redevance dues au fait de non déclaration ou d’une déclaration d’un taux de rendement inférieur à 85 % (la grande majorité, puisque le taux moyen en France est de 75%). Nous devons aussi refuser que la majoration de la redevance sanctionnant les carences du délégataire soit répercutée sur la facture des usagers. Tout cela est à l’ordre du jour, partout.

Si nos collectivités se font tirer l’oreille pour fournir les documents réclamés, sans les absoudre pour ces manquements, un recours existe : interpeller l’agence de l’eau Seine-Normandie, collectrice des déclarations et redevances de ces mêmes collectivités. Échangeons nos démarches et résultats pour les obtenir !

Résumé des textes désormais applicables :

Une  majoration du taux de la redevance pour l’usage « alimentation en eau potable » est appliquée si le plan d’actions mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales n’est pas établi dans les délais prescrits au V de l’article L. 213-10-9, lorsque le rendement du réseau de distribution d’eau, calculé pour l’année précédente ou, en cas de variations importantes des ventes d’eau, sur les trois dernières années, et exprimé en pour cent, est inférieur à 85 %.

Coupures d’eau : notre réponse au lobby des entreprises de l’eau

Un courrier reçu le 14 octobre 2014 de la part de la Fédération Professionnelle des Entreprises de l’Eau (FP2E) nous demande de rejoindre les différents acteurs de l’eau pour une demande de clarification au Parlement sur le statut des coupures d’eau.

Lettre FP2E 141014

Nous ne souhaitons certainement pas rejoindre ce « mouvement » car le statut tel qu’il est défini par la loi Brottes et son décret d’application de février 2014 nous semble à la fois très clair et répondre entièrement à la conception du droit à l’eau que nous défendons en tant qu’association de citoyens, d’élus, d’usagers.

Il est très clair puisqu’il interdit les coupures d’eau pour impayé tout au long de l’année pour toutes les résidences principales, sans condition, c’est-à-dire sans regard de la situation des familles ou personnes concernées.

Cela correspond à notre conception du droit à l’eau, c’est-à-dire un droit fondamental : pour tous, tous les jours et partout ! Nous défendons ardemment cette conception parce que l’eau est un bien commun vital dont la privation dans un logement ou sans logement peut conduire rapidement à de graves problèmes de santé et d’insalubrité. Couper l’eau pour récupérer son dû, c’est porter atteinte à un droit fondamental, c’est mettre en danger des personnes, c’est une pratique de recouvrement terroriste !

De plus, si les entreprises prétendent « leur engagement constant pour que les plus démunis ne soient jamais privés d’accès à l’eau », invoquant les multiples dispositifs existants en ce sens, reste à définir qui sont « les plus démunis » et reste à donner réellement accès à tous ces dispositifs. Avoir accès à un FSL ou un chèque eau relève bien souvent du parcours du combattant administratif et bien des personnes qui y ont droit, ignorent ce droit ou le connaissent et le revendiquent, mais se découragent face à la lourdeur des démarches ou encore se le voient refuser par des administrations incompétentes.

L’Observatoire des Non-Recours aux Droits estime en 2011 à 5,3 milliards d’euros de revenus de solidarité active (RSA) ou encore 4,7 milliards d’euros les prestations familiales et de logement (dont la plupart des aides pour l’eau font partie) qui n’ont pas été versés aux Français. Pour le RSA, c’est 50% des ayants droits qui ignorent ce droit ou y renoncent.

Parmi les témoignages de coupures d’eau que nous avons collecté depuis le mois de juillet de nombreux cas reflétaient les innombrables erreurs de parcours pouvant conduire à une coupure non seulement illégale, mais aussi injuste et injustifiée ! Une femme vivant du RSA avec un enfant s’est vue refusé les aides du Fonds de Solidarité Logement (FSL) pour l’eau parce que ses revenus étaient insuffisants ! Cette personne n’appartient-elle pas « aux plus démunis » ? On lui a refusé les aides du FSL, Véolia lui a refusé un échéancier et cette personne vit sans eau à son domicile depuis le mois de juillet, cela fait donc 4 mois à ce jour ! Celui-ci n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

Il nous semble donc plus sûr du point de vue de la garantie du droit à l’eau pour tous d’interdire les coupures en toutes circonstances et d’inciter les entreprises et municipalités à mettre en place d’autres pratiques de recouvrement comme il en existe dans d’autres domaines (huissiers, procédures de litiges, etc.) ou d’en inventer de nouvelles. La coupure d’eau est certes la solution facile, elle est utilisée pour des sommes ridicules (16 euros d’impayé), elle est pourtant coûteuse selon les entreprises puisqu’elles facturent lourdement les coupures et les remises en service (de 60 à 200 euros, la logique de facturation de ces pratiques n’étant pas très claire). Ce qui d’ailleurs pourrait laisser penser que c’est là une belle source de revenus supplémentaires…

D’après les témoignages recueillis, nous avons aussi compris que les « coupeurs d’eau » ne sont pas habilités à accepter des paiements. Ainsi alors que la coupure devrait servir au paiement des factures, bien souvent, lorsqu’elle survient, les usagers terrorisés à l’idée de vivre sans eau trouvent des ressources inespérées pour les régler (emprunts personnels auprès de proches par exemple), mais ils se voient refuser le paiement par les agents qui viennent couper l’eau et reçoivent ensuite de nouvelles factures augmentées des frais de coupure et de remise en service, souvent arbitraires et exorbitants. Ce qui nous semble très mal venu dans le cas « des plus démunis » qui avaient déjà du mal à payer l’eau.

Le nouveau statut des coupures d’eau établit donc les conditions d’un retour à la gestion de l’eau réellement comme un service public et non pas comme un service marchand aux pratiques proches du racket tel que c’est le cas aujourd’hui. Si nous lançons un appel, c’est donc à la créativité des entreprises et municipalités pour mettre en place des services de recouvrement dignes d’un bien commun et d’un service public, c’est-à-dire, en lien direct avec les services sociaux, et avec des employés qui ont de réels moyens de négocier et d’accepter des paiements, et d’aider « les plus démunis » à chercher les moyens de payer.

Veolia reconnait que ses coupures d’eau sont illégales !

France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France ont assigné Veolia en justice pour coupure d’eau illégale. Lors de l’audience le 10 octobre 2014, Veolia a admis son « erreur » et propose 3.620 euros d’indemnisation pour préjudice matériel et moral.

Assignée par deux personnes privées d’eau pendant 83 jours à Aubigny-sur-Nère, Veolia a été contrainte de se défendre devant le tribunal d’instance de Bourges.

Dans une tentative pour apparaître de bonne foi, Veolia parle d’un dysfonctionnement et rejette toute coupure d’eau volontaire :

« La société Veolia est parfaitement consciente de l’erreur qui a été commise et la déplore ».

Pourtant, les nombreux témoignages que nous recevons chaque jour contredisent la version de Veolia, qui a attendu l’assignation en justice pour rouvrir l’alimentation en eau des plaignants.

Alors que France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France réclament 10.620 euros de dommages et intérêts, Veolia propose de son côté 3.620 euros :

« Veolia accepte de les indemniser à hauteur de 3620€ en indemnisation du préjudice subi, soit 620€ au titre de préjudice matériel et 3000€ au titre de préjudice moral ».

Veolia préfère admettre ses erreurs devant les juges mais continue ses pratiques illégales et indignes.

Nous appelons Veolia à respecter sa parole et à stopper immédiatement toute coupure d’eau pour impayés dans son réseau de distribution. Puisque Veolia « connait les termes de la loi Brottes » et affirme qu’il « n’existe donc aucun risque de voir l’alimentation des abonnés être à nouveau fermée », nous espérons que ces paroles se transformeront en actes.

Le jugement sera rendu le 12 novembre 2014.

Au-delà de l’enceinte du tribunal, nous demandons à Veolia un engagement public et solennel de ne plus procéder à aucune coupure d’eau pour impayés.