Sud Francilien: les élus déterminés à reprendre en main la production d’eau potable

Les élus du Sud-Francilien souhaitent retrouver la maîtrise de la production d’eau potable. Ils viennent de créer un syndicat mixte pour peser davantage dans les négociations avec le groupe Suez, l’actuel gestionnaire des usines. Par Alain Piffaretti, publié le 17 février.

L’union fait la force. C’est pourquoi, les élus de quatre grandes intercommunalités du Sud Francilien ont pris la décision de se regrouper pour affronter le groupe Suez, en charge de la production et d’une partie de la distribution d’eau potable sur leurs territoires. Pour y parvenir, ils ont donné naissance à un syndicat mixte fermé, SME, intitulé « Eau du Sud Francilien ».

« Cette initiative montre la détermination farouche des élus à retrouver la maîtrise publique du cycle de l’eau », commente Michel Bisson, président (PS) de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud, élu à la présidence du nouveau syndicat mixte. Situées en Essonne, en Seine et Marne et dans le Val de Marne, les collectivités concernées totalisent 1,4 million d’habitants.

Alliance inédite

« Eau du Sud Francilien » s’est réuni, pour la première fois, le 9 février dernier. La structure transcende les lignes partisanes en associant des « poids lourds » du territoire : outre Michel Bisson, y participent ainsi François Durovray, président (LR) de Val d’Yerres – Val de Seine et président du conseil départemental de l’Essonne, Eric Braive président (DVG) de Cœur d’Essonne Agglomération, et Michel Leprêtre, président (PC) de l’établissement public intercommunal Grand-Orly-Seine-Bièvre.

« Il s’agit d’une alliance territoriale totalement inédite. Cela doit permettre de sortir des féodalités économiques locales et de l’anachronisme d’un monopole privé sur un service public d’intérêt général », commente Philippe Rio, vice-président de Grand Paris Sud en charge de l’eau et maire de Grigny.

Obtention d’informations

Première mission du syndicat : obtenir des informations comptables, refusées jusqu’ici par Suez, pour déterminer avec précision la valeur des usines de production d’eau potable. Les principales installations de ce Réseau interconnecté du sud francilien (RISF) sont situées à Morsang-sur-Seine, Viry-Châtillon et Vigneux. Les collectivités locales ont l’intention de racheter ces sites et ont donc besoin d’en connaître la valeur.

Suez souhaiterait les vendre à un prix avoisinant les 400 millions d’euros. Inacceptable pour les élus et les associations d’usagers. Ceux-ci estiment en effet que le juste prix doit tenir compte des amortissements et des coûts divers, payés par les consommateurs au fil des années. « Suez n’apporte aucune réponse à nos questions. Il n’a pas répondu à la saisine de son déontologue en interne, ni aux questions que nous posons sur les marges réalisées. Le groupe se retranche derrière le secret des affaires », s’agace Philippe Rio.

Prix de l’eau

En coulisse, les négociations se poursuivent néanmoins. Michel Bisson s’avoue d’ailleurs confiant sur la possibilité de parvenir à un accord avec le géant de l’eau. « Suez est un grand groupe, très compétent. Je ne l’imagine pas faire de la surenchère dans ce domaine », avance-t-il. De son côté, Suez indique « prendre acte de la création du syndicat mixte », soulignant la nécessité « d’avoir des interlocuteurs identifiés pour mener les négociations ». Pour le reste, Suez ne souhaite pas s’exprimer davantage sur le sujet.

Sur le fond, les élus expliquent principalement leur motivation par les nécessités d’anticiper la transition écologique et de revoir le prix de l’eau. Pour eux, il est possible de faire baisser les tarifs. « Suez facture 70 centimes le mètre cube d’eau hors taxe, alors que nous l’estimons à 45 centimes », indique notamment Philippe Rio.

Pour Eric Braive, cette situation s’explique par la stratégie du groupe. « Suez considère l’eau comme un bien marchand sur lequel il faut marger pour rémunérer des actionnaires. Pour nous, c’est un bien commun », tranche le président de Cœur d’Essonne. Dans l’actuel bras de fer sur les prix, Grand-Paris-Sud et Cœur d’Essonne Agglomération ont entrepris une action d’éclat en baissant unilatéralement le prix du m3 d’eau pour le bloquer à 45 centimes. Une décision dont Suez conteste la légalité.

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