Eau du Sud Francilien s’engage dans le débat public sur l’eau osmosée

Le comité syndical du syndicat mixte fermé Eau du Sud Francilien, réuni le 17 avril, a adopté à l’unanimité une motion exprimant ses réserves sur le projet OIBP du SEDIF. Ci-dessous la note préparatoire, la motion adoptée et la contribution d’Eau du Sud Francilien au débat public.

Note de synthèse 

Objet :

Adoption de la position du SMF ESF, dans le cadre du débat lancé par la Commission nationale du débat public (CNDP) et intitulé « L’eau potable en Île-de-France », sur le projet du Syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF) visant à l’implantation de la technologie d’osmose inverse basse pression (OIBP) dans ses usines de Choisy-le-Roi, Neuilly-sur-Marne et Méry-sur-0ise.

Le Syndicat des eaux d’Île-de-France programme une modification majeure de ses usines de traitement d’eau potable à l’horizon 2030. Annoncé comme la fourniture à tous ses usagers d’une « eau pure sans calcaire et sans chlore », le projet consiste à implanter dans chacune des usines de Choisy le Roi, Neuilly sur Marne et Méry sur Oise, en fin de filière de traitement, une unité de filtration membranaire par osmose inverse basse pression (OIBP).

Il s’agit du dispositif d’affinage de l’eau potable actuellement le plus performant. Le principe consiste à forcer le passage de l’eau à traiter à travers une membrane à la maille extrêmement fine afin de retenir, sous forme de concentrat, les derniers éléments indésirables. La technologie permet en effet d’arriver à une matrice pure, dépourvue de toutes formes de polluants émergents connus ou à connaître (avec l’évolution des techniques analytiques), ainsi que de la quasi-totalité des sels dissous. Cette eau « artificialisée » doit ensuite être reminéralisée pour rester potable.

A l’échelle des installations du SEDIF, le projet constituera une première mondiale et une référence de première importance pour son concessionnaire dans la perspective éventuelle de l’extension du procédé aux grandes agglomérations de France et d’ailleurs.

D’une ampleur sans équivalent dans l’histoire du SEDIF, le projet entraîne un doublement des coûts de traitement de l’eau, un quasi triplement des consommations d’énergie par rapport aux dispositifs en vigueur, et des impacts non négligeables sur l’environnement avec le rejet des concentrats.

C’est d’ailleurs pour cette dernière raison que le préfet de Seine-et-Marne n’a pas accordé en 2022 l’autorisation environnementale au projet pilote du SEDIF dans son usine d’Arvigny.

Par ailleurs, la production d’une eau plus pure que l’eau « irréprochable » du SEDIF conforme aux normes les plus récentes, interroge l’utilité actuelle du projet ; sa généralisation à l’ensemble du périmètre SEDIF également, alors que les qualités des eaux superficielles de la Seine, la Marne et l’Oise n’appellent pas les mêmes contraintes de traitement.

Enfin et plus que jamais avec l’évolution du climat, la fluidité des échanges d’eau dans la zone interconnectée d’Île-de-France (Paris, Petite et Grande Couronne, dont le réseau interconnecté du sud francilien) s’affirme comme une nécessité pour la sécurisation de l’alimentation en eau dans l’ensemble de la zone, et pour la prévention des surinvestissements de production.

La production de deux qualités d’eau différentes dans la zone interconnectée dont l’une est supposée « pure, sans calcaire et sans chlore » pénaliserait les échanges et la sécurité de l’ensemble, sauf à contraindre les usines périphériques de la zone interconnectée à adopter, à grand frais pour les usagers, un dispositif analogue.

L’impact du projet SEDIF dépasse ainsi largement son périmètre de distribution. Le projet implique toutes les collectivités alimentées par la zone interconnectée de l’Île-de-France et en particulier le Syndicat mixte Eau du Sud Francilien.

Au-delà de la zone interconnectée, les habitants de nombreuses communes franciliennes n’ont pas accès à une eau conforme : il y aurait ceux qui bénéficient d’une eau pure, ceux qui bénéficient d’une eau conforme et ceux qui seraient soumis à des restrictions d’usage. Au-delà de la pertinence ou non de la technologie, il s’agit de déterminer s’il ne serait pas plus pertinent de dédier les sommes de ces investissements à la restauration de la qualité des aquifères, à la prévention raisonnée de la pollution des nappes et cours d’eau, à la conversion des pratiques agricoles. Il s’agit aussi de déterminer si les conséquences de la mise en place de ce procédé ne dépassent pas les avantages attendus, en matière environnemental, de consommation énergétique, et de prix de l’eau pour les usagers.

Compte tenu de l’ampleur et des forts enjeux socio-économiques et environnementaux du projet, la Commission nationale du débat public (CNDP) a décidé, le 7 septembre 2022, l’ouverture d’un débat public intitulé « L’eau potable en Île-de-France ». Le calendrier du débat, publié le 15 mars 2023, fixe le déroulement de celui-ci sur trois mois, entre le 20 avril 2023 (démarrage officiel) et le 20 juillet 2023.

Dans le cadre de ce futur débat, les représentants du Syndicat mixte Eau du Sud francilien ont souhaité affirmer la position suivante :

« Le syndicat mixte Eau du Sud francilien :

  • affirme la nécessité de réduire les pollutions en amont, tout en travaillant sur les filières de traitement pour anticiper les problématiques de polluants émergeants, et faire évoluer les normes de manière concertée ;

  • prend la mesure de l’importance pour son territoire du débat sur « L’eau potable en Île-de-France » organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) et demande que soient organisées plusieurs séances sur celui-ci afin d’associer toutes les parties prenantes ;

  • considère que la pertinence du projet de généralisation du dispositif d’osmose inverse dans les usines du SEDIF n’est pas démontrée ;

  • demande que les acteurs producteurs d’eau en Île-de-France se réunissent pour établir une stratégie commune d’alimentation et de sécurisation des usagers de la zone interconnectée d’Île-de-France ;

  • considère que ce projet bouleverse l’économie de la production d’eau potable et génère des impacts non négligeables sur l’environnement et la facture des usagers ;

  • émet dès à présent des réserves sur ce projet compte tenu de ses effets potentiels sur la fluidité des échanges d’eau dans la zone interconnectée d’Ile-de-France et la création d’une référence coûteuse et superflue pour les usines du territoire ;

  • souhaite que soit mise en place une gouvernance territoriale de l’alimentation et de la sécurisation en eau, dans laquelle l’État doit prendre toute sa part, au regard des enjeux du réchauffement climatique et de biodiversité, des capacités contraintes en énergie, des priorités à accorder à la protection des ressources en eau, objectifs assignés par le Président de la République dans son plan d’action du 30 mars 2023.

Aussi, est-il proposé au comité syndical d’approuver le texte de la position ci-dessous du SMF ESF, dans le cadre du débat lancé par la Commission nationale du débat public (CNDP) et intitulé « L’eau potable en Île-de-France », sur le projet du SEDIF visant à l’implantation de la technologie d’osmose inverse basse pression dans ses usines de Choisy-le-Roi, Neuilly-sur-Marne et Méry-sur-0ise.

Télécharger la contribution d’Eau du Sud Francilien au débat public

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