Le 7 décembre est l’anniversaire de l’entrée de l’eau à la Bourse de Chicago, en 2020. A cette occasion, citoyen.ne.s, associations et député.e. s se sont retrouvées devant l’Assemblée nationale à Paris. Des rassemblements similaires étaient organisés à Bruxelles, Montréal et Rome. Retour sur le rassemblement parisien. Dans un second temps, le soir, la Coordination EAU Île-de-France a organisé une conférence-débat sur la financiarisation de l’eau -compte-rendu à suivre. Par Maelis Biennait, bénévole en service civique dans notre association. Photos de Jean-Michel Sicot.
Le mouvement de financiarisation de l’eau fait partie d’une histoire de marchandisation, de privatisation et d’appropriation d’une ressource vitale. Mais les citoyen.e.s, les élu.e.s, les associations, les collectifs se sont mobilisés et ont pris la parole.
Libérons l’eau de la Bourse !
Cette mobilisation s’est organisée autour de rassemblements à Montréal, Rome, Bruxelles et Paris, co-organisés par l’Agora des Habitants de la Terre. A Paris, le rassemblement s’est tenu devant l’Assemblée Nationale.
Les prises de parole des différents acteurs de l’eau mettent en avant une complicité et une permissivité du gouvernement avec les multinationales qui accaparent et polluent l’eau en niant le bien commun et le changement climatique.
Renée-Lise Rothiot du collectif « L’eau qui mord » cite l’ancien PDG de Nestlé Waters qui déclarait il y a 10 ans “ Deux points de vue s’affrontent. Celui des ONG est que tout humain devrait avoir accès à l’eau ; c’est une solution extrême. L’autre est que l’eau est une denrée et que, comme toutes les denrées, elle a une valeur marchande”.
L’entrée de l’eau en Bourse tente de pousser encore plus loin cette marchandisation de l’eau. La valeur de l’eau est fixée par les marchés. Mélissa Gringeau, porte parole du collectif Bassines Non Merci, nous rappelle la situation en Californie. La moitié des fruits et des légumes produits fournissent les Etats-Unis, à grand renfort d’irrigation. Et cette région subit les effets du changement climatique avec des incendies, des sécheresses, et une grande raréfaction de l’eau. On voit alors apparaitre la vente et le rachat de titres équivalents à des permis d’utilisation d’eau.
“Ainsi, pour faire face à cette situation, au lieu de contraindre les agriculteurs et les industriels, les autorités s’en sont remises au marché.” Mélissa Gringeau, porte-parole du collectif Bassines Non Merci
Mathilde Panot (députée du Val-de-Marne, présidente du groupe LFI) met en avant l’accaparement de multinationales telles que Veolia, Suez, Saur, et d’autres comme Danone, pour des intérêts privés. Ce n’est pas sans rappeler la lutte des associations, des citoyens et des collectifs Eau 88 ou L’Eau qui Mord contre l’accaparement de l’eau par Nestlé à Vittel.
“ A Vittel, nous avons noué des liens avec des activistes du Brésil, de Suisse, du Canada, des Etats-Unis, du Mexique, d’Allemagne et bien sûr de France dont nos ami.e.s de Volvic et Salvetat en lutte contre Danone.” Renée-Lise Rothiot, L’eau qui mord
Le directeur de la Coordination EAU Île-de-France, Jean-Claude Oliva, cite Ricardo Petrella, et l’Agora des Habitants de la Terre : “les citoyens n’ont pas élu leurs représentants pour que ceux-ci soient au service des dominants.”
L’opacité d’un système marchand et spéculatif de la gestion de l’eau est dénoncée. The Guardian a publié une étude remarquable sur la privatisation de l’eau en Angleterre. 72% des compagnies d’eau anglaises sont contrôlées par des entreprises de 17 pays. Il peut y avoir jusqu’à 10 intermédiaires entre la compagnie d’eau et sa maison mère. (Lire ici: à qui appartient l’industrie de l’eau en Angleterre?)
Face à cette opacité de la gestion de l’eau, une alternative se construit autour des citoyen.ne.s avec la gestion publique de l’eau. Jean-Claude Oliva évoque la création de la régie publique d’Est Ensemble
“dirigée par des élus, des représentants des citoyens qui ont participé à une convention citoyenne pour le climat, des représentants d’associations (…). C’est eux qui sont au conseil d’administration et dirigent une régie, à taille humaine”.
Gabriel Amard, député du Rhône, affirme l’engagement aux côtés des ambassadeurs de l’eau bien commun avec la volonté de transposer la résolution des Nations Unies, du 28 juillet 2010, qui reconnaît le droit humain à l’eau et à l’assainissement, dans le droit français.
Nous affirmons que l’eau est un commun public vital pour l’humanité !