OIBP: pas d’attente des usagers

Contribution de l’association Eau publique Orge Essonne et de la Coordination EAU Ile-de-France à l’enquête publique sur le projet de traitement par osmose inverse basse pression (OIBP) de l’eau produite par l’usine d’Arvigny à Savigny-le-Temple. Un projet mensonger dépassé, dangereux, coûteux, contraire aux besoins des usagers, et à la préservation de la planète.

Présentation de l’association Eau publique Orge Essonne

L’association Eau publique Orge Essonne, créée il y a 7 ans, réunit des citoyens, simples habitants ou élus, et des associations de la communauté d’agglomération « Cœur d’Essonne ». Son objet est de promouvoir une gestion publique, démocratique, soutenable et équitable de l’eau, en lien étroit avec les usagers et leurs associations, dans le respect de la préservation de la ressource et de l’environnement.

S’y ajoute une mission de défense immédiate des droits individuels et collectifs des usagers des services d’eau potable ou d’assainissement, leur accompagnement et leur représentation dans toutes les démarches entreprises à cette fin.

Compte tenu de l’échelle requise d’appréhension globale du petit cycle et du grand cycle de l’eau, et des niveaux de décisions relatives à la maîtrise de l’eau potable et à l’assainissement en Ile de France, notre intervention s’est naturellement élargie au delà du périmètre de notre agglomération du centre Essonne (21 communes et 200 000 habitants).

Nous siégeons à ce titre en qualité d’administrateur de la régie publique Eau Cœur d’Essonne (collège usagers) à la CCSPL de cette agglomération, à celle du Syndicat de l’Orge et à la commission locale de l’eau du SAGE Orge-Yvette. Affiliée à la coordination eau Ile de France, nous contribuons également à son expression et à son intervention dans le champ du Département l’Essonne et de l’agglomération GPS (partagée entre l’Essonne et la Seine-et-Marne.)

A tous ces titres, nous sommes très directement concernés et particulièrement inquiets à l’issue de notre examen du projet de travaux du SEDIF et de son délégataire Veolia pour l’usine d’Arvigny de Savigny-le-Temple.

Un projet entaché de 6 graves défauts compensés par aucun avantage

En effet, au terme de la découverte et de la lecture attentive des centaines de pages de ce dossier, nous n’avons relevé aucun avantage à ce projet mais, par contre six caractéristiques qui le rendent absolument contraire :

  • à nos besoins et nos attentes en notre qualité d’usagers essonniens du service public de l’eau,

  • à la protection de notre planète,

  • à la lutte contre le réchauffement climatique,

  • à la restauration de la biodiversité et aux intérêts économiques et démocratiques des habitants et des collectivités territoriales du Sud Francilien.

Ces caractéristiques entachent à la fois les modalités de l’enquête publique et le contenu de son dossier d’une part, et l’impact du projet d’autre part.

2 caractéristiques contraires aux règles et à l’objet de l’enquête publique

1°) le périmètre d’organisation de l’enquête publique relative à ce projet est étonnamment sous-dimensionné en regard de ses enjeux et conséquences.

En effet, l’enquête est circonscrite aux seules 3 communes matériellement touchées par les travaux de transformation de l’usine d’Arvigny et la réalisation de la conduite de rejet de ses effluents pollués dans la Seine.

Pourtant, il s’agit d’un projet dont l’impact immédiat et les conséquences seront terribles, pour des décennies, pour des millions d’habitants de notre région, à la fois en matière de protection de notre environnement et de nos ressources, du coût des factures d’eau, et de maîtrise démocratique des services publics d’accès à l’eau potable.

S’il était autorisé, ce projet aurait des conséquences préjudiciables dès 2022:

  • en matière de prélèvement abusif dans la nappe phréatique de Champigny, communément reconnue comme stratégique pour l’alimentation en eau de l’Ile de France.

  • en matière de distribution de l’eau pour les 80 000 habitants et communes du Nord Essonne et du sud-ouest du Val de Marne alimentés par cette usine,

  • en matière de re-potabilisation d’eau de Seine par les centaines de milliers d’habitants et les communes desservies par l’usine de Morsang sur Seine, située à quelques kms en aval du rejet des effluents pollués induits par le projet.

Et, à moyen terme (2028), le SEDIF, dans le dossier d’EP, et son délégataire Veolia dans sa communication, présentent systématiquement le procédé d’adoucissement de l’eau par OIBP prévu à Arvigny comme un laboratoire visant à l’expérimenter et à en « sécuriser » (sic) le lancement dans les principales usines d’eau potable du SEDIF (Neuilly sur Marne et Choisy le Roi) en Ile de France 5 ans plus tard, à une échelle 30 fois supérieure.)

2°) Un impact socio-économique à long terme non évalué

le SEDIF, p288 de l’étude d’impact, (EI) affirme que : « alors qu’elle sera de qualité irréprochable, l’eau purifiée d’Arvigny ne coûtera pas plus cher aux usagers, par solidarité des 151 communes desservies par le Syndicat », le payement de son surcoût étant provisionné pour les années suivantes.

Il croit pouvoir ainsi s’exonérer de toute étude d’impact économique des travaux projetés: rien sur leur durée d’amortissement, rien sur les coûts de maintenance des nouveaux équipements, alors que l’extrême fragilité des membranes utilisées pour le procédé OIBP implique selon l’expérience des usines de dessalement, leur remplacement fréquent; Rien non plus sur le surcoût de la repotabilisation de l’eau de la Seine , 4 km en aval, à Morsang sur Seine

Sur le fond

4 caractéristiques du projet qui le rendent dangereux et inamendable sur le fond

I – La référence abracadabrantesque à une « attente des usagers » en matière de décarbonatation de l’eau du robinet

Le seul argument du dossier justifiant le projet présenté est qu’il répondrait à une attente incontestable des usagers.

Une attente tellement évidente pour les auteurs qu’il n’est même pas envisagé de la démontrer.

L’EI se borne dès lors, à l’appui de cette allégation, à faire état d’une enquête de 2018 de Médiamétrie pour le compte du SEDIF . Le problème, c’est que la seule enquête connue de Médiamétrie pour le SEDIF en 2018 est une enquête de satisfaction (auprès de 0,1% des usagers du SEDIF) sur la qualité du service de l’eau, et particulièrement la qualité de l’eau du robinet. Si une autre enquête a été menée ou d’autres questions posées portant sur une évolution du traitement de l’eau distribuée, ces questions et leurs réponses sont tenues secrètes. Jusqu’à preuve du contraire, la proportion citée dans l’EP de « plus des 2/3 des habitants du SEDIF prêts à payer 1€ de plus par mois et par personne pour l’élimination des micropolluants, du calcaire et du chlore » est une invention de toute pièce.

Il est d’ailleurs regrettable que l’encadrement des sources et la déontologie des dossiers d’enquête publique autorise la reprise de telles affabulations, dénuées de tout fondement.

A contrario, ce qui est certain:

  • c’est que le SEDIF, ni son délégataire depuis 100 ans, n’ont jamais été en mesure, malgré leurs moyens considérables, d’obtenir ni de produire l’accord d’une association d’usagers ou de consommateurs à l’appui de leur projet démiurgique de transformation de l’eau distribuée à l’échelle de l’Ile de France, sur la base de « l’expérimentation » projetée à l’usine d’Arvigny,

  • c’est que pas un seul des élus locaux qui dirigent le SEDIF, n’a jamais ni consulté, ni informé ses électeurs, de son intention de réaliser un projet générateur d’un surcoût de plus de 20% de l’eau potable distribuée, d’une pollution sans précédent du milieu naturel, d’une surconsommation énergétique. Aucun des auteurs (élus ou agents publics) de ce projet ne peut arguer d’un mandat sollicité et obtenu à ce sujet de la part d’usagers.

  • aucune des instances consultatives où siègent des usagers dans le domaine de l’eau (à l’échelle du Bassin, de la région ou des Départements, des EPCI ou syndicats mixtes compétents n’a jamais examiné ce projet à contre-courant de l’histoire et de l’intérêt général.

C’est notamment le cas :

  • de la CCSPL de l’EPT GOSB (Etablissement public territorial Grand Orly Seine Bièvre), où siègent des représentants des usagers des communes destinataires de l’eau trafiquée projetée par le SEDIF,

  • de la CCSPL de la CA GPSSES (communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart) compétente pour l’eau et l’assainissement dans ce secteur,

La prétendu consultation exemplaire, organisée durant la trêve estivale de 2019 « sous l’égide de la CNDP », restituée dans le dossier d’EP, n’a donné lieu au total qu’à une rencontre avec 4 personnes à Melun!…

Aucun des usagers du service d’eau des 5 communes destinataires n’en a jamais entendu parlé, ni n’a eu sous les yeux (affichage, bulletins et sites municipaux, presse locale écrite ou audio) une seule information au sujet de ce projet.

  • Ce qui est certain et avéré (jusqu’à production d’un seul contre-exemple) en Ile de France c’est que, par contre:

  • les opérateurs publics, à l’image du SEDIF ici, qui se sont ralliés et sont devenus les zélateurs forcenés depuis 15 ans des procédés de décarbonation de l’eau au prix fort, ne l’ont jamais fait en concertation avec leurs usagers.

Leur conversion à cette technique a, toujours et partout, été exclusivement le résultat d’une campagne intense de lobbying des sociétés privées leaders sur le marché de l’eau (Veolia, Suez et Saur) sous forme de rendez-vous réunions, outils divers de communication. Nous sommes ici face à un cas choquant d’instrumentalisation de titulaires de mandats électifs et de compétences territoriales au bénéfice d’intérêts privés.

  • jamais, durant ces 15 années, les compétences pourtant nombreuses et remarquables dans le champ de l’université et de la recherche dans le domaine de l’eau n’ont été sollicitées sur cette question. Les seules évaluations connues de ce procédé émanent des intérêts privés promoteurs de cette « solution ».

  • Ce qui est certain et avéré, c’est donc que l’attente des usagers, agitée comme un hochet par les promoteurs de ce projet n’existe absolument pas et que, a contrario, ce projet, s’il par malheur il était validé, contrecarre, complique et diffère la réponse aux attentes des usagers dont nous sommes et qui sont:

1) de l’eau moins coûteuse:

Les usagers dont nous sommes se réjouissent de la baisse du coût de la part eau potable de leur facture, rendue possible depuis 20 ans par le mouvement national de reprise en gestion publique de l’eau (baisse associée au changement de mode de gestion, ou consentie par les délégataires sous la pression de ce mouvement, pour conserver leurs positions: c’est le cas des baisses inédites proposée par Veolia depuis 11 ans pour conserver pour l’éternité la DSP déjà centenaire qu’il exerce pour le SEDIF.

  • Les usagers ont bien compris que la hausse du prix qu’ils vont payer demain au titre de cette transformation de l’eau, (en se basant sur l’estimation minorée du SEDIF de 20 centimes au mètre cube) effacera complètement la baisse obtenue:

En effet, à compter de 2028 (à l’aune de la production moyenne des 3 usines concernées par le projet (soit 604 000 m3/jour), celles de Savigny-le-Temple,, Choisy-le-Roi, Neuilly-sur-Marne, c’est une augmentation minimale de 151 000 euros par jour et de 55 millions d’euros par an sur leur facture d’eau que ce projet va leur coûter, pour un bilan environnemental par ailleurs calamiteux.

2) une eau moins polluée:

Le SEDIF, avec son projet, se vante « d’anticiper la dégradation de la ressource ». Il le justifie donc par « la dégradation des milieux aquatiques présentant à l’état de traces des micropolluants, des perturbateurs endocriniens, des micro- plastiques, est constatée et largement relayée par la presse » (sic). Toujours sur la base de ses enquêtes-maison, il nous explique que les usagers attendent à 89% une élimination des micropolluants.

Mais ce que le SEDIF ne dit pas c’est que les usagers, dont nous sommes, attendent à 100% que l’élimination des micros-polluants se fasse à la source en évitant leur production, par une action renforcée de responsabilisation juridique et financière des auteurs de cette production, pour l’éliminer .

A cette fin, les usagers attendent d’abord de leurs services de l’eau qu’ils s’engagent plus activement dans la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, dans le Plan national micropolluants, notamment en matière de polluants phytopharmaceutiques, et dans la suppression des micro-plastiques. Ils attendent que les contrôles de la qualité de l’eau intègrent ces polluants pour en vérifier la diminution.

Les usagers sont donc farouchement opposés, à contrario, à des évolutions techniques coûteuses, dont la rentabilité et l’utilité reposent sur une dégradation de la ressource en eau.

  • des modes de chauffage et des appareils électro-ménagers plus adaptés à l’eau qu’ils utilisent

Les usagers, dont nous sommes, sont moins niais que le prétend le SEDIF: ils ont compris depuis longtemps que, si certains appareils sont altérés par l’eau qui y circule, c’est qu’ils sont mal conçus ou mal réglés et que c’est eux qui doivent être améliorés et non pas l’inverse.

Ils savent depuis longtemps ce qui permettra d’éviter et de résoudre les phénomènes d’entartrage générateur d’obsolescence et d’empreinte carbone dégradée de leurs appareils : des chaudières, chauffe-eau ou appareils électro- ménagers conçus pour chauffer l’eau, en-deçà de 55 voir 50 degrés, accompagnés de circuits fermés ou de cuves évitant les déperditions de calories, et des programmes publics plus offensifs de suppression des habitats passoires-thermiques nécessitant du chauffage à outrance.

Dans leur choix de consommation, les usagers, sont un peu plus responsables et clairvoyants que les dirigeants du Sedif.

Ils sont choqués de découvrir un projet qui leur vend un confort individuel au prix d’une externalisation des coûts socio-écologiques de ce confort (pollution, gaspillage de la ressource, surconsommation énergétique, et coût de service), en les renvoyant à des dizaines de kms plus loin, au niveau de l’usine de production et de sa conduite de rejet en Seine

Enfin, les usagers dont nous sommes, savent compter: ils savent que la part de l’eau du réseau d’eau potable issue des usines franciliennes consacrés à l’alimentation (boisson et cuisine) et à l’hygiène corporelle est très minoritaire dans le volume global distribué. Ils ont compris que, plutôt que de payer au prix fort une eau « parfaite » qui finira majoritairement en usages qui se satisfont d’eau propre non potable (arroser les pelouses, tirer la chasse d’eau, etc….), il est plus vertueux et plus efficace, de progresser dans une modulation différenciée du traitement de l’eau selon ses usages.

3)  Réduction du goût de chlore:

Les usagers qui se sont renseignés sur les moyens d’éviter le goût désagréable de la chloration de l’eau potable ont appris :

  • que son augmentation résultait du plan gouvernemental antiterroriste vigipirate (faisant suite aux les attentats de 2001),

  • que le recours persistant au chlore, dans le cas de captage d’eau souterraine, avait principalement pour objet de prévenir l’altération de l’eau produite par des micro-organismes entre l’usine et les points de distribution, du fait de la durée de présence de l’eau acheminée, de la vétusté éventuelle, et surtout de fuites affectant ces canalisations de transport. Le taux de rendement des réseaux préconisé pour sécuriser le renoncement à la chloration est en général (selon la documentation « grand public » en la matière) d’au moins 95%.

De façon étonnante, le volumineux dossier d’enquête reste muet sur la qualité et l’étanchéité de la canalisation de plusieurs dizaines de kms qui transportera l’eau trafiquée de l’usine d’Arvigny jusqu’aux 5 communes utilisatrices:

  • Aucune référence n’y figure quant à une consultation des autorités sanitaires en vue de valider ce projet de déchloration.

  • Aucun chiffre n’est fourni et aucun programme de travaux de maintenance ni d’amélioration n’est évoqué.

Cela laisse supposer que ce long réseau, à l’instar de la moyenne du secteur géographique, a un taux de rendement plutôt de l’ordre de 85 à 90%, insuffisant pour que les autorités sanitaires autorisent le transport d’une eau non chlorée sur une telle distance.

Dans l’attente d’une politique patrimoniale à la hauteur des prérequis pour une dé-chloration de l’eau du robinet, les usagers dont nous sommes, préfèrent sans hésitation, recourir au moyen éprouvé, simple et gratuit, garantissant la disparition du goût de chlore des quelques litres d’eau qu’ils boivent quotidiennement (au plus). A savoir, laisser reposer une heure au moins dans une carafe ouverte , à l’air libre ou au réfrigérateur pour permettre le dégazage du chlore contenu dans l’eau. Et les dirigeants du SEDIF ignorent encore cette méthode moins onéreuse que leurs grands projets, les usagers sont prêts à leur proposer une petite séquence bienveillante de rattrapage .

II/ le prélèvement supplémentaire sur la nappe de Champigny

A plusieurs reprises dans le dossier d’EP, le SEDIF affirme que le projet n’aura pas d’incidence sur le niveau actuel de prélèvement dans la nappe de Champigny de 22 000 m3 en moyenne par jour . Dans le même temps, l’étude d’impact indique que le nouveau procédé génère un volume d’eau polluée rejeté 6 fois supérieur, soit un total de 3000 m3.

L’explication de cette contradiction est apportée par le SEDIF dans son communiqué de presse du 12 mai 2021, relatif à cette enquète publique. Il mérite le détour; en effet, ce communiqué confirme que 10 à 15% de l’eau prélevée ne pourra franchir la membrane (on retrouve ici les 2500m3 supplémentaires prélevés pour être rejetés dans le milieu naturel), mais que « Aucun impact n’est à prévoir en terme de prélèvement quantitatif dans la ressource, puisque le supplément d’eau prélevé en entrée d’usine est rejeté quelques mètres plus loin.  » (sic!), .

Le SEDIF présente donc comme insignifiant un prélèvement supplémentaire équivalent à la consommation d’une ville de 15 000 habitants dans une nappe d’eau protégée et sous tension, se traduisant par un rejet en milieu naturel (dans la seine) d’un volume équivalent d’effluents pollués, au motif que ce rejet intervient quelques mètres plus loin!!! Quel crédit est-il possible d’accorder aux énonciateurs de tels raisonnements?!,

Cette absence totale de sens des responsabilités environnementales de la part du SEDIF, témoigne à notre avis de son incapacité et son illégitimité à conduire un projet d’impact régional à long terme.

L’important prélèvement supplémentaire dans la nappe de Champigny qui donc ici annoncé est dans tous les cas contraire à l’ensemble des préconisations des autorités publiques compétentes en matière d’eau à l’échelle du bassin, comme à celui du Département (77) ou de l’agglomération (CA GPSSES).

La commune de Savigny-le-Temple, fait partie des 113 communes membres de la Zone de répartition des eaux (ZRE) créée en 2009 en regard de l’insuffisance chronique des ressources aquifères de la nappe de Champigny face à ses sollicitations. Ce contexte de déséquilibre n’a fait que s’aggraver depuis 12 ans.

Il faut souligner la faiblesse temporaire et locale du cadre juridique de l’impératif de réduction des prélèvement qui affectent cette nappe, du fait de l’annulation du SDAGE Seine Normandie 2016-2021 et d’un prélèvement opéré dans un territoire interstitiel échappant au maillage des SAGE en vigueur dans le sud francilien.

Cette fragilité ne peut pas être pour le SEDIF une opportunité de s’affranchir de l’obligation collective irréfragable s’imposant aux opérateurs publics de réduction des prélèvements dans la nappe de Champigny.

III- l’augmentation exorbitante de la consommation d’énergie inhérente au projet présenté

Le dossier d’enquête affirme avec aplomb que la qualité de l’eau distribuée suite aux travaux projetés se traduira par une baisse de l’empreinte carbone extrêmement précise, de « 56,3kgCO2eq / an »(source SEDIF).

Soulignons que ce dossier, au même titre que tous les documents de communication diffusés par les multinationales vendeuses de procédés d’adoucissement d’eau potable, n’a jamais été en mesure de citer la moindre étude scientifique et/ou universitaire, ni d’un organisme compétent en économie d’énergie, pour accréditer cette allégation: une fois encore sur le sujet. Ce projet, annoncé comme préfiguration d’une reproduction à une échelle de centaines de millions d’euros repose en fait sur des allégations sans fondement. Nous avons expliqué plus haut à quel point ce projet s’oppose à l’évolution nécessaire et possible des modes de consommation d’eau chaude.

Par contre, ce qui est annoncé et chiffré et vérifiable, c’est l’explosion du coût énergétique de l’eau produite induite par ce projet:

« En situation future, le fonctionnement des process et des différents équipements (pompes…) induira une augmentation significative de la consommation d’électricité, et la consommation future supplémentaire du site est ainsi estimée à 3 000 000 kWh/an ».

Il s’agit donc d’un triplement de la consommation actuelle!

Et ce que le dossier annonce également: c’est que l’eau produite à ce coût énergétique, sera en fait impropre à la consommation humaine et qu’il faudra lui réinjecter ensuite 20% d’eau non traitée par l’OIBP, pour la rendre consommable.

Cela, sans aucun espoir de limiter ultérieurement ce gaspillage, puisque le maillage des membranes utilisés en OIBP, pour filtrer les plus infimes polluants

exige et exigera toujours une pression considérable pour être traversé par l’eau après sa purification.

Qu’un opérateur publique ose encore ainsi, au XXIème siècle, promouvoir, pour satisfaire un besoin essentiel universel, un procédé générateur d’une telle augmentation de consommation d’énergie est tout simplement irrecevable: Plus de 5 ans après la signature de l’accord de Paris, alors que se confirme année après année l’hypothèse d’un non respect par la France des engagements de réduction impérative des émissions de CO2 pour contenir le réchauffement climatique, le projet présenté serait, pour cette simple raison contraire aux intéréts des habitants de leurs collectivité et de notre planète

IV -Création d’une pollution importante du milieu naturel, 5 km en amont du captage d’une usine d’eau potable qui dessert tous le sud francilien

Soulignons pour commencer que le projet est incomplet sur cette question des pollutions: le DEP explique ainsi que le chlore gazeux devant être utilisé entre sous le régime déclaratif au titre de la réglementation au titre des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement. Le projet affirme que en accord avec les services instructeurs (accord non reproduit dans le dossier), cette déclaration sera faite de façon disjointe de la présente demande, et en tout état de cause avant utilisation de ce réactif.

Le SEDIF reconnaît dans son dossier, qu’il a adopté l’option d’un rejet d’effluents polluants en Seine, parce que l’autorité compétente en matière d’assainissement à Savigny-le-Temple (la C.A. GPSSES) a refusé la réception de ces déchets dans le réseau public d’eaux usées, en regard de la saturation des réseaux et de la station d’épuration de Boissettes concernée.

Le SEDIF admet donc que son option de polluer la Seine ne correspond pas à la recherche de la solution écologiquement optimale, mais est une option adoptée par défaut, du fait du refus des autorités compétentes en matière d’assainissement de valider son projet d’un autre temps.

Les tableaux du dossier exposant les dangers inhérents aux différents produits utilisés pour l’OIBP classent leur effet sur les eaux superficielles et notamment sur la Seine comme élevés (« négatif significatif – -« ), qu’il s’agisse des effets permanents (fonctionnement ordinaire de l’usine), temporaires, directs ou indirects (page 294/307).

Les mesures prévues en conséquences ne sont pas présentées comme éliminant ces effets, mais permettant simplement de les éviter, compenser ou accompagner, afin d’en réduire l’impact.

La limitation prétendue de l’impact polluant de ces rejets en Seine résulte du ratio qui reste faible entre le volume de ces effluents et le débit de la Seine à cet endroit, mais aussi par le fait que la qualité de son eau reste aujourd’hui encore dégradée en amont du rejet, pour certains composants mesurés. Malgré le caractère très confus du dossier sur ce point on comprend néanmoins qu’il y aura un rejet quotidien de 15 tonnes de sel dans la Seine

Il résulterait donc bien de ce projet une dégradation inacceptable de la qualité de l’eau, par rapport à la situation actuelle qui ne comporte, rappelons-le, aucun rejet en milieu naturel. Cette pollution est d’autant plus dommageable que le rejet, ultraconcentré, intervient à 5 km à peine du captage très important (220 000m3/j) de l’usine de production d’eau de Morsang sur Seine, tête du réseau sud francilien de Suez en position de quasi-monopole pour la moitié nord urbanisée de l’Essonne, jusqu’à Magny-les-Hameaux dans les Yvelines, et jusqu’à Ormesson dans le Val de Marne et Tournan en Brie en Seine et Marne.

Le rejet des concentrats pollués d’Arvigny, à 650 mètres seulement de la limite amont du périmètre de protection rapproché de Morsang sur Seine aura un impact inévitable sur le traitement nécessaire de re-potabilisation de l’eau captée; aucune estimation de cet impact n’est faite ni envisagée.

Plus incompréhensible encore, le dossier d’EP fait totalement l’impasse sur les objectifs de dépollution, impératifs à court terme, du plan régional « qualité de l’eau et baignade » adopté par les autorités compétentes pour la Seine et attendus par les usagers à l’échéance des JO de 2024.

Sur ce point là encore, Ce projet du SEDIF tourne le dos aux besoins et objectifs des franciliens. Il parait avoir été réfléchi il y a plus de 50 ans.

En conclusion:

Nous adressons un appel solennel à toutes les autorités publiques compétentes en mesure d’archiver ce projet aberrant tant qu’il est encore temps.

Il n’y a aucune fatalité à voir les habitants ciblés ni à voir collectivités locales instrumentalisés au service des stratégies des multinationales en quête de nouveaux territoires de profit.

Il n’y a aucune fatalité à voir nos modes de vie, de consommation, formatés, aliénés, quitte à créer de nouveaux besoins artificiels pour satisfaire ces stratégies d’intérêts privés, incapables de comprendre et d’assumer les impératifs collectifs auxquels nous devons répondre aujourd’hui.

Trop de temps, d’expertise et d’argents publics ont été déjà mobilisés et dilapidés au service de projets incapables de prendre en compte notre devenir commun dans sa globalité; des projets focalisés sur un objectif unique, au prix de dégâts et désordres évacués de leur champ de vision.

Ce qui est à l’ordre du jour, ce sont des enquêtes publiques donnant aux citoyens et à leurs délégués élus à tous les niveaux institutionnels, les informations et les éclairages permettant d’appréhender et de satisfaire conjointement les besoins présents et futurs de l’ensemble des êtres vivants co-responsables de leur pérennité de notre écosystème planétaire.

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