Un tronçon de 600 mètres de la rivière Bièvre à ciel ouvert a été inauguré ce jeudi matin, entre Arcueil et Gentilly. Les berges ont été aménagées pour la promenade. Articles de Sarah Tuchscherer, France Bleu Paris et de Marie Delumeau dans Les Echos.
La Bièvre est une rivière oubliée. Pas dans les mémoires, mais physiquement. De ses 36 kilomètres depuis sa source à Guyancourt jusqu’à l’endroit où elle rejoint la Seine, près de la gare d’Austerlitz à Paris, une bonne partie a été ensevelie progressivement à partir du XIXe siècle. Polluée par l’activité des tanneurs, elle faisait à l’époque office d’égout à ciel ouvert. Depuis les années 50, toute la partie aval à partir d’Antony était recouverte. Un premier tronçon avait déjà été découvert à l’Haÿ-les-Roses. Un deuxième vient donc de l’être, entre Arcueil et Gentilly.
Deux ans et demi de travaux, dix millions d’euros
L’eau sort d’une canalisation, sous le pont de l’avenue Paul Doumer à Arcueil et court à l’air libre sur 600 mètres jusqu’au parc du coteau de Bièvre à l’entrée de Gentilly. Les berges ont été aménagées pour la promenade. Les travaux auront coûté dix millions d’euros et duré près de deux ans et demi. Une durée qui s’explique par leur caractère particulièrement technique. « Il ne suffisait pas de casser la canalisation dans laquelle l’eau coulait, explique Benoît Kayser, chargé du projet au sein du département du Val-de-Marne. Il a fallu faire de la place pour le lit de la rivière et consolider les berges, on est dans une zone urbaine dense. Le chantier impliquait beaucoup de démolition, de terrassement et de maçonnerie« .
La réouverture de la Bièvre, un chantier colossal et très attendu
Le retour des hérons et des poissons
Mais le jeu en valait la chandelle. Depuis l’ouverture de la vanne, en mars, la nature a déjà commencé à reprendre ses droits. Benoît Kayser raconte : « Dès le premier après-midi quand l’eau est arrivée, un héron est venu regarder s’il y avait des poissons. Il n’y en avait pas, mais depuis on a commencé à en apercevoir. C’est tout un milieu naturel qui est en train de se reconstituer. Il faut que ça se fasse en harmonie avec les hommes qui vivent à côté« . Le technicien le précise : on ne se baigne pas dans la Bièvre. Son eau est trop limoneuse, et cela détruirait l’écosystème qui est en train de voir le jour.
D’autres projets à venir
A l’avenir, de nouveaux tronçons pourraient être dégagés. Le président du département, Olivier Capitanio, l’a précisé lors de l’inauguration en évoquant les noms d’Antony, Cachan et l’Haÿ-les-Roses : « la rivière traverse tout le département, les possibilités sont larges. Nous y travaillons avec la métropole du Grand Paris« . La mairie de Paris ambitionne elle aussi de faire revivre la Bièvre. Quelques centaines de mètres seraient concernés au cœur du parc Kellermann, dans le 13e arrondissement. Lui aussi présent pour l’occasion, l’adjoint à la transition écologique, Dan Lert, a toutefois fait savoir que les travaux ne pourraient débuter qu’à la fin du mandat d’Anne Hidalgo, à l’horizon 2026 donc.
Val-de-Marne : entre Arcueil et Gentilly, la Bièvre retrouve enfin son cours
Après deux ans de travaux et dix années de recherches, un nouveau tronçon de la Bièvre a été inauguré entre Arcueil et Gentilly. Cinq autres projets de renaturation de ce cours d’eau sont actuellement à l’étude. Par Marie Delumeau dans Les Echos.
« La Bièvre, rivière martyrisée, rivière enterrée, mais aujourd’hui rivière retrouvée ! » Pour l’inauguration, jeudi 14 avril, du chantier de renaturation de la Bièvre, Christian Métairie, le maire (EELV) d’Arcueil (Val-de-Marne) n’a pas hésité à paraphraser Charles de Gaulle. Il faut dire que c’est un chantier d’ampleur – 27 mois ! – qu’il a fallu mener pour remettre en état les 600 mètres de rivière s’écoulant entre la commune et Gentilly.
C’est peu dire aussi que cet affluent de la Seine, qui prend sa source à Guyancourt (Yvelines) pour courir sur 36 kilomètres jusqu’à Paris, a été maltraité par le passé. Pollué dès le XVIIIe siècle, il a été en partie enterré au XIXe siècle, au point de voir son débouché sur la Seine rompu. En 1956, le tronçon entre Antony (Hauts-de-Seine) et Paris avait même été recouvert.
Renaturation en 2016 à L’Haÿ-les-Roses
Citoyens, élus et associations se sont cependant mobilisés pour faire revivre la Bièvre. Son statut de cours d’eau lui a été rendu en 2007 et des tronçons ont peu à peu été rouverts. Comme à L’Haÿ-les-Roses, dans le Val-de-Marne, en 2016. La renaturation de la Bièvre à Arcueil et Gentilly est ainsi la seconde opération de ce genre réalisée par le département, maître d’ouvrage du chantier.
Le président (LR) du conseil départemental, Olivier Capitanio, a salué une « prouesse technique ». La remise à ciel ouvert de la Bièvre a en effet nécessité un travail d’assainissement préalable, la démolition de la canalisation, puis de la maçonnerie, des travaux de terrassement…
Reconquête du milieu
La renaturation de la Bièvre aura un impact sur la faune et la flore. « Le département et ses partenaires ont recréé un milieu humide », se félicite Benoît Kayser, chef du projet pour le département. « Maintenant, la reconquête du biotope va se faire naturellement. » Quelques poissons auraient même déjà été aperçus dans l’eau.
Au niveau de la végétation, bien que des arbres aient dû être abattus, d’autres ont été replantés. Les essences sélectionnées, tels que les saules et les aulnes, sont typiques des bords d’eau. Le département a, au total, planté 213 arbres, poursuivant ainsi son engagement d’ en planter 50.000 d’ici à la fin de la mandature.
Plus de 10 millions d’euros d’investissement
L’enveloppe pour cette opération s’est élevée à plus de 10 millions d’euros, financés par l’Agence de l’eau Seine-Normandie (38 %), la Métropole du Grand Paris (32 %), le département (20 %), ainsi que la région Ile-de-France (10 %). Pour ce projet, le conseil départemental a également reçu une aide de 900.000 euros du Fonds de solidarité et d’investissement interdépartemental (FS2i).
En amont, le Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne (SIAAP) avait effectué un aménagement, moyennant 20 millions d’euros d’investissement, afin de libérer le lit de la rivière. « Sans le doublement du collecteur, la Bièvre serait restée un exutoire des rejets d’assainissement », a indiqué François-Marie Didier, président du SIAAP.
Dans les années à venir, d’autres secteurs de la rivière seront amenés à être rouverts. Cinq autres projets de renaturation de la Bièvre sont actuellement étudiés par la Métropole du Grand Paris, en qualité de maître d’ouvrage. Ces tronçons seraient situés à L’Haÿ-les-Roses et Cachan dans le Val-de-Marne, ainsi qu’à Antony et Paris.
Les prochains tronçons rouverts mesureraient 500 mètres à Paris, 700 mètres à Antony et 800 mètres répartis à Gentilly, Cachan et L’Haÿ-les-Roses.