La commission consultative des services publics locaux (CCSPL) d’Est Ensemble s’est réunie lundi 25 septembre pour examiner les rapports sur le prix et la qualité du service (RPQS) pour l’eau, l’assainissement et les déchets. Compte-rendu de Julie Baudrillard qui représentait la Coordination EAU IDF. Le rapport de Veolia eau Île-de-France (VEDIF), délégataire d’Est Ensemble jusqu’au 31 décembre 2023, montre une hausse de près de 8% de ses bénéfices d’une année sur l’autre. Dans ces conditions qu’est-ce qui justifie la hausse des tarifs intervenue le 1er janvier 2023?
Assainissement: le plan baignade coûte cher à la collectivité
Le bilan du rapport d’Est Ensemble sur l’assainissement a été présenté par Julie Tran, directrice adjointe du service eau et assainissement. Il est plutôt positif avec une connaissance patrimoniale du réseau qui s’améliore d’année en année et un renouvellement du linéaire en forte augmentation.
- Le linéaire renouvelé en 2022 est de 7,9 km (contre 1,99 km en 2021) dont 6,8 km dont le cadre du plan baignade (pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris). En effet, de mauvais branchements entre eaux usées et eaux pluviales provoquent des écoulements d’eaux usées dans la Marne. Cela concerne une petite partie de la ville de Montreuil qui se situe sur le bassin de la Marne.
Puisque la majorité du renouvellement s’est fait en raison des JOP, ces travaux ont-ils été financés et à quelle hauteur ?
Julie Tran a répondu que l’Etat finance 45 % du montant des travaux par le biais de l’Agence de l’eau Seine Normandie. Jean-Claude Oliva, vice-président d’Est Ensemble, chargé de l’eau et de l’assainissement, estime regrettable qu’il n’y ait pas davantage d’aides de l’Etat sur des travaux imposés au territoire. On peut craindre qu’une fois passés les JOP de Paris, la motivation retombe et qu’à nouveau, les mauvais branchements se multiplient.
Julie Tran indique ensuite que 84 % de la réhabilitation du réseau sur domaine public (dédoublement du réseau eaux usées et pluviales) a déjà été réalisée. Il reste à faire la mise en conformité des parcelles privées, qui est de la responsabilité des propriétaires.
Elle concerne 20 parcelles sur 600, qui rejettent des eaux usées dans les eaux pluviales. L’Agence de l’eau finance les travaux de mise en séparatif, de l’ordre de 4 500/5 000 euros en fonction de la parcelle et de la nature des travaux, mais les propriétaires doivent faire l’avance, ce qui est un frein important.
Bilan sur l’eau 2022
En ce qui concerne le bilan d’Est Ensemble sur l’eau, Julie Tran souligne que le territoire vient de passer en régie publique. Est Ensemble s’est substitué au SEDIF mais Veolia eau Île-de-France reste le délégataire jusqu’à la fin du contrat le 31 décembre 2023. Aussi c’est le rapport du VEDIF qui est examiné. Ce rapport est établi pour tout le SEDIF et seul un paragraphe concerne exclusivement Est Ensemble.
Pour l’instant, la fourniture d’eau est toujours assurée par le SEDIF, mais à partir de 2024, une partie de l’eau d’Est Ensemble sera fournie par Eau de Paris.
Nos questions portent essentiellement sur le rapport du VEDIF. En l’absence du délégataire, certaines questions n’ont pas pu trouver de réponse.
Les techniques de production d’eau
Le rapport de VEDIF mentionne une première fois la filière de nanofiltration dans l’usine de Méry-sur-Oise, et une seconde fois le projet abandonné d’osmose inverse basse pression (OIBP) dans l’usine d’Arvigny. Il ne mentionne toutefois pas le projet de mise en place de l’OIBP sur les trois usines, Méry-sur-Oise, Choisy-le-Roi et Neuilly-sur-Marne (qui dessert Est Ensemble)
On se réjouit que ce projet très coûteux et peu écologique ait été stoppé sur Arvigny mais le rapport ne mentionne pas les raisons de l’abandon de ce projet (avis critique de la Mission régionale d’autorité environnementale, levée de bouclier des élus locaux, refus de l’Agence de l’eau de subventionner le projet, et in fine, pas d’autorisation préfectorale pour les travaux). On aimerait également savoir où en est le projet sur les usines de Méry-sur-Oise, Choisy-le-Roi et Neuilly-sur-Marne.
Jean-Claude Oliva indique que le rapport de la Commission nationale du débat public vient d’être publié à la suite du débat qui a eu lieu entre le 20 avril et le 20 juillet 2023. Il reprend un certain nombre d’avis critiques qui se sont exprimés, notamment la crainte de l’impact négatif des rejets de concentrats d’usine dans les cours d’eau, à la fois sur la biodiversité et sur la qualité de l’eau prélevée par les usines de production d’eau potable en aval.
Il précise que la restitution de l’étude aura lieu le mardi 26 septembre. Ensuite, le SEDIF aura 3 mois pour dire quelles suites il donne au projet.
L’OIBP est dans le renouvellement du marché du SEDIF ; mais une fuite des documents de réponse de Suez a été organisée au bénéfice de Veolia, selon des informations relayées par les médias. Le marché pourrait donc être annulé.
Le nettoyage de la voirie publique
Il est question (p. 111 du rapport du VEDIF) du tarif voirie publique, pour les usages d’arrosage et de lavage sur les routes et voies ouvertes à la circulation. Cette eau est facturée à moitié prix par rapport au tarif général de consommation.
Pour ce type d’usages, l’utilisation d’eau brute est-elle envisagée par Est Ensemble ?
Julie Tran précise qu’Est Ensemble se penche depuis longtemps sur le sujet, avec une première étude sur les ressources en eau non conventionnelles menée en 2018-2019, dont le service s’approprie les résultats aujourd’hui.
Il existe plusieurs solutions pour aller chercher de l’eau brute : via le Canal de l’Ourcq, par le biais d’Eau de Paris, qui pourrait étendre son réseau d’eau non potable en frange de nos territoires ; il y a également des nappes perchées ou les eaux d’exhaure des stations de la RATP.
La tarification de l’eau et de l’assainissement
(P. 112-115 du rapport de VEDIF)
L’écart s’est creusé entre Est Ensemble et le SEDIF à partir du 1er janvier 2023: 1,4318€/m3 à Est Ensemble contre 1,5218€/m3 au SEDIF. Est Ensemble n’a pas augmenté son tarif alors que le SEDIF l’a augmenté de 21,5%!
La redevance d’assainissement à Est Ensemble (qui comprend une part Est Ensemble, une part Conseil départemental du 93 et une part SIAAP) est plus élevée que la moyenne de la redevance d’assainissement dans les territoires desservis par le SEDIF. C’est dû essentiellement au fait que la redevance du SIAAP est plus faible dans les départements de grande couronne (77, 78 et 92).
Des dépenses d’énergie en baisse ?
Dans les charges mentionnées par le rapport de VEDIF apparaît une très forte baisse des dépenses d’énergie de 37,6% (p. 125):
les dépenses d’énergie (9 770 k€), en baisse de 3 678 k€
Cela nous semble très étonnant dans le contexte actuel. Jean-Claude Oliva partage cette perplexité et souligne qu’une des principales justifications des hausses de tarifs de l’eau et de l’assainissement en début d’année 2023 était précisément la hausse des coûts de l’énergie !
Les services d’Est Ensemble n’ont pas de réponse sur ce point qui concerne VEDIF.
Des contentieux en hausse!
Le rapport du VEDIF fait état d’une forte hausse des frais honoraires actes et contentieux. À quoi est-ce lié ?
Les services d’Est Ensemble n’ont pas de réponse sur ce point, qui concerne le VEDIF.
Les fabuleux résultats de VEDIF
En 2022, la différence entre les produits (505 981 K€ ) et les charges (482 803 K€) de VEDIF était de 23,178 millions euros. Contre 491 944 – 470 611 K€, soit 21,333 millions de résultats en 2021, soit une progression de 7,96 % d’une année sur l’autre. Qui dit mieux?
Compte tenu de ces résultats très élevés et en forte progression (et de la baisse de sa facture d’énergie) en 2022, pourquoi Veolia a-t-il augmenté ses tarifs de 5,5% au 1er janvier 2023 ?
Jean-Claude Oliva ne s’explique pas non plus cette hausse des tarifs pour les usagers domestiques, à laquelle Est Ensemble a échappé côté SEDIF, mais pas côté VEDIF.
Télécharger le rapport de VEDIF