Archives de catégorie : Droit à l’eau & Tarification

Opération transparence factures d’eau : les hausses de prix ville par ville

France Libertés et 60 millions de consommateurs révèlent les résultats de leur enquête sur le service de l’eau dans 130 villes françaises : des prix en hausse et des coupures arbitraires !

Dans 85% des grandes villes françaises, le prix de l’eau a augmenté plus vite que l’inflation entre 2011 et 2014. Et, dans une ville sur deux, la hausse est même deux fois supérieure. C’est ce qui ressort de l’enquête réalisée par France Libertés et 60 millions de consommateurs auprès de 130 villes, dont les principaux résultats sont présentés dans le numéro d’avril du magazine. L’agglomération du Grand Évreux, Bar-le-Duc, Agen, Chaumont, le Puy-en-Velay, Annecy et Albi sont en haut de la liste, avec une poussée située entre 19% et 37%. Si l’augmentation moyenne des prix est en partie imputable à la hausse de la TVA, elle n’explique pas tout : déterminer l’évolution du prix de l’eau relève avant tout de choix politiques locaux, d’une stratégie à long terme qui fait trop souvent défaut. Par ailleurs, l’étude montre que la part de l’abonnement pénalise les petits consommateurs. Dans certaines villes, comme Avignon ou Foix, une personne seule paie le mètre cube d’eau 40% plus cher qu’une famille de 4 personnes !

Stop aux coupures d’eau arbitraires

En parallèle, les coupures d’eau pour impayés se poursuivent. Elles sont pourtant illégales depuis février 2014, date du décret d’application de la loi Brottes, et ce toute l’année. Cette illégalité est attestée par les jugements de ces derniers mois condamnant la Lyonnaise des eaux, Veolia, et la régie Noréade à rétablir l’alimentation en eau de la victime et à lui verser des dommages et intérêts. Mais certains distributeurs continuent à utiliser l’arme des coupures d’eau, ignorant les conséquences dramatiques pour les familles qui subissent la violence de cette pratique. Face à l’urgence sociale de nombreuses familles en situation de précarité, nous demandons aux élus, qui ont la responsabilité politique de la distribution de l’eau potable, de se saisir de la question.

Par ailleurs, le vendredi 13 mars dernier, le Tribunal d’instance de Lyon a condamné Veolia à 2.000 € d’amende pour avoir réduit le débit d’eau à un particulier. Cette condamnation valide l’interdiction des réductions de débit pour impayés. Retrouvez le jugement ici.

L’eau est un bien commun et son partage est le signe de notre capacité à vivre au sein d’une société civilisée. L’accès à l’eau pour tous est mis en œuvre dans le cadre du service public ; nous devons aujourd’hui faire un choix entre une approche économique violente et une approche sociale et humaine.

Retrouvez le dossier de presse en cliquant ici.

Ségolène Royal renonce à l’amendement Cambon !

Après avoir apporté son soutien à l’amendement du sénateur Cambon rétablissant les coupures d’eau pour impayé, Ségolène Royal a changé d’avis et assure que le texte original de la loi sur la transition énergétique sera rétabli. La ministre a indiqué : « Je tiens à rassurer sur la question de l’accès à l’eau. Après expertise, j’annonce qu’il n’y aura aucun recul et que le texte sera rétabli. »

La Coordination Eau Île-de-France et la Fondation France Libertés se réjouissent que le bon sens et la mobilisation de ces derniers jours l’aient finalement emporté ! L’amendement Cambon, rejeté par tous les sénateurs de gauche et écologistes, avait également suscité une levée de boucliers des associations de consommateurs, la CLCV en particulier qui a écrit à la ministre. La Coordination Eau Île-de-France et la Fondation France Libertés mais aussi la Coalition Eau et les associations de consommateurs (CLCV, UFC Que choisir) sont unanimes pour préserver le principe de l’interdiction des coupures d’eau.

Dans le même sens, France Eau publique (FEP) qui réunit les principales régies publiques adhérentes de la Fédération nationale des collectivités concédantes et des régies (FNCCR) dont Paris, Nice, Poitiers, Noréade, a annoncé, par la voix de son Président Christophe Lime, lors d’une rencontre avec la Coordination Eau Île-de-France et la Fondation France Libertés, que les régies adhérentes avaient décidé d’un moratoire sur les coupures d’eau en application de la Loi Brottes. Cela fait suite à la décision de la Noréade, une régie publique, de ne plus couper l’eau pour impayés après sa condamnation au tribunal de Valenciennes.

Maintenant que l’amendement Cambon n’est plus, il faut revenir à l’essentiel et à l’urgence pour les familles de faire appliquer la loi Brottes et de faire cesser les coupures qui se poursuivent encore. La Fondation France Libertés et la Coordination Eau Ile-de-France reçoivent tous les jours des témoignages de personnes en difficultés victimes des coupeurs d’eau, le plus souvent Veolia et la Saur. Plus de 500 témoignages ont été recueillis à ce jour. Les deux associations appellent la FNCCR et la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E) à suivre l’exemple de France Eau Publique et à appliquer la loi sans plus attendre.

Les associations rappellent qu’il n’y a pas de familles pouvant payer qui acceptent de vivre sans eau. Personne ne peut vivre sans eau sans endurer un véritable calvaire. Les associations resteront donc vigilantes et mobilisées sur l’application effective des déclarations de Mme la Ministre et le vote en ce sens des parlementaires. Elles sont disponibles pour continuer le travail entrepris dans l’intérêt des familles et du droit universel à l’eau.

Expérience faite, les Anglais sont toujours contre les coupures d’eau

L’Angleterre, souvent utilisée comme modèle en France,  a interdit il y a 16 ans les coupures d’eau pour impayés avec pour conséquence que les usagers démunis ne doivent plus se priver de nourriture pour payer leur eau dans les délais. Après 10 ans sans coupure, le gouvernement anglais a évalué les effets réels de cette décision et a conclu qu’il ne fallait pas  rétablir les coupures d’eau malgré les aspects négatifs associés à leur suppression.

L’abolition des coupures  d’eau est parfois présentée comme devant mener à une explosion du nombre de ménages avec des dettes d’eau. En Angleterre,  cette explosion n’a pas eu lieu et le nombre de ménages endettés a peu varié. 

La suppression des coupures d’eau est  une mesure à visée  sociale  introduite par un gouvernement soucieux de protéger  les ménages des mesures trop expéditives des distributeurs d’eau. Elle a pour effet de réduire la pression sur les usagers ayant à payer leur facture d’eau, ce qui leur  permet de retarder le paiement des sommes dues mais pas d’échapper au paiement. Il est faux de prétendre  comme le fait  le Sénateur Poniatowski que « Quiconque a les moyens de payer sa facture d’eau mais qui s’y refuse, ne pourra être inquiété. » . En réalité, les distributeurs anglais sont tellement efficaces  pour inquiéter les usagers qu’ils n’ont pas subi d’augmentation sensible des créances irrécouvrables depuis qu’ ils ont perdu l’arme redoutable des coupures. En revanche,  en 10 ans,  ils n’ont pas hésiter à augmenter le prix réel de l’eau de 19% .

Les distributeurs anglais ont observé une croissance des délais de paiement des factures d’eau et ils ont identifié quatre causes à ce phénomène, dont une seule est liée aux coupures d’eau. Comme prévu, les retards de paiement sont dans une large mesure liés aux  difficultés économiques des usagers  qui doivent payer une eau de plus en plus chère alors qu’ils ont des revenus  en baisse. Certains impayés sont dus au manque d’informations des distributeurs sur les usagers qui ont de  l’eau sans avoir jamais signé un contrat.  La loi anglaise a été finalement amendée  en 2010 pour permettre les poursuites des mauvais payeurs par les voies classiques, pas par la voie des coupures.

Tout le monde souhaite lutter contre les usagers de mauvaise foi mais pas en coupant l’eau de tous les usagers qui ont un simple retard de paiement.  La coupure d’eau doit rester une  mesure de dernier recours  à n’utiliser que sous le contrôle du juge. Cette solution qui respecte les droits de chacun, a été mise en œuvre avec succès depuis de nombreuses années en Belgique.

Puisse l’Assemblée nationale donner sa préférence au droit des usagers à l’eau plutôt qu’au droit des distributeurs à couper l’eau des ménages. La proposition du Sénat est une mesure de régression sociale tout à fait malvenue en cette période de crise.

Henri Smets

Président de l’Association pour le développement de l’économie et du droit de l’environnement (ADEDE).

Les mensonges du sénateur Cambon

Retrouvez ci-dessous le débat in extenso concernant l’amendement Cambon au Sénat pour réintroduire les coupures d’eau dans la loi. Il est accompagné d’une désintox permettant de mettre en lumière les erreurs ou les manipulations de certains ainsi que les risques pour les plus démunis en France.

Mme la présidente. – Amendement n°146 rectifié, présenté par MM. Cambon, Revet, P. Leroy, Pierre et J. Gautier, Mme Procaccia et M. de Nicolaÿ.

Après l’article 60

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : « à la résidence principale de toute personne ou famille mentionnée au premier alinéa du présent article ».

M. Christian Cambon. – Voilà un amendement de bon sens : en étendant la trêve hivernale, la loi Brottes a interdit les coupures d’eau pour tous les foyers, qu’ils soient en difficulté ou mauvais payeurs. Ce n’était pas l’intention du législateur. Rectifions cette erreur.

Faux : il ne s’agit pas d’une erreur mais de l’intention d’étendre à toute l’année l’interdiction des coupures d’eau dans le cadre de la loi Dalo de 2007. Les débats parlementaires de l’époque sont clairs. Ce n’est pas parce que les députés n’ont pas débattu de ce point en 2013 qu’il s’agit d’une erreur. La loi est claire et les juges l’ont confirmé à 4 reprises.

En Grande-Bretagne, le montant des impayés a été multiplié par cinq après l’interdiction en 1999 des coupures d’eau dans les habitations principales, ce qui a renchéri le prix de l’eau par trois.

Faux : le taux d’impayé en Angleterre est de 3%, ce qui ne correspond pas à une multiplication par 5. Le  prix de l’eau en Angleterre  n’a évidemment pas triplé. Il s’agit d’une jolie blague du Sénateur Cambon pour tenter de faire peur. La vérité est que le prix de l’eau en Angleterre a augmenté de 19 % en dix ans et que le Gouvernement anglais  a dû intervenir auprès des distributeurs pour empêcher de nouvelles augmentations injustifiées de prix. 

Cet amendement a suscité beaucoup de réactions, car il a été mal compris. Je veux dissiper tout malentendu : les plus modestes restent protégés – et le prix de l’eau aussi. Laisser le droit en l’état reviendrait à faire payer par les plus modestes les manquements de quelques-uns.

Faux : les plus modestes ne sont pas protégés. Nous avons reçu plus de 500 témoignages de victimes de coupures d’eau illégales qui touchent les plus démunis. Les distributeurs d’eau sont hors-la-loi et vont profiter de cet amendement pour faire perdurer des pratiques détestables et inhumaines.

Mme la présidente. – Veuillez conclure.

M. Christian Cambon. – On ne peut pas me suspecter… Je suis moi-même l’auteur d’une loi qui a aidé 20 000 foyers modestes à payer leur facture d’eau.

Vrai : c’est d’autant plus surprenant de la part du Sénateur Cambon de proposer un tel amendement qui laissera dans les mémoires son action contre les plus démunis.

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. – Une erreur a été effectivement commise à l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles. Merci pour votre correction, avis favorable.

Mme Ségolène Royal, ministre. – Avis favorable.

M. Michel Le Scouarnec. – Le groupe CRC votera contre cet amendement. Quels sont vos chiffres sur les impayés ? Vous n’avez pas de statistiques fiables, les factures d’eau n’ont pas explosé. Tandis que votre proposition est fondée sur la défiance, nous faisons confiance à nos citoyens. Rares sont les fraudeurs. L’eau, comme l’énergie, est un bien essentiel. Chacun y a droit alors que la crise sévit. Cet amendement est synonyme de recul social. Notre modèle social va-t-il voler en éclats ?

Vrai : aucune statistique n’est disponible sur les coupures d’eau et nous le demandons instamment sans avoir de réponse à ce jour. La défiance plutôt que la confiance permet tous les abus et alimente le business des coupures d’eau de plus de 10 millions d’euros par an.

M. Roland Courteau. – Cet amendement recentre le dispositif sur les seules familles bénéficiant des tarifs sociaux. Or certains foyers refusent les aides ou ignorent qu’ils peuvent y prétendre. Quelques 30 % des personnes éligibles au RSA socle ne le demandent pas, 70 % pour les personnes au RSA activité. Et les travailleurs pauvres ? Et les personnes victimes d’un accident de la vie ? Je préfère un bouclier à une passoire.

Vrai : la grande majorité des témoignages que nous recevons concernent des familles en difficulté qui ont la volonté de payer mais se voient refuser tout échéancier par les distributeurs d’eau. Ils sont aussi confrontés à des services sociaux débordés qui n’arrivent pas à les soutenir et à traiter les dossiers avec suffisamment de rapidité. Nous aussi préférons un bouclier à une passoire.

M. Ronan Dantec. – Cet amendement a suscité beaucoup d’émoi. D’après les associations, beaucoup de personnes fragiles ne correspondent pas aux critères sociaux. Couper l’eau est d’une extrême violence. Je ne crois pas que passer par un amendement soit la solution. Le gouvernement doit engager une concertation avec les associations. Sans quoi on prend le risque de mettre des gens que les structures sociales n’ont pas repérés en grande difficulté. Ce n’est peut-être pas l’intention des auteurs de l’amendement. Le groupe écologiste votera contre.

Vrai : la concertation a commencé mais l’amendement vient contrecarrer notre travail pour convaincre les distributeurs d’améliorer les pratiques largement abusives à ce jour.

M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. – Vous faites une erreur d’appréciation : nous ne faisons que corriger une erreur de rédaction dans la loi Brottes. (Mme Éliane Assassi proteste) La protection des précaires demeure.

Faux : les différents jugements rendus récemment démontrent que les précaires n’étaient même pas protégé par la loi Brottes puisque les pratiques de coupures d’eau illégales n’ont jamais cessées et qu’il faut aller devant les tribunaux pour les faire respecter.

Cependant, en l’état actuel, si nous ou Mme la ministre ne payons pas notre facture d’eau, on ne pourra rien nous demander !

Faux : le recouvrement des impayés n’est en rien lié à la coupure d’eau et Mme la Ministre se retrouverait avec un huissier à sa porte si elle ne payait pas sa facture.

Mme Éliane Assassi. – Cet amendement amalgame familles modestes et mauvais payeurs.

Vrai : les clients qui ne payent pas sont tous de mauvaise foi pour les distributeurs et c’est bien le problème de départ. Aucune famille ayant témoignée auprès de France Libertés ne refuse de payer, ils veulent simplement de l’aide pour étaler la dette et un appui des services sociaux s’ils sont éligibles.

La justice a condamné la Lyonnaise des eaux dans l’Aisne, Véolia-Eau ailleurs et une régie publique dans le nord pour avoir procédé à des coupures d’eau à des personnes démunies… (MM. Christian Cambon et Rémy Pointereau protestent)

M. Christian Cambon. – En ce cas, la loi s’applique !

Vrai : mais pourquoi les distributeurs n’appliquent pas eux-mêmes la loi pour éviter d’encombrer les tribunaux ?

Mme Éliane Assassi. – … inconnues des services sociaux. Il y a d’autres moyens de lutter contre les impayés que la coupure d’eau. Par exemple, des poursuites. Cet amendement est très dangereux.

Vrai : les moyens de lutter contre les impayés sont nombreux. Le premier est de proposer un échéancier de paiement, ce qui n’est quasiment jamais fait par les distributeurs d’après les témoignages que nous recevons. Ils appliquent la loi du plus fort, c’est effectivement plus simple.

À la demande du groupe CRC, l’amendement n°146 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente – Voici le résultat du scrutin n° 105 :

Nombre de votants 334

Nombre de suffrages exprimés 334

Pour l’adoption 196

Contre 138

Le Sénat a adopté.

L’article additionnel est inséré.

Mme Éliane Assassi. – C’est bien dommage. Où est la gauche ? Vous avez donné un avis favorable madame la ministre…

Mme Ségolène Royal, ministre. – On ne supprime rien !

Faux : malheureusement si, Madame La Ministre, vous supprimez la protection que devrait recevoir toute personne démunie non connue des services sociaux et vous supprimez aussi la pression faite notamment sur les multinationales de l’eau pour qu’elles changent leurs pratiques violentes et inhumaines pour plus de 100.000 familles en France chaque année. La coupure d’eau n’est pas la solution dans une société de droit. La droite anglaise l’a bien compris, il est dommage que notre gouvernement de gauche ne le comprenne pas !

Ségolène Royal soutient le vote par la droite de l’amendement Cambon au Sénat

Le jeudi 19 février au soir, l’amendement présenté par M. Christian CAMBON afin de rétablir les coupures d’eau a été approuvé au Sénat par un recours au vote public, demandé par l’UMP. C’est donc par un vote des groupes mais dans une salle vide que cet amendement a été retenu par 196 voix pour et 138 contre.

À notre grande surprise, le groupe PS et l’ensemble des partis de gauche ont été désavoués par Madame la Ministre Ségolène Royal qui a soutenu l’amendement. Malgré les décisions de justice et contre l’avis du Ministère public, le gouvernement défend une position au profit des distributeurs d’eau qui se félicitent de cet amendement autorisant leurs pratiques illégales.

Et pourtant, les 500 témoignages reçus depuis maintenant 8 mois et les 4 jugements condamnant des opérateurs de l’eau – Suez, Veolia, Noréade et la SAUR – et les 3 en cours, auraient dû permettre au gouvernement de se rendre compte de la situation des victimes des coupures d’eau. Il est catastrophique de sanctionner des familles en précarité qui se battent pour s’en sortir et qui sont mises à mal par des distributeurs d’eau qui ne pensent qu’à leur équilibre économique et oublient l’essentiel de leur service public : l’accès à l’eau pour tous.

Une réalité fantasmée au service des puissants !

L’argumentaire du Sénateur Cambon est le même que celui des multinationales de l’eau qui n’appliquent pas la loi : la fin des coupures d’eau entraînerait une explosion des impayés qui mettrait en danger le service public. Sur quelle base peuvent-ils soutenir cette position ?

En Angleterre, les coupures d’eau sont interdites et les impayés sont de l’ordre de 3% ce qui est un niveau tout à fait normal. Il doit être mis en rapport avec le niveau de précarité des populations démunies anglaises beaucoup plus nombreuses qu’en France. Le gouvernement anglais de droite a récemment refusé de ré-autoriser les coupures d’eau en motivant que cette pratique était d’une autre époque.

La FNCCR s’est empressée hier soir de publier un communiqué de presse pour se féliciter de l’amendement Cambon tout en notant les dysfonctionnements des pratiques aujourd’hui. Si des dysfonctionnements existent, ils auraient dû être corrigés par la simple application de la loi Brottes. Comment des élus peuvent-ils défendre des pratiques illégales, immorales et inhumaines et se féliciter d’un changement de la loi qui va permettre de continuer les abus dont sont victimes les plus démunis ?

Nous allons continuer notre combat avec le soutien de nombreux députés de Gauche au sein de l’Assemblée nationale pour le rejet de cet amendement quel que soit l’avis du gouvernement. Nous allons continuer nos actions devant les tribunaux pour faire appliquer la loi qui est chaque jour bafouée au nom du profit.

Coupure d’eau à La Réunion : le témoignage d’une jeune citoyenne indignée

Nous avons reçu récemment le témoignage saisissant de Mme A qui signale la coupure d’eau intervenue chez sa sœur, habitante de Saint Leu à  l’île de La Réunion, desservie en eau par la Cise, filiale de la Saur (témoignage ci-bas).

Pour aider sa sœur, Mme A contacte la presse locale et voici l’article publié >>> ici. On y apprend que la Cise prend l’initiative de conditionner l’application de la loi à l’ouverture d’un dossier auprès des services sociaux ! Et comme les autres fournisseurs qui enfreignent la loi Brottes, elle facture des frais de fermeture et d’ouverture des compteurs très élevés.

Le témoignage de Mme A :

« Chère Fondation,
Bonjour,

Merci à vous pour tout ce que vous faites pour les petits êtres humains que nous sommes. C’est grâce à votre site que j’ai eu connaissance de la loi Brottes. Il faut dire qu’à la Réunion les médias et associations de consommateurs n’ont pas diffusé la promulgation de cette loi. Je tenais à vous informer du cas de ma sœur. Je prends la parole à sa place car je suis révoltée du comportement de son distributeur d’eau. Elle m’a donnée son accord pour cette démarche.
Ma sœur, mère célibataire de deux enfants (1 et 5 ans) et en situation de précarité, a des difficultés pour payer ses factures comme pas mal de monde en France. Depuis la sortie de la loi Brottes, son distributeur a interrompu la distribution en eau chez elle au moins 4 fois. A chaque fois elle devait payer l’intégralité de la facture pour avoir de nouveau de l’eau. Une des coupures a même duré plus d’un mois. La 4ème fois c’était le 3 février 2015. Étant au courant de la loi, j’ai décidé de contacter la Cise pour elle. Dans mon imaginaire, je croyais en la bonne foi des gens qui y travaillent. Et ce fut la désillusion totale. J’ai pris contact par téléphone avec M. C du service recouvrement pour défendre le cas de ma sœur, et lui rappeler que nul n’est censé ignorer la loi. Au départ l’échange s’est bien passé mais dès que j’ai commencé à citer la loi, il m’a interrompu pour me dire que les gens lisent parfois n’importe quoi sur Internet. Pendant tout le reste de l’échange, il a été hostile et à la limite du grossier, m’interrompant sans cesse lorsque je voulais lui parler des dispositions de la loi. Je vais vous résumer à peu près ce que M. C m’a dit:

-La Cise est autorisée a couper l’eau chez une personne sauf quand cette personne a sollicité une aide spéciale auprès des services sociaux.
-Il s’est lui même renseigné sur cette loi et les « gens » croient ce qui les arrange.
-Aucune réouverture ne sera effectuée tant que m’a sœur n’aura pas payé l’intégralité de sa facture.
-Les gens font appel à cette loi alors qu’ils n’y connaissent rien. S’ils avaient lu l’intégralité de la loi, ils se rendraient comptent que la loi n’interdit pas les coupures d’eau en cas d’impayés.
-Cette loi ne concerne pas les fournisseurs d’eau mais uniquement les distributeurs de gaz, de chaleur et d’électricité.
-Le service juridique de la société s’est intéressé à cette loi. Selon ce service, la Cise a le droit d’interrompre la fourniture en eau chez les gens en cas d’impayés.

Voilà le compte rendu de ce que Mr C m’a dit. A la suite de notre échange, j’ai été sidérée d’une telle mauvaise foi. Je lui ai dit que moi aussi je me suis renseignée. J’ai cité « France libertés ». J’avais déjà contacté Energie info, allo service public, un avocat, une association de consommateurs pour me confirmer la promulgation de la loi. Ils m’ont tous confirmé que les coupures d’eau pour impayés sont illégales. Rien à faire, il m’a superbement ignorée et a été désagréable.

J’ai été moi même dans le même cas que ma sœur en août 2014. J’ai été privée d’eau pendant 5 semaines, jusqu’à ce que je tombe par hasard sur votre site. J’ai suivi les démarches. J’ai écris à mon fournisseur (Veolia) et au maire comme indiqué dans l’Aide mémoire. Veolia m’a appelé dès le lendemain et ma fourniture en eau a été rétablie. Le maire de ma commune lui ne m’a jamais répondu. Au vue du succès de ma démarche, j’ai voulu la réitérer pour aider ma sœur. Vu l’urgence de sa situation, j’ai décidé d’appeler directement la Cise pour faire avancer les choses. Ça n’a pas marché. A ce jour, ma sœur et ses enfants se retrouvent sans eau pour une facture de plus de 200 euros. Facture d’ailleurs qui présente des irrégularités. Les services sociaux refusent de l’aider car elle a déjà bénéficié d’une aide. Les demandes d’aide ne sont pas renouvelables autant que l’on veut.
Ma sœur le vit très mal et n’en peut plus de toutes ces coupures. C’est dans le but de faire avancer les choses en France que je vous écris.
A l’île de la Réunion, les coupures pour impayés sont courantes, il est dommage que les distributeurs ne respectent pas la loi par pure cupidité et nous privent d’une vie digne.

En espérant que mon témoignage pourra faire avancer votre combat,
je vous souhaite une bonne continuation pour les actions que vous entreprenez à travers le monde entier.

Bien cordialement

A, une jeune citoyenne française indignée. »