Eau potable contaminée aux pesticides

L’agence de sécurité sanitaire (Anses)a publié une étude sur la présence dans l’eau du robinet de composés chimiques peu ou pas recherchés lors des contrôles réguliers. Le résidu d’un fongicide interdit, le chlorothalonil R471811, est omniprésent dans l’eau potable et au-delà de la limite de qualité dans un tiers des cas. Lire ci-dessous l’éclairage de Luc Allard, conseiller du Président de Grand Paris Sud et le communiqué de la Confédération paysanne. Liens vers les travaux de l’Anses.

Priorité à la protection des champs de captage et à la limitation de l’usage des pesticides

Cette situation confirme la priorité à donner à la protection des bassins versants des captages et à l’accompagnement des agriculteurs, à l’instar de ce que fait Eau de Paris. Pour ce faire, eu égard aux moyens importants à mobiliser à l’échelle des bassins versants concernés, le modèle coopératif entre les grands acteurs est à privilégier.
S’agissant des métabolites du Chlorothalonil et du Métolachlore, il faut rappeler que la norme correspond aux effets cumulés des faibles doses (consommation de l’eau contaminée pendant toute une vie avec application d’un facteur de sécurité) et non à une toxicité aigue. Par ailleurs il reste une incertitude quant aux effets potentiels cancérogènes de ces doses pendant une vie entière.
C’est la raison pour laquelle le dépassement de 0,1 microg/l n’entraine pas de restriction immédiate. Il semblerait, selon l’ANSES, que la valeur pour laquelle actuellement des restrictions immédiates sont envisagées, à savoir 3 microg/l, n’ait jamais été dépassé (l’article sur ce point n’est cependant pas très clair, mentionnant précédemment des dépassements de plusieurs ordres de grandeur).
Même si la réduction des concentrations dans les nappes se fait sur un temps long après l’arrêt de l’utilisation d’un produit, elle finira par se produire et les efforts de limitation d’usage de certains pesticides doivent absolument être renforcés.
La généralisation du procédé d’osmose inverse basse pression (OIBP, mis en avant par le SEDIF) n’est pas la solution. Le projet présente lui même des inconvénients pour les milieux avec les rejets de concentrats, sans compter les consommations d’énergie très importantes qu’il mobilise. Ce qui ne veut pas dire qu’au cas par cas, la technologie ne puisse trouver sa place, dans les cas extrêmes, sur une partie par exemple du volume à traiter (aux côtés d’autres technologies disponibles moins poussées, membranaires ou non).
Le problème de fond de la généralisation de l’OIBP, au delà de ses impacts environnementaux directs, c’est que cette technologie permet d’enlever tous les composés présents dans l’eau, aboutissant à une matrice pure. Dans ces conditions, on peut craindre, notamment au regard des milliards dépensés pour implanter et exploiter la technologie, que l’on abandonne les efforts préventifs (puisque de toute manière on saura traiter), avec pour conséquence la contamination générale des nappes et d’autres composantes de l’environnement.
Luc Allard

Pesticides : les revirements du gouvernement sont irresponsables

En présentant le plan Eau la semaine dernière, Emmanuel Macron a déclaré que la bataille pour la qualité de l’eau « était gagnée ». Au même moment, son ministre de l’agriculture annonçait au Congrès de la FNSEA* exiger de l’Anses, au mépris de l’indépendance de son expertise, le réexamen de l’interdiction du S-métolachlore. Et hier, un rapport publié par l’Anses montre qu’environ un tiers de l’eau distribuée en France serait non conforme à la réglementation actuelle du fait de la présence généralisée de métabolites de pesticides.

La remise en cause de l’arrêt du S-métolachlore est symptomatique de l’irresponsabilité du gouvernement sur les pesticides. Il trompe les agriculteur·trices, les citoyen·nes, et met un peu plus en danger leur santé et les milieux aquatiques.

En effet, cet herbicide, très utilisé dans les cultures de maïs, sorgho, tournesol ou soja, est présent dans une dizaine de produits commerciaux. Lors des contrôles de la qualité des eaux, superficielles comme profondes, des métabolites du S-métolachlore sont fréquemment détectés à des concentrations dépassant les normes de qualité. Selon l’Anses, les pollutions liées au S-métolachlore ont touché environ 1,6 million de Français·ses en 2020. De plus, l’Anses et l’INRAE ont montré que cette matière active présente des mentions de danger « préoccupantes » pour les utilisateurs·trices (susceptible d’être cancérigène) et une forte toxicité pour les organismes aquatiques [1].

C’est pourquoi, l’interdiction d’utiliser les herbicides à base de S-métolachlore est impérative. Prolonger l’utilisation de cette molécule servant une agriculture mortifère est irresponsable.

L’urgence est à la transition agroécologique et au changement de modèle. L’argument de l’impasse technique est faux [2]. D’autres molécules identifiées aujourd’hui comme moins toxiques existent. Surtout, des pratiques agronomiques (binages mécaniques, rotations, etc) font déjà leur preuve dans de nombreuses fermes pour faire face à la présence des adventices. Soutenir économiquement et financièrement ces techniques agronomiques et accompagner la transition de tous les agriculteurs·trices, voilà ce qui serait responsable.

[1] https://www.anses.fr/fr/system/files/PHYTO2021AST0088.pdf
[2] Alternatives au S-métolachlore et étude de leur mobilisation. INRAE. 17 septembre 2022 : https://hal.inrae.fr/hal-03807462

Polluants émergents dans l’eau potable : le point sur les principaux résultats de la dernière campagne nationale

Le laboratoire d’hydrologie de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) mène régulièrement des campagnes pour mesurer, dans l’eau destinée à la consommation humaine, la présence de composés chimiques qui ne sont pas ou peu recherchés lors des contrôles réguliers. Les données de la dernière campagne sont publiées aujourd’hui. Aperçu des principaux résultats, dont l’analyse de plus de 150 pesticides et métabolites de pesticides, ainsi que d’une cinquantaine de résidus d’explosifs.

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Pesticides dans l’eau du robinet

En diffusant dans l’environnement après leur application, les substances actives des pesticides peuvent se dégrader en une ou plusieurs autres molécules appelées « métabolites ». Certaines de ces substances se retrouvent dans les eaux destinées à la consommation humaine (EDCH). Afin de garantir la santé du consommateur, l’Anses fournit à la Direction générale de la santé les repères scientifiques utiles à la surveillance de la qualité de l’eau du robinet. Pour cela, l’Agence met notamment en œuvre sa méthode pour identifier, parmi les métabolites de pesticides, ceux dont la présence dans les EDCH doit faire l’objet d’une attention prioritaire.

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