Le Conseil de territoire d’Est Ensemble a voté hier l’adhésion au Syndicat des Eaux d’Île-de-France (SEDIF) pour les villes de Noisy et de Bobigny. C’est le résultat d’un véritable coup de force du Président Gérard Cosme qui renverse ainsi le précédent vote du 3 juillet qui avait rejeté l’adhésion de Noisy. M. Cosme a cédé au chantage de M. Santini qui, selon ses dires, bloquait depuis trois mois les travaux sur les réseaux du SEDIF pour la piscine olympique de Bondy.
Les interventions des élu-es
Gilles Robel, groupe Écologiste et Citoyenneté
La délibération qui est soumise à notre approbation ce soir nous donne un sentiment de déjà vu. Le 3 juillet notre assemblée s’est en effet déjà prononcée sur la ré-adhésion au SEDIF d’une ville du territoire, et elle a rejeté à une large majorité cette proposition. Nous sommes donc surpris de devoir voter de nouveau sur la ré-adhésion de Noisy et estimons que seul un vote au sujet de la ville de Bobigny est légitime. Sans parler des menaces proférées par le Président Santini pour nous faire plier. Ces votes à répétition jusqu’à obtenir un vote favorable d’une assemblée souveraine vont à l’encontre de principes démocratiques de base.
Pour le groupe Écologiste et Citoyenneté, les mêmes causes doivent produire les mêmes effets. En juillet dernier nous avions souligné que la question de l’eau, en tant que bien commun vital, dépasse à l’évidence les intérêts particuliers d’une commune. Dans une logique de mutualisation et de solidarité, Est Ensemble a adopté unanimement en décembre 2017 une solution de compromis négociée avec le SEDIF et 2 autres territoires et s’est donné un délai de réflexion de 2 ans pour étudier le passage à la gestion publique. Si Noisy ou Bobigny avaient d’emblée refusé la convention, la situation serait différente. Aujourd’hui, nous estimons que la ré-adhésion unilatérale de ces deux villes, alors que le travail de réflexion n’est pas achevé, fait fi du collectif et nous affaiblit en nous divisant dans la phase cruciale de négociation qui va s’engager. Elle doit donc être rejetée pour préserver l’intérêt d’Est Ensemble, qui ne se réduit pas à la somme des intérêts bien compris de chacune des villes. Chacun se décidera en conscience au terme de la période de réflexion.
Au-delà de ces questions de principes, un certain nombre d’arguments fallacieux sont avancés pour étayer la demande de ré adhésion. On nous annonce un coût de sortie du SEDIF à 160 millions d’euros, somme astronomique que nous n’aurions pas. Or ce chiffre destiné à faire peur ne repose sur rien. 3 scénarios nous ont été présentés en décembre dernier, à 57, 103 et 136 millions d’euros pour le plus coûteux. Les durées d’amortissement étant de 40 ans, cela représente une dépense annuelle de 1,5 à 3 millions d’euros, ce qui est tout à fait raisonnable, surtout quand on considère que l’eau du SEDIF est l’une des plus chères de France. Par ailleurs le Président Cosme a obtenu le soutien de la banque des territoires pour financer ces investissements, signe indéniable de la viabilité financière du projet.
On nous explique que la ré-adhésion de Noisy et Bobigny ne compromet en rien le passage en régie publique, qu’elle n’est que provisoire et doit simplement permettre à ces deux villes de peser sur les décisions du SEDIF. En réalité cette ré-adhésion est définitive. Chacun sait qu’il est impossible de sortir du SEDIF une fois qu’on y a adhéré, sauf nouvelle réforme territoriale. En outre on voit mal en quoi deux villes pourraient peser sur les décisions d’un syndicat qui en réunit 150, d’autant plus que leurs deux maires sont de la même couleur politique que le Président Santini! Enfin, et surtout, quand on évoque la souveraineté de Noisy et de Bobigny, il ne faut pas oublier la souveraineté de Bondy que cette ré-adhésion va nécessairement léser. En raison de sa position géographique, elle n’aura pas d’autre choix que de s’approvisionner en eau du SEDIF. Une adhésion de Noisy et Bobigny va aussi engendrer des coûts de déconnexion supplémentaires. Qui va les supporter? Il serait scandaleux que ces coûts soient supportés par la future régie publique, ce qui plomberait ses comptes dès le départ, alors que ces mêmes villes mettent déjà en avant le coût supposé de la régie pour nous dissuader d’adopter ce mode de gestion. Cette réadhésion compromet donc la souveraineté d’Est Ensemble et sa capacité à adopter le mode de gestion qu’elle souhaite, il faut que chacun en ait conscience.
Venons-en aux menaces. Le Président Santini a brandi la carotte et le bâton.
La carotte c’est, si nous votons bien, la promesse d’une prolongation de la convention au-delà de la fin de l’année pour nous permettre d’achever nos études. Le bâton, c’est la menace d’une hausse du prix de l’eau si la convention n’est pas renouvelée, quelques mois avant les élections municipales. C’est aussi la menace de bloquer les travaux de dévoiement des canalisations d’eau nécessaires à la construction du bassin d’entraînement olympique de Bondy.
Prouvons au Président Santini que nous ne sommes pas des ânes. Et que ces menaces sont inadmissibles. Tout ce qui concerne les jeux olympiques dépend d’une loi-cadre. C’est donc l’État qui est garant de la réalisation des travaux et un Président de Syndicat n’a heureusement pas le pouvoir de s’y opposer. Le Préfet doit être saisi. Quant à la hausse des tarifs de l’eau qui frapperait les usagers de l’un des territoires les plus pauvres de France, qui peut croire, dans le contexte du mouvement des Gilets Jaunes, que Véolia prendrait le risque politique de nous l’imposer?
La seule réponse possible est de considérer que la convention ne sera pas prolongée et de mettre les bouchées doubles pour achever notre travail de préparation à ce passage en régie, en nous entourant des toutes les compétences et moyens nécessaires. Et de ne pas nous laisser détourner de cet objectif commun, puisqu’à écouter les uns et les autres, tout le monde ou presque est favorable à la gestion publique. Redisons-le, la gestion publique de l’eau est une exigence démocratique, sociale et écologique parce que nous savons que nous allons vers des périodes de raréfaction de la ressource et qu’il est donc essentiel de pouvoir assurer son accès à tous les usagers, dans une gestion de proximité, transparente et respectueuse de l’environnement. Elle a été adoptée par de nombreuses villes et territoires, toutes couleurs confondues, et ne peut pas être considérée comme une réforme « idéologique » ou « partisane » comme on l’entend parfois.
Face à la grave crise politique que traverse notre pays en ce moment, il est grand temps de mettre nos discours en accord avec nos actes.
Pour toutes ces raisons, en cohérence avec notre précédent vote, notre groupe votera contre cette délibération.
Ibrahim Dufriche-Soilihi, premier adjoint écologiste au maire de Montreuil délégué a la Transition écologique
Les décisions souveraines de trois territoires: Plaine Commune, Val de Bièvre et Est ensemble, de sortir du SEDIF pour mettre en place un service public de l’eau constituent un événement de progrès historique, au service de l’intérêt général, pour les habitants de ces territoires.
Soustraire à l’appétit de profit d’une multinationale, la gestion d’un bien commun aussi rare et essentiel que l’eau, honore les collectivités qui ont pris ces décisions.
S’il n’est pas surprenant que cette multinationale soit « contrariée » de perdre un marché de plus d’1 million d’habitants, il est consternant de voir un Président de syndicat intercommunal, le SEDIF, censé défendre les intérêts des habitants se faire le valet zélé des intérêts privés d’une multinationale.
L’acharnement du Président du SEDIF à menacer les territoires, à intriguer pour les faire changer d’avis, voire à revenir sur leurs positions est une entrave grave à la souveraineté des territoires.
La délibération sur laquelle nous sommes amenés à nous prononcer ce soir en est hélas l’illustration et pose deux problèmes majeurs.
1- Il y a a peine 6 mois, le 4 juillet 2018, notre EPT a pris une délibération n’acceptant pas la sortie du SEDIF de la ville de NOISY.
La délibération présentée ce soir a pour effet de prendre une décision contraire !
On peut tourner la rhétorique dans tous les sens : c’est bien un changement de position à 6 mois d’intervalle ! Et donc un déni de démocratie !
D’autant que ces 6 mois « d’intervalle » ont été le temps d’exercice de pressions inacceptables !
2- Nous ne sommes pas sourds face à la question de l’autonomie communale. Mais nous devons rappeler que le territoire ne peut se réduire à l’addition d’intérêt particuliers, il est le cadre que les communes se sont données pour servir l’intérêt général. Et être solidaire et mutualiser leurs moyens pour le servir au mieux .
Or la décision proposée ce soir contient à ce titre un manquement majeur qui la rend inacceptable:
en effet, alors que le territoire est engagé dans le processus de création d’une Régie publique, les conséquences financières pour l’EPT Est Ensemble de cette dérogation pour autoriser la ré adhésion des deux communes au SEDIF ne sont pas abordées !
En clair : qui paiera les frais de déconnexion au réseau ? Ces deux communes vont-elles assumer financièrement leur choix ? Ce n’est pas dans la délibération ! Ou bien sont-ce les autres communes qui pourtant ne partagent pas ce choix ?
Anne Deo, élue de Noisy-le-Sec
C’est en tant qu’élue de Noisy-le-Sec et au nom du groupe municipal Rouge et Verte la Gauche ensemble dans lequel nous siégeons, Olivier Sarrabeyrouse et moi, que je me permets de prendre la parole ce soir.
Je ne reviendrai pas sur les points évoqués par Gilles Robel, son argumentaire très complet et très pertinent reprend totalement mon point de vue sur le sujet.
En revanche, j’insisterai sur l’émotion que cette délibération a suscitée dans notre groupe qui je le rappelle représente 42% des électeurs qui se sont exprimés à l’élection municipale de 2014 dans notre commune de Noisy Le Sec.
Nous sommes choqués et nous sommes en colère !
Retour sur le vote majoritaire et démocratique du 4 juillet dernier,
Revanche politicienne de quelques élus de droite, vexés d’avoir été mis en minorité dans cette assemblée,
Prise en otage des citoyens Noiséens qui n’ont jamais été consultés, ni même informés d’ailleurs, des enjeux d’une telle décision de leur maire, alors qu’ils en subiront demain toutes les conséquences
Mépris pour la ville de Bondy qui serait impactée par ce choix imposé au nom du fameux respect de la volonté des maires tout puissants,
Entêtement, oui entêtement et volonté farouche de se singulariser ou plutôt de se désolidariser de l’ensemble du territoire pour empêcher au bout du compte, ne nous mentons pas, le passage en régie publique et
Cerise sur le gâteau, pressions inacceptables, menaces de sanctions par le président du SEDIF qui prétend punir les vilains désobéissants qui mettent en péril les intérêts politiques du SEDIF et les intérêts financiers des actionnaires de VEOLIA…
C’en est trop !
Monsieur le président, nous vous demandons solennellement de retirer de l’ordre du jour le vote de la délibération sur l’adhésion d’Est Ensemble pour les villes de Noisy et de Bobigny.
D’abord parce qu’il n’est pas admissible en saine démocratie de faire revoter une décision qui a déjà été votée il y a quelques mois.
Ensuite, circonstance aggravante, ce vote est provoqué directement par les pressions exercées par M. Santini, président du Syndicat des Eaux d’Île de France qui dans différents courriers, adressés au Président, aux maires et aux conseillers territoriaux, a opéré un véritable chantage, en menaçant le territoire de représailles financières à hauteur de 50 millions d’euros et même de non exécution des travaux de raccordement ou de déplacement des réseaux qui concernent les Jeux Olympiques ou le Grand Paris Express dont M. Santini est également le Président.
Cela contrevient de façon manifeste à la souveraineté du conseil de territoire et entache la validité juridique d’une délibération qui serait prise dans ces conditions.
Sylvie BADOUX, Vice-présidente d’Est Ensemble et Maire-adjointe de Bondy
L’histoire de notre établissement public territorial est ainsi faite que les modifications de statuts de notre organisation dues aux différentes lois portant sur l’organisation de la République française nous ont obligé à voter plusieurs fois sur la question de la gestion de l’eau potable sur le Territoire.
Et c’est tant mieux puisque l’évolution des uns et des autres dans le temps, a affirmé une volonté fortement majoritaire d’aller vers une gestion publique de l’eau.
Ainsi, des études ont été produites proposant plusieurs scénarios, dont l’un nous lierait à Eau de Paris, avec potentiellement d’autres EPT. Aujourd’hui, deux villes frontalières de Bondy, Bobigny et Noisy, souhaitent ré-adhérer au SEDIF comme leur en accorde de droit la convention de gestion dans son article 4.3. Ceci n’est pas contestable – juridiquement seulement- et j’en conviens aisément. Ce qui n’est pas contestable non plus, c’est la souveraineté du Conseil de Territoire à prendre la décision finale.
Dans son projet de Territoire, Est Ensemble appuie fortement sur la cohésion territoriale, tout autant que sur la solidarité. Il est également indiqué qu’aucune Ville ne serait contrainte. C’est l’esprit communautaire et le respect de nos Communes.
Cependant, si aujourd’hui, l’adhésion de ces deux villes n’impacte aucunement la Ville de Bondy, les Bondynois n’ont aucune garantie pour l’avenir tant la capacité à nous relier à Eau de Paris sera totalement fermée, barrée par les frontières communales balbyniennes et noiséennes.
Je ne peux pas comprendre ce revirement de situation qui devrait laisser deux villes sur neuf à ré-adhérer au SEDIF pour prétendre « peser » sur les décisions du SEDIF puisqu’elles vont représenter une proportion microscopique du Conseil syndical.
Vendredi dernier, à l’occasion d’un ciné-débat au cinéma Malraux, j’ai rencontré des Bondynois, des Balbyniens et des Noiséens. Nous avons ensemble visionné le documentaire « Vague Citoyenne » et avons pu apprécier combien cette bataille des Citoyens et des Elus avait pris de l’ampleur au fil des années au regard des prises de vue réalisées lors de nos 1ers débats au sein de cette assemblée en 2010. Je souhaite remercier le réalisateur du film François GUIEU et le Collectif Eau de Bondy dont je suis membre.
Aujourd’hui, de par nos études, de par le rapport de la Cour Régionale des Comptes, un autre modèle de gestion de l’eau est qualifié de réalisable. A quel pris diront certains ?… Mais soyons là aussi rassurés, le Président ayant informé le dernier Bureau de Territoire que la Banque des Territoires déclarait pouvoir être notre partenaire financier. Ce que le Président nous a encore confirmé ce soir.
Par ailleurs, ces 130 millions d’euros dont on parle en scénario haut peuvent être amortis sur 15, 20 ans. Je vous laisse faire le calcul annuel qui équivaut finalement à n’importe quel grand équipement que nous aurions à réaliser.
Alors, dans ces conditions, pourquoi céder aux menaces inacceptables de SANTINI ?
Monsieur le Président, en 10 ans de bataille, les choses ont évolué dans le bon sens, et nous n’avons jamais été aussi proches d’avoir une gestion de l’eau plus saine, plus sociales et plus démocratique. C’est ce moment-là que certains choisissent pour repartir dans l’autre sens ! Ne faisons pas marche arrière !
Et si vous parvenez à me garantir que Bondy pourra un jour être raccordée à Eau de Paris, je veux bien m’abstenir… Je plaisante… car bien sûr, personne dans cette enceinte ne peut me le promettre avec certitude. Les élus Bondynois de mon groupe voteront donc CONTRE !
Hé bien, il faut leur demander, car c’était un vote à bulletins secrets!
bonjour
Comment les elus de pantin ont ils voté cette proposition? merci pour votre réponse