Sans surprise, le comité syndical du SEDIF a décidé de reconduire la délégation de service public, en élargissant même son périmètre par rapport au contrat actuel. Comme en 2008, le débat sur le mode de gestion, public ou privatisé, a été escamoté et le vote s’est déroulé à bulletins secrets. Une importante hausse des tarifs de l’eau pour les usager.e.s domestiques est attendue dès le début du nouveau contrat, le 1er janvier 2024.
Le débat sur la gestion publique a fait long feu au SEDIF. Il faut que ceux qui ont expliqué qu’ils étaient ou retournaient au SEDIF pour y mettre en place la gestion publique, en tirent les conclusions : il n’y a pas de place pour la gestion publique au SEDIF qui est l’instrument privilégié de la mainmise du privé sur l’eau en Île-de-France. Pour André Santini, le président du SEDIF, la régie est trop complexe à mettre en œuvre avec l’osmose inverse basse pression (OIBP) et les investissements pharaoniques qu’elle nécessite, il est plus simple de tout confier au privé. Veolia, es-tu là?
Le bureau qui est l’exécutif du syndicat, a donc écarté en amont la gestion publique des choix possibles et a soumis au vote des délégué.e.s deux options : la concession au privé en un morceau (c’est ce qui l’a emporté) ou en deux morceaux (allotissement). Il a fallu toute la ténacité de Dina Deffairi Saissac, conseillère municipale déléguée de Saint-Ouen et Conseillère territoriale de Plaine commune, pour qu’un amendement en faveur de la régie publique soit soumis au vote.
Sur 111 votants, 98 se sont prononcés pour la concession au privé, 10 ont voté contre et 3 se sont abstenus. Comme on le savait, on est très loin d’une majorité acquise à la gestion publique au sein du SEDIF. Le verrouillage politique du SEDIF est écrasant. Il n’a laissé aucune chance à un réel débat de fond et encore moins au choix d’une alternative publique. A remarquer quand même que sur 136 villes membres directement ou indirectement du SEDIF, 25 n’étaient ni présentes, ni représentées à ce scrutin pourtant fondamental. Cela en dit long sur l’état du fonctionnement démocratique de ce syndicat.
Le tarif de l’eau va augmenter de façon conséquente: entre 19 et 37 centimes d’€/m3 HT, soit pour les usager.e.s domestiques (qui paient la TVA) entre 20 et 39 centimes d’€/m3 HT. C’est considérable! Dans la dernière période, certaines personnes s’inquiétaient d’une possible augmentation des tarifs de l’eau en cas de passage en régie publique. Que pensent-elles maintenant de ce qui se passe au SEDIF?
La question de l’osmose inverse basse pression est devenue centrale dans le dispositif du SEDIF. L’investissement est estimé à 800 millions d’euros pour les prochaines années. La pertinence de ce choix d’un point de vue économique comme environnemental n’a pourtant jamais fait l’objet d’un débat de fond au SEDIF.
Dans le nouveau contrat, le délégataire aura la part du lion
Selon les documents du SEDIF, le délégataire sera en charge de :
− L’exploitation, l’entretien et la surveillance de l’ensemble de l’approvisionnement (le prélèvement, la production, le transport et le stockage) et de la distribution d’eau potable,
− La réalisation de travaux de renouvellement de 16 km/an de canalisations dans le cadre d’opérations de voirie, de travaux de renouvellement fonctionnel des équipements, d’opérations ciblées d’opérations de renouvellement patrimonial et de rénovation de certains domaines du système d’information,
− La réalisation de travaux neufs et de réhabilitation, notamment la mise en place de l’osmose inverse basse pression (OIBP) sur les usines de Choisy-le-Roi, Neuilly-surMarne, y compris le renforcement et la sécurisation électrique de ces deux usines, et sur l’usine de Méry-sur-Oise, la refonte du système d’information industriel, la refonte du système de télé-relevé et le développement du site internet et du portail SEDIF tiers,
− La gestion de la télérelève, de la facturation et du recouvrement des recettes auprès des abonnés,
− La relation avec les abonnés et les usagers (gestion des demandes et réclamations, interventions techniques),
− La communication pédagogique et l’information des abonnés, la communication institutionnelle étant assurée par le SEDIF,
− Le pilotage, en association avec le SEDIF, d’activités de recherche, développement et innovation,
− La contribution aux objectifs du SEDIF en matière de préservation des ressources, de développement durable et de politique sociale et sociétale,
− L’appui et le conseil au SEDIF pour la gestion du patrimoine et les travaux sous maitrise d’ouvrage SEDIF,
− L’établissement des rapports d’activité et des reportings réguliers, tant techniques que financiers.
C’est beaucoup plus que dans le contrat actuel où le VEDIF (Veolia) est chargé des travaux liés à l’exploitation des installations et où les travaux structurants et patrimoniaux ne sont pas compris et sont réalisés par le SEDIF sous forme de marchés publics. Là, avec l’OIPB notamment, la logique s’inverse. Il faut bien regonfler la manne de Veolia qui a besoin de cash pour amortir l’achat de Suez…