Tout ça pour ça?

Quels gains attendre du projet du SEDIF, combinant osmose inverse basse pression et nanofiltration, par rapport à la situation actuelle? Tentative de réponse à partir des éléments fournis dans le cadre du  débat public sur l’eau potable, en cours jusqu’au 20 juillet.

Dans la présentation synthétique du projet du SEDIF (que vous pouvez trouver ici), il y a un tableau fort intéressant en page 9, voir ci-dessous:

Focus sur les pesticides totaux
C’est le principal sujet de préoccupation pour la qualité de l’eau du robinet. La valeur maximale  mesurée aujourd’hui dans l’eau potable du SEDIF (à Choisy-le-Roi et à Neuilly-sur-Marne) est 0,29 microgrammes/l.
La valeur estimée avec le projet serait 0,14 microgrammes/l
Cela ne ferait donc que diviser par deux la concentration actuelle des pesticides dans l’eau potable. Une amélioration somme toute limitée!
Focus sur la somme des PFAS
La valeur maximale mesurée aujourd’hui dans l’eau potable du SEDIF (à Choisy-le-Roi et à Neuilly-sur-Marne) est 0,03 microgrammes/l.
La valeur estimée avec le projet serait 0,00
Mais ce n’est pas vraiment significatif, la valeur de départ étant déjà très faible, les PFAS sont surtout dans l’Oise.
Focus sur les perchlorates 
La valeur maximale mesurée aujourd’hui dans l’eau potable du SEDIF (à Choisy-le-Roi et à Neuilly-sur-Marne) est 1,84 microgrammes/l.
La valeur estimée avec le projet serait 0,89 microgrammes/l.
Là aussi, la concentration actuelle est divisée par deux. Un résultat plus problématique car les concentrations de ces substances sont relativement élevées.  
Il faut noter que la comparaison est établie avec les usines du SEDIF qui n’ont pas de nanofiltration. On peut raisonnablement penser que le gain d’efficacité est encore plus réduit pour l’usine de Méry-sur-Oise qui a déjà la nanofiltration.

Pourquoi l’amélioration est-elle aussi faible?

En théorie, l’osmose inverse basse pression enlève tous les micropolluants et les sels minéraux. Mais il faut la reminéraliser pour qu’elle devienne potable. Le SEDIF a fait le choix de la mélanger à de l’eau nanofiltrée. Mais l’eau nanofiltrée contient des micropolluants qui se retrouveront dans le mélange final. Quel est le pourcentage eau osmosée / eau nanofiltrée dans le mélange final? Nous ne le savons pas. Si c’est 75/25, la concentration des micropolluants serait au mieux divisée par quatre par rapport à la situation actuelle. Si c’est 80/20, elle serait divisée par 5.
Il y a sans doute aussi une question sur la taille des pores des membranes qui se réduit de plus en plus. Voir tableau ci-dessous (p7 de la synthèse du projet).
Jusqu’à un certain point, en nanofiltration, la concentration des polluants est indépendante de la taille des pores. Les grosses molécules ne passent pas mais les petites traversent la membrane. Si la concentration des plus petites molécules augmente du fait de l’augmentation générale de la pollution de l’environnement, on aura  une augmentation de la concentration des micropolluants au final.
Le projet du SEDIF n’apporte pas une garantie absolue sur la qualité de l’eau potable. Les gains ne sont pas à la hauteur des promesses.  

Quel retour d’expériences ?

La réponse du SEDIF (voir ici) à une question sur l’efficacité et le retour d’expérience de la technologie prévue pour son projet est éclairante.

La technologie envisagée (OIBP + nanofiltration) n’a jamais été utilisée nulle part!

L’OIBP seule a déjà été utilisée mais pour des installations beaucoup plus petites que les usines du SEDIF : 20 000 m3/jour contre 400 000 m3/jour. C’était pourtant l’argument employé par les ingénieurs du SEDIF pour disqualifier …les charbons actifs utilisés par Veolia à Lausanne (voir ici) ! Or l’usine de Lausanne produit 100 000 m3/jour, soit bien davantage que les usines utilisant l’OIBP prises en référence par le SEDIF…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *