Le Sedif, qui gère la production et la distribution de l’eau potable pour 133 communes en région parisienne, teste une filtration « membranaire » dans ses usines. Alors que l’établissement public promet de lutter contre la contamination aux PFAS, la régie Eau de Paris et des associations écologistes alertent sur les conséquences du projet. Par Pierre de Baudoin. Extraits.
« La Seine et la Marne vont devenir les poubelles du Sedif »
Le projet suscite toutefois des critiques. La Coordination Eau Île-de-France pointe du doigt son impact écologique. « Avec cette technologie, la consommation d’énergie dans les usines est multipliée par trois, et nécessite des travaux pour renforcer le réseau électrique« , explique Jean-Claude Oliva, le directeur de l’association.
« Et pour produire la même quantité d’eau potable, ça implique de puiser de 25 à 30% d’eau brute en plus. Ce n’est pas bon dans une période où l’on parle de sobriété, en demandant de réduire les prélèvements dans le milieu naturel« , note-t-il.
Jean-Claude Oliva alerte aussi sur l’eau concentrée en polluants rejetée à l’issue du processus. « On parle de plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes de ‘concentrat’ par jour dans les cours d’eau, avec des PFAS, des microplastiques, des sels minéraux, des pesticides… Bref, tout ce qui est filtré est relâché avec des panaches sur des kilomètres, et des conséquences sur la faune et la flore. Pour les PFAS, c’est particulièrement préoccupant, il faut les détruire, pas les rejeter« , détaille-t-il.
Dan Lert, le président d’Eau de Paris, la régie municipale en charge de l’approvisionnement en eau de la capitale ainsi que de sa distribution, dénonce le même problème. « La Seine et la Marne vont devenir les poubelles du Sedif, qui va y redéverser ses déchets toxiques. Tout ça sans aucun égard pour les autres services d’eau présents en aval, qui vont devoir traiter une cascade de pollutions ultra-concentrées. C’est une technologie avec un impact environnemental majeur« , réagit-il, en évoquant les usines d’Eau de Paris à Orly et Joinville-le-Pont, dans le Val-de-Marne.
Le Sedif répond qu’il « s’insurge du qualificatif ‘toxiques’ et s’inscrit en faux« . L’établissement « confirme que les rejets, soumis à arrêté préfectoral, sont uniquement composés d’éléments déjà présents dans la ressource« .
« C’est aux industriels pollueurs de payer »
Alors que le budget total du projet pour les usines de Choisy-le-Roi et Neuilly-sur-Marne s’élève à un milliard d’euros, dont 11 millions d’euros dédiés à l’installation des pilotes, le Sedif estime que ces investissements vont provoquer une hausse de 4 euros par mois et par foyer de la facture d’eau.
« C’est aux industriels pollueurs de payer, pas aux collectivités ni aux consommateurs. La solution face aux polluants éternels, c’est d’interdire leur production« , réagit Dan Lert. Le directeur de la Coordination Eau Île-de-France déplore également « le coût particulièrement élevé » de la technologie, « qui sera répercuté sur les usagers« .
Lire l’article intégral en accès libre