La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne -Sénart a donné, lors de la séance de son bureau communautaire du 18 mai, un avis défavorable concernant les travaux envisagés par le SEDIF à l’usine d’Arvigny pour mettre en place l’osmose inverse basse pression. « Ce choix est coûteux et semble sans lien avec les bénéfices réels par les usagers » souligne la note. Elle pointe l’augmentation de la consommation d’énergie et des prélèvements d’eau dans la nappe du Champigny. Enfin le rejet d’un concentrat d’éléments polluants en Seine, en amont d’autres usines de production d’eau potable et sans aucun traitement, est également remarqué. Principaux extraits ci-dessous et note intégrale à télécharger.
L’usine de potabilisation d’Arvigny est située sur la commune de Savigny-le-Temple.
Elle appartient au Syndicat des Eaux d’Ile-de-France (SEDIF) depuis le 1er janvier 2013.
L’eau brute est prélevée dans la nappe souterraine des calcaires du Champigny via 7 forages situés au nord-ouest de Melun.
Cette nappe stratégique en Ile-de-France utilisée à 90% pour la production d’eau potable est soumise à des pressions quantitatives et qualitatives.
La filière de traitement se compose de deux étapes classiques :
– la filtration sur charbon actif en grain pour réduire la matière organique et retenir les substances nuisibles,
– la chloration pour assurer la désinfection.
Aujourd’hui, les rejets issus de la filière de traitement sont évacués vers les réseaux d’eaux usées (de l’ordre de 1000 m3/j) et d’eaux pluviales (de l’ordre de 400 m3/j).
Il convient de souligner qu’aucune convention n’encadre ces rejets dans les réseaux du territoire de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud. De ce fait, les coûts de transport et de traitement à la station d’épuration de Boissettes de ces rejets sont supportés sans contrepartie financière par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud, estimés à plus de 200 000 €/an.
L’eau produite est de bonne qualité (respecte les limites et références de qualité de la réglementation)
Les chiffres-clés concernant cette usine sont les suivants :
-volume prélevé autorisé : 25 500 m3/j,
-volume prélevé en cas de crise : 50 000 m3/j,
-volume moyen d’eau produite : 22 000 m3/j.
Actuellement, l’usine de production d’eau potable d’Arvigny alimente en eau potable cinq communes de la boucle sud du SEDIF, dans les départements de l’Essonne (Athis-Mons et Juvisy-surOrge) et du Val-de-Marne (Rungis, Villeneuve-le-Roi, Ablon-sur-Seine) soit 77 000 habitants, à partir d’une eau souterraine prélevée et traitée en Seine-et-Marne, en dehors du territoire du SEDIF.
En 2012, l’usine d’Arvigny a cessé d’alimenter le territoire de Sénart, suite à la décision de la communauté d’agglomération de Sénart d’arrêter son captage du Bois des Saint Pères.
Le SEDIF imagine que des événements extrêmes d’inondation ou de terrorisme pourraient affecter simultanément et suffisamment longtemps les usines principales de Choisy le Roi sur la Seine et de Neuilly sur la Marne, au point d’en compromettre la production.
De telles situations n’ont jamais été rencontrées et la capacité marginale disponible d’Arvigny est sans rapport avec les capacités des deux usines évoquées (600 000 m3/j chacune, contre 20 000 m3/j disponibles sur Arvigny).
La vocation « d’ultime secours » ne justifie donc pas l’utilité de cette usine pour le SEDIF, ni les importants investissements la concernant. La position de cette usine, au cœur du territoire de Grand Paris Sud et loin du périmètre du SEDIF, ainsi que l’adhésion récente de la commune de Seine Port au SEDIF pourrait laisser penser à une intention d’expansion de celui-ci vers le sud.
L’intérêt pour GPS serait plutôt de discuter avec le SEDIF d’une possible intégration de cette usine au maillage de production du territoire de Grand Paris Sud et du syndicat mixte fermé à l’étude.
La carte ci-dessous présente la situation de l’usine d’Arvigny au regard du périmètre du SEDIF, en bleu.
Le SEDIF envisage d’ajouter une étape de traitement supplémentaire par Osmose Inverse Basse Pression sur l’usine d’Arvigny.
Avec cette opération, le SEDIF souhaite fournir une eau sans calcaire et sans chlore, débarrassée par ailleurs d’éventuels polluants émergents : une « eau parfaite » selon les termes de son Président.
Il convient de rappeler néanmoins que l’eau distribuée aujourd’hui est conforme à la norme la plus récente et que la filière actuelle de traitement par charbon actif en grain pourrait encore être renforcée si nécessaire.
Ce choix est coûteux et nous semble sans lien avec les bénéfices réels pour les usagers.
De plus, le processus de production d’eau osmosée générant des concentrats nécessite de prévoir leur rejet en Seine via une canalisation de transport des eaux de process.
Cette dernière relierait l’usine d’Arvigny à la Seine en passant par les communes de Savigny-leTemple et Nandy, situées sur le territoire de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud.
Le rejet au milieu naturel devrait se faire sur la commune de Seine-Port au niveau d’un ouvrage de rejet en Seine.
A cet égard, il faut également souligner que la commune de Seine Port, très éloignée du périmètre du SEDIF, s’est vu proposer avec une adhésion au SEDIF la fourniture d’eau osmosée
Des échanges sont en cours entre les services de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud et ceux du SEDIF dans le cadre de la demande d’un arrêté d’autorisation de rejet des effluents de l’usine d’Arvigny dans les réseaux d’eaux usées et d’eaux pluviales de la communauté d’agglomération.
La communauté d’agglomération Grand Paris Sud n’a pas donné d’accord de principe sur les rejets des effluents de la future usine dans ses réseaux.
En effet, ce choix technologique interpelle à raison des différents critères suivants :
le coût d’investissement et d’exploitation :
–le coût global de l’investissement de l’OIBP à Arvigny est estimé à 34 millions d’euros avec une répartition à 75% pour la filière usine et à 25% pour la création du rejet comprenant la canalisation et l’ouvrage au milieu naturel,
–le coût d’exploitation est également renchéri du fait de la consommation supplémentaire d’énergie et de la nécessité de réparer et renouveler régulièrement les membranes dont la durée de vie reste incertaine.
L’impact de la généralisation de cette technologie aux usines les plus importantes du SEDIF sur les factures des usagers, est estimé à 0,25 € HT supplémentaire par m3 d’eau selon le SEDIF, montant qui pourrait être sous-estimé.
Considérant la fragilité constatée de la nappe de Champigny, l’investissement produit sur l’usine d’Arvigny pour la mise en place de cette technologie aurait un intérêt à être affecté sur des mesures de protection de ladite nappe.
– la consommation d’énergie est deux à trois fois plus importante que celle de la filière actuelle.
-la consommation d’eau : par conception, l’évacuation du concentrat (1) engendre une perte significative d’eau, bien supérieure au process antérieur, à l’origine d’une première demande d’augmenter les volumes rejetés aux réseaux d’assainissement qui a été refusée par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud. La solution alternative décidée par le SEDIF est la construction d’une nouvelle conduite pour un rejet en Seine au niveau de Seine-Port. La
perte d’eau est estimée par le SEDIF à 3500 m3 /j (soit presque l’équivalent de consommation d’une population de 15 000 à 20 000 habitants). Il est précisé que l’usine d’Arvigny prélève dans la nappe phréatique des calcaires de Champigny, en tension quantitative et qualitative, à l’origine de son classement en Zone de Répartition des Eaux afin de la préserver.
– la nécessité de reminéraliser l’eau traitée : le niveau de filtration est tel qu’il faut remettre dans l’eau osmosée des éléments minéraux initialement présents, pour garantir sa potabilité,
– le rejet en Seine d’un concentrat d’éléments indésirables, en amont des principales usines de traitement d’eau de surface : aucun traitement des concentrats n’est envisagé dans le projet du SEDIF.
Ceci ayant été précisé, il convient de rappeler que les modifications de l’usine d’Arvigny ont fait l’objet d’une demande de permis de construire du SEDIF pour la construction d’une unité de filtration membranaire haute performance réceptionnée le 24 février 2021, pour avis de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud.
La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart a émis un avis défavorable à cette demande en date du 29 avril 2021.
Ce projet est soumis à enquête publique au titre de la demande d’autorisation environnementale présentée par le Syndicat des Eaux d’Île-de-France, au titre des articles L.181-1 et suivants du code de l’environnement, pour l’insertion d’une unité de traitement membranaire haute performance sur l’usine à puits d’Arvigny et la création d’une canalisation de rejet en Seine sur les communes de Savigny-le-Temple, Lieusaint, Nandy et Seine-Port.
Par arrêté n° 2021-10/DCSE/BPE/E du 9 avril 2021, cette enquête publique a été ouverte par le préfet de Seine-et-Marne pour la période allant du mercredi 19 mai à 08h45 au lundi 21 juin 2021 à 17h00 inclus.
Dans ce cadre, le préfet a notamment invité la communauté d’agglomération Grand Paris Sud à formuler un avis sur le projet, en application des dispositions de l’article R. 181-38 du code de l’environnement, dès le début de la phase d’enquête publique. Seuls les avis exprimés jusqu’au mardi 6 juillet 2021 inclus pourront être pris en considération (article 12 du dit arrêté).
Au vu de tout ce qui précède, il résulte que :
– la qualité de l’eau produite actuellement à l’usine d’Arvigny est bonne et ne soulève pas de question de conformité dans les périodes à venir,
– Le projet d’installation de l’osmose inverse basse pression à Arvigny génère des impacts environnementaux significatifs,
– la saturation hydraulique des réseaux et de la station d’épuration de Boissettes est déjà constatée,
– ce projet ne s’intègre pas dans la politique volontariste et ambitieuse de la communauté d’agglomération Grand paris Sud en matière de Transition sociale et écologique déclinée depuis 2016 sur le cycle de l’eau.
Pour mémoire, ces orientations et enjeux se déclinent suivants les axes : maîtrise publique des biens, du niveau de service et de la relation à l’usager, résilience du territoire face au changement climatique, préservation des cours d’eau, des zones humides et des nappes phréatiques, baisse de la facture de l’usager et lutte contre la précarité hydrique, transparence du prix et de la gouvernance.
Aussi, est-il proposé au bureau communautaire d’émette un avis défavorable à la demande d’autorisation environnementale présentée par le Syndicat des Eaux d’Île-de-France (SEDIF), au titre des articles L.181-1 et suivants du code de l’environnement, pour l’insertion d’une unité de traitement membranaire haute performance sur l’usine à puits d’Arvigny et la création d’une canalisation de rejet en Seine sur les communes de Savigny-le-Temple, Lieusaint, Nandy et Seine-Port lors de l’enquête publique.