Divine surprise pour les tenants de la gestion publique de l’eau : le SIAAP, syndicat interdépartemental d’assainissement de l’agglomération parisienne, a décidé de reprendre en gestion publique son unité de traitement de Valenton, après que la justice ait annulé le contrat de concession de l’usine à Veolia. Cette décision faite suite à une série de scandales et de révélations sur la gestion du SIAAP et les conditions dans lesquelles avait été passé le marché de l’usine de Valenton. Une synthèse d’Olivier Petitjean.
C’est un développement pour le moins inattendu : selon des révélations de l’hebdomadaire Marianne, le Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP), qui dessert Paris et sa banlieue, a décidé de reprendre en gestion publique à compter du 1er avril l’usine de traitement de Valenton. La gestion de cet équipement avait été confiée en grande pompe à Veolia il y a quelques mois, aux dépens de Suez.
Cette remunicipalisation fait suite à un arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris qui avait suspendu le contrat liant le SIAAP à Veolia. Le préfet d’Ile-de-France, dans une démarche totalement inédite (qui peut être interprétée comme un signal que les arrangements d’antan n’ont plus lieu d’être), avait fait appel de la décision, demandant que le contrat soit purement et simplement annulé en raison de multiples anomalies et de forts soupçons de favoritisme. Des enquêtes sont en cours au sein du Parquet national financier sur plusieurs contrats de rénovation d’usines passés par le syndicat intercommunal ces dernières années. Pour ne rien arranger, le Canard enchaîné a récemment épinglé les dépenses somptuaires de nombreux élus et agents du SIAAP.
Entre-temps, Le Monde et le magazine télévisé Cash investigation en ont remis une couche en révélant la teneur d’enregistrements audio réalisés par un entrepreneur italien évincé des contrats du traitement des eaux usées franciliennes malgré une meilleure offre. Derrière ces faits, c’est tout un système d’entente entre géants de l’eau et du BTP, avec la complicité du SIAAP, qui a été mis en lumière.
Relance de la bataille francilienne de l’eau
C’est un développement important alors que beaucoup aimeraient à faire croire que la bataille entre gestion publique et privée de l’eau en Ile-de-France n’a plus lieu d’être, ou qu’elle tourne à nouveau en faveur du privé. Le président du Sedif – le syndicat intercommunal d’eau de la banlieue parisienne, qui est aussi le plus gros contrat de Veolia – André Santini s’agite beaucoup autour du « Grand Paris » pour reconquérir le terrain perdu avec la remunicipalisation du service d’eau de la capitale en 2010, sans résultat jusqu’à présent.
Au contraire, les communautés de communes Grand-Orly-Seine-Bièvre, Est Ensemble (Montreuil, Bagnolet, Pantin…) et Plaine Commune (Saint-Denis, Aubervilliers…) ont toutes trois décidé fin 2017 de quitter le Sedif d’ici deux ans et d’étudier la reprise en gestion publique directe de leurs services d’eau, dans le cadre d’une alliance avec Eau de Paris, l’opérateur remunicipalisé de l’autre côté du périphérique.
Le SIAAP fait partie de ces syndicats intercommunaux franciliens dont la gestion est notoirement opaque et où les différents partis se sont historiquement partagés les places. La présidence du SIAAP échoit en l’occurrence à un élu communiste montreuillois, Belaïd Bedreddine. Et le contrat confiant l’usine de Valenton à Veolia avait été annoncé… à la Fête de l’Humanité.